feu

1. feu

n.m. [ lat. focus, foyer ]
1. Dégagement simultané de chaleur, de lumière et de flamme produit par la combustion vive de certains corps comme le bois et le charbon : Il fait un feu pour se réchauffer flambée réjouissances organisées le soir autour d'un feu de bois, par des campeurs, des scouts
2. Destruction par les flammes, la combustion : Il a mis le feu à un tas de vieilles planches. Le feu a ravagé la forêt incendie
3. Source de chaleur utilisée pour le chauffage ou la cuisson des aliments : Cette viande doit cuire à feu doux.
4. Lieu où l'on fait le feu : Une veillée au coin du feu âtre, cheminée, foyer
5. Moyen de produire du feu ; moyen d'allumer une pipe, une cigarette : Auriez-vous du feu ? des allumettes ou un briquet
6. (Au pl.) Source d'éclairage : Extinction des feux à vingt-deux heures lumière l'éclairage placé sur le devant d'une scène de théâtre
7. (Au pl.) Dispositif lumineux que tout avion, tout navire doit arborer de nuit : Les feux de navigation.
8. (Au pl.) Dispositif lumineux destiné à l'éclairage et à la signalisation nocturnes d'un véhicule automobile : Les feux de croisement ceux que le conducteur doit allumer lorsqu'il croise un autre véhicule ; codes ceux qui définissent les dimensions du véhicule ; lanternes, veilleuses phares à utiliser hors des villes destinés à signaler l'intention du conducteur de se déporter vers la droite ou la gauche ; clignotant warning [anglic.]
9. Litt. Éclat : Les feux d'un diamant flamboiement, scintillement
10. Décharge d'une arme au cours de laquelle un projectile est lancé sous l'effet de la combustion de la poudre : Ils ont ouvert le feu ils ont commencé à tirer ; tir tir rapide et abondant
11. Combat : Les soldats vont au feu.
12. Fam. Pistolet.
13. Sensation de chaleur, de brûlure : Le feu du rasoir irritation après le rasage
14. Ardeur des sentiments : Un discours plein de feu fougue, passion ; mollesse, nonchalance
Arts du feu,
la céramique, la verrerie, l'émaillerie.
Coup de feu,
décharge d'une arme à feu ; fig., dans un restaurant, moment d'agitation à l'heure des repas.
Donner, obtenir le feu vert,
donner, obtenir l'autorisation d'agir, d'entreprendre qqch.
En feu,
en train de brûler ; fig., irrité : L'hôtel est en feu. Le piment met la bouche en feu.
Être pris entre deux feux,
se trouver attaqué de deux côtés à la fois ; fig., recevoir en même temps les critiques de gens d'opinions contraires et se trouver dans une situation sans issue.
Être sans feu ni lieu,
être sans domicile.
Être tout feu tout flamme,
être plein de zèle, d'ardeur : Elles sont tout feu tout flamme.
Faire feu,
tirer avec une arme à feu.
Faire feu de tout bois,
utiliser toutes les possibilités dont on dispose.
Faire long feu,
en parlant d'un projectile, partir avec retard ; au fig., ne pas réussir : Son projet a fait long feu a échoué
Faire mourir qqn à petit feu,
le tourmenter sans cesse, lui causer de grands chagrins.
Feu !,
ordre par lequel un chef militaire fait tirer sur l'ennemi.
Feu d'artifice
Feu de Bengale,
artifice donnant une flamme colorée.
Feu de cheminée,
embrasement de la suie accumulée dans une cheminée.
Feu de joie,
feu allumé lors de réjouissances publiques.
Feu de la Saint-Jean,
feu de joie que l'on allume dans la nuit de la Saint-Jean (24 juin), dans certaines régions.
Feu de paille,
passion de courte durée ; ardeur passagère.
Feu ouvert,
en Belgique, cheminée où l'on brûle des bûches.
Feu sacré,
zèle, enthousiasme durable.
Feu Saint-Elme,
phénomène électrique lumineux qui se manifeste parfois à l'extrémité des mâts d'un navire.
Feu tricolore ou feu de signalisation,
signal lumineux commandant le passage libre (feu vert), toléré (feu orange) ou interdit (feu rouge) du trafic automobile.
Il n'y a pas de fumée sans feu,
toute rumeur repose sur une parcelle de vérité (proverbe).
Jouer avec le feu,
s'exposer témérairement à un danger.
Ne pas faire long feu,
ne pas durer longtemps ; être vite terminé : Ses bonnes résolutions n'ont pas fait long feu.
N'y voir que du feu,
ne s'apercevoir de rien.
Prendre feu,
s'enflammer, en parlant d'une substance, d'un objet ; fig., s'enthousiasmer ou s'emporter.

2. feu, e

adj. [ du lat. fatum, destin ] [feus, feues].
Litt. Décédé depuis peu : Ma feue tante. Feu mes grands-mères.
Remarque: L'adjectif feu est invariable s'il est placé avant l'article ou le possessif.
Maxipoche 2014 © Larousse 2013

FEU1

(feu) s. m.

Résumé

Développement de chaleur et de lumière.
Calorique.
Chez les anciens, un des quatre éléments.
Objet de culte.
Feu central du globe.
Incendie ; embrasement.
Toute matière combustible allumée.
Ce qui sert à allumer.
Feu en termes de cuisine.
10° Feu de joie.
11° Feux qu'allume une armée.
12° Le supplice du bûcher.
13° Cautérisation à l'aide du fer rouge.
14° Feu en termes de chimie.
15° Feu en termes de métallurgie.
16° Coup de feu.
17° Pompe à feu.
18° Décharges d'armes à feu.
19° Terme de fortification.
20° Feu d'artifice.
21° Le feu de la cheminée.
22° Cheminée, chambre à feu.
23° Garniture de cheminée.
24° Un ménage, une famille.
25° La simple lueur des flambeaux.
26° Bougies dont on se sert aux audiences de criées.
27° Indemnité qu'on donne à un acteur.
28° Torche, instrument de destruction.
29° Fanal.
30° Météore enflammé.
31° Feu grisou.
32° Lumière des astres.
33° La chaleur du soleil.
34° Éclat, lumière.
35° Couleur de feu.
36° Vive chaleur qui se fait sentir dans le corps.
37° Nom de diverses éruptions.
38° Passions, ardeurs.
39° Vivacité d'esprit.
40° Vivacité d'action, de mouvement.
41° Force des liqueurs spiritueuses.
42° La passion de l'amour.
43° Révolution, agitation.
44° Feu ardent, bryone. Proverbes.
Développement de chaleur et de lumière, d'où résulte la combustion ou l'échauffement des corps.
Le feu qui semble éteint souvent dort sous la cendre ; Qui l'ose réveiller peut s'en laisser surprendre [CORN., Rodog. III, 4]
Et le feu mal éteint est bientôt rallumé [ID., Sertor. I, 3]
J'allumai du feu avec des cailloux [FÉN., Tél. X]
Le feu ne peut subsister qu'en absorbant l'air, et il devient d'autant plus violent qu'il en absorbe davantage [BUFF., Hist. min. Introd. Œuvres, 1re part. t. VI, p. 52, dans POUGENS.]
Le père Gobien dit, qu'avant l'arrivée des Européens, ils [les habitants des îles Marianes] n'avaient jamais vu de feu, que cet élément si nécessaire leur était entièrement inconnu, qu'ils ne furent jamais si surpris que quand ils en virent pour la première fois, lorsque Magellan descendit dans une de leurs îles [ID., Hist. nat. Hom. Œuvres, t. v, p. 51]
Plus près de l'incendie, ils ne pouvaient ni reculer, ni demeurer ; et comment avancer, comment s'élancer à travers les vagues de cette mer de feu [l'incendie de Moscou] ? [SÉGUR, Hist. de Nap. VIII, 7]
Il se met quelquefois au pluriel. La montagne vomissait des feux.
Que le courroux du ciel, allumé par mes vœux, Fasse pleuvoir sur elle [Rome] un déluge de feux ! [CORN., Hor. IV, 5]
Terme de liturgie. Feu nouveau, celui qui est allumé et béni à l'office le samedi saint. Faire du feu de quelque chose, le brûler.
Je n'ai point maintenant de tes lettres sur moi, Mais j'en ferai du feu jusques à la dernière [MOL., le Dép. IV, 4]
Faire feu, se dit de corps qui, se choquant, produisent du feu, des étincelles.
Ils ont tous la cassure vitreuse, ils font également feu contre l'acier, ils résistent de même à l'action des acides [BUFF., Min. t. VII, p. 21]
Fig. Faire feu des quatre pieds, faire tous ses efforts pour réussir ; locution tirée de ce que les pieds ferrés des chevaux font souvent feu sur le pavé. Il le craint comme le feu, il le craint extrêmement. Vomir feu et flamme, se dit d'un volcan en éruption. Fig. Jeter feu et flamme, vomir feu et flamme, se livrer à un grand emportement.
Qu'il semblait que je fusse le voleur et son fils le volé, et qu'enfin il avait vomi feux et flammes contre moi [LESAGE, Guzm. d'Alfar. IV, 7]
Dès qu'il apprit que j'avais fait pour lui un aveu qu'il n'avait pas fait, il jeta feu et flamme, m'accusant de l'avoir trahi [MARMONTEL, Mém. VIII]
Prendre feu, s'enflammer. Les matières sèches prennent feu très facilement. Fig. Prendre feu, s'émouvoir, s'irriter vivement et tout à coup.
Vous voudriez que je prisse feu d'abord contre eux [MOL., Impr. 3]
Nous allons voir comme on faisait prendre feu à Luther [BOSSUET, Var. 6]
Il ajouta en riant qu'il lui était plus aisé de donner la paix à l'Europe que de la donner à deux femmes, et que nous prenions feu pour des bagatelles [MAINTENON, Lett. à Mme de Frontenac, 1680]
Le peuple prend feu aussitôt : il pousse mille cris confus remplis d'indignation et de menaces [VERTOT, Révol. rom. t. II, p. 141]
La décence même y babille, Et par la gaieté qui prend feu Se laisse coudoyer un peu [BÉRANG., Gourmand.]
Fig. Mettre le feu aux étoupes, provoquer, causer l'explosion de passions, de sentiments, tels que la colère, l'amour, etc. On dit dans un sens analogue : Le feu prend aux étoupes. Fig. C'est le feu et l'eau, se dit de deux choses tout à fait contraires, de deux personnes qui se haïssent, ou qui sont d'opinions opposées, de caractères incompatibles. Fig. On dit que le feu est à une marchandise, pour signifier qu'il y a presse à l'acheter (cette locution vieillit). Fig. Familièrement. N'y voir que du feu, être ébloui au point de ne rien voir, et aussi ne rien comprendre dans une affaire ; locution tirée de ce que, quand un coup est porté sur la tête ou les yeux, on voit beaucoup d'étincelles, mais sans rien distinguer au moment du coup.
Il se dit quelquefois pour calorique.
Le feu répandu dans l'intérieur du globe, ce feu caché dans l'eau et dans la glace même est probablement la source impérissable de ces exhalaisons, de ces vapeurs dont nous sommes continuellement environnés [VOLT., Dict. phil. Air.]
Chez les anciens, un des quatre éléments, avec l'air, l'eau et la terre. Dans l'ancienne physique, le feu élémentaire, le feu pur.
La lumière, dit-on, et le feu élémentaire ne sont qu'une même chose, une seule substance ; cela peut être : mais, comme nous n'avons pas encore d'idée nette du feu élémentaire, abstenons-nous de prononcer sur ce premier point [BUFF., Minér. t. VI, p. 25, dans POUGENS]
Le feu, objet principal du culte des anciens Persans.
C'est vous, ô Seigneur notre Dieu, qui avez choisi vous-même Abram, qui l'avez tiré du feu des Chaldéens, et qui lui avez donné le nom d'Abraham [SACI, Bible, Esdras, II, IX, 7]
Feu sacré, feu qui, chez les Romains, était entretenu constamment et gardé nuit et jour par les vestales. Fig. Feu sacré se dit de sentiments nobles et passionnés qui se conservent et se transmettent. Le feu sacré de la liberté.
On a été assez heureux pour conserver les ouvrages de votre père [Cicéron] et ceux de quelques autres grands hommes ; ainsi le feu sacré n'a jamais été totalement éteint [VOLT., Dial. 13]
On dit aussi : Ce poëte est animé du feu sacré, c'est-à-dire il a du génie. Cet écrivain manque du feu sacré, n'a pas le feu sacré. Feu sacré, dévouement, zèle à servir ; il s'est beaucoup dit sous le premier empire.
Nos aimables barons, formés sur le modèle d'Elleviou, vous enseigneront la belle tenue de l'état-major de Berthier et l'étiquette des maréchaux, sans oublier le dévouement, l'enthousiasme, le feu sacré [P. L. COUR., Lettr. X]
Feu central, dénomination par laquelle on désigne le foyer de chaleur qu'on suppose exister au centre du globe terrestre, à cause de la température croissante qu'on observe à mesure qu'on pénètre dans le sein de la terre. Feux souterrains, feux qui existent sous le sol et qui se manifestent par les éruptions volcaniques, les eaux thermales, etc.
On voit par tout ce que nous venons de dire, combien les feux souterrains contribuent à changer la surface et l'intérieur du globe [BUFF., Hist. nat. 2e disc. Œuvr. t. I, p. 167, dans POUGENS.]
Incendie, embrasement. Les ravages du feu. Le feu dura plusieurs jours.
Je vis la maison de Guitaut toute en feu [SÉV., 20]
La ville était prise, le feu était déjà de tous côtés [BOSSUET, Hist. II, 8]
La plupart des maisons et des palais qui avaient échappé au feu servirent d'abri aux chefs, et tout ce qu'elles contenaient fut respecté [SÉGUR, Hist. de Nap. VIII, 8]
Je m'élance, et, soudain l'enlevant dans mes bras, Je traverse les feux, je l'arrache au trépas [BRIFFAUT, Ninus II, I, 1]
Et l'astre [le soleil], qui tombait de nuage en nuage, Suspendait sur les flots son orbe sans rayon, Puis plongeait la moitié de sa sanglante image, Comme un navire en feu qui sombre à l'horizon [LAMART., Harm. II, 2]
Se rendre maître du feu, empêcher qu'un incendie ne fasse des progrès, ne s'étende. Mettre le feu, incendier.
Nabuchodonosor fit mettre le feu dans le temple [BOSSUET, Hist. II, 8]
Fig. Mettre le feu, porter le trouble, soulever les passions.
Je craindrais que la cajolerie Ne mît le feu dans la maison [LA FONT., Oies.]
Fig. Le feu se met dans ses affaires, est dans ses affaires, se dit de celui dont les affaires sont dérangées et que ses créanciers poursuivent.
Il en vint d'abord quelques-uns, de ces indignes amis ; mais, dès qu'ils virent que le feu était dans les affaires, et que la fortune de leur amie s'en allait en ruine, ils courent encore [MARIV., Pays. parv. 1re part.]
Le feu plus que jamais s'est mis dans mes affaires [DORAT, Feinte par amour, I, 5]
Mettre le feu dans les affaires, dans l'affaire, se dit de créanciers qui poursuivent vivement un homme embarrassé dans ses affaires.
D'Orieu et quelques magistrats très riches, nos créanciers, avaient voulu mettre le feu à nos affaires [SAINT-SIMON, 18, 215]
Si l'on met le feu dans l'affaire, si l'on dispute au lieu de se rapprocher, nous perdons tout [PICARD, Duhautcours, IV, 5]
Courir au feu, se hâter de porter du secours quand un incendie éclate. Fig. On y court comme au feu, se dit des spectacles et, en général, de tout ce qui attire un grand concours de personnes.
Mais vous, que vous vendez de ces toiles de soie !- La lingère : De vrai, bien que d'abord on en vendît fort peu, à présent, Dieu nous aime, on y court comme au feu [CORN., la Gal. du pal. I, 4]
Courir comme au feu, se dit aussi d'un grand empressement.
Vous n'avez qu'à parler, madame, je cours au notaire comme au feu [DANCOURT, la Femme d'intrigue, IV, 12]
Jeter des cris de feu, jeter de grands cris, des cris de désespoir, comme dans un incendie. Faire la part du feu, se dit, dans un incendie, quand, laissant brûler des parties qu'on croit ne pouvoir sauver, on s'attache à préserver ce qu'il y a chance de préserver.
Les autres chefs, ses vieux compagnons de gloire [du maréchal Mortier], l'avaient quitté les larmes aux yeux ; et l'empereur, en lui disant qu'il comptait sur sa fortune, mais qu'au reste, à la guerre, il fallait bien faire une part au feu [on le laissait à Moscou].... [SÉGUR, Hist. de Nap. IX, 6]
Un feu de cheminée, l'incendie qui éclate dans une cheminée, et qui, y étant concentré, n'a rien de bien grave. Fig. Il a mis le feu à la cheminée, se dit de celui qui, ayant mangé des mets trop salés, trop épicés, s'est mis le gosier en feu.
Toute matière combustible allumée. Feu vif, ardent.
On me fit du feu [SÉV., 14]
On arrive, on fait grand feu [ID., 78]
Les nymphes avaient eu soin d'allumer un grand feu de bois de cèdre [FÉN., Tél. I]
Il en est des livres comme du feu dans nos foyers ; on va prendre du feu chez son voisin ; on l'allume chez soi, on le communique à d'autres, et il appartient à tous [VOLT., Dict. phil. Prior.]
Combien le feu tient douce compagnie Au prisonnier, dans les longs soirs d'hiver ! [BÉRANG., Feu du prison.]
Feu clair, feu accompagné d'une flamme claire. Faire grande chère et bon feu, faire de grandes dépenses pour ses amusements. Prendre un air de feu, prendre l'air du feu, se chauffer à la hâte et comme en passant. Populairement, prendre une poignée de feu, même sens. Feu de reculée, très grand feu, ainsi dit parce qu'il force à se reculer. Un feu à rôtir un bœuf, un très grand feu. Un feu d'enfer, un feu très violent. Il y a toujours un feu d'enfer dans cette verrerie. Mettre de l'eau sur le feu, mettre sur le feu un vase plein d'eau. Mettre les fers au feu, voy. FER. Mettre le feu au four, chauffer le four. Passer une chose au feu, la passer au travers de la flamme. Montrer une chose au feu, la présenter au feu pour la faire sécher ou pour la faire chauffer légèrement. Donner le feu à un navire, chauffer les parties sur lesquelles on veut appliquer du brai ou du goudron. Jeter au feu, se dit de quelque objet qu'on veut anéantir.
J'avais déjà commencé une tragédie, je l'ai jetée au feu ; et je conseille à tous ceux qui ont la manie de travailler en ce genre d'en faire autant [VOLT., Déf. de mon oncle, ch. XX]
Fig. Feu de paille, se dit pour exprimer qu'un sentiment, qu'une ardeur est de peu de durée et s'éteint vite.
Mon amour est un feu de paille Qui luit et meurt en un instant [SCARRON, Poésies, dans LE ROUX, Dict. comique.]
Feu de paille se dit aussi de troubles passagers. Cette sédition ne fut qu'un feu de paille. Attiser, souffler le feu, le rendre plus vif en rapprochant les tisons ou en soufflant ; et fig. exciter les passions, les troubles, envenimer les querelles. Jeter de l'huile sur le feu, le rendre plus actif, en y versant de l'huile ; et fig. exciter encore des passions déjà allumées. Couvrir le feu, mettre de la cendre sur des tisons, sur des charbons, afin d'y conserver du feu.
Et les feux mal couverts n'en éclatent que mieux [RAC., Andr. II, 2]
S'il me reste encore quelque feu caché sous la cendre, mes anges souffleront, et il se ranimera [VOLT., Lett. d'Argental, 29 juin 1761]
Couvre-feu, garde-feu, voy. ces mots à leur rang alphabétique. Fig. Faire trop grand feu du bois de quelqu'un, user trop librement de son argent, de ses provisions.
Il faisait en un mot trop grand feu de mon bois [MONTFLEURY, Femme juge et part. IV, 2]
Jouer avec le feu, manier du feu pour s'amuser ; et fig. s'exposer imprudemment à quelque péril.
Enfant qui joue avec le feu [LAMART., Ép. à M. Léon Bruys d'Ouilly]
Fig. Faire feu qui dure, ménager son bien, sa santé.
Qui veut voyager loin ménage sa monture ; Buvez, mangez, dormez, et faisons feu qui dure [RAC., Plaid. I, 1]
Fig. Mettre le feu sous le ventre à quelqu'un, l'exciter vivement. Populairement et bassement. Il court comme s'il avait le feu au derrière, se dit d'un homme qui s'enfuit fort vite.
Il se dit quelquefois pour ce qui sert à allumer. J'ai un cigare, mais je n'ai pas de feu. Avez-vous du feu sur vous ? Donnez-moi du feu, c'est-à-dire une allumette, ou votre cigare allumé pour allumer le mien.
Terme de cuisine. Donner le feu trop chaud trop ardent à la viande, la faire rôtir à trop grand feu. Cuire à petit feu, c'est-à-dire en faisant un petit feu. On dit qu'une chose doit seulement voir le feu, quand elle doit être cuite légèrement et promptement. Entre deux feux se dit de plats que l'on fait cuire avec du feu dessous et dessus, comme les gratins. Faire griller quelque chose au feu d'enfer, le mettre au feu d'enfer, le faire griller à un feu vif de charbons, après l'avoir fortement saupoudré d'épices. Coup de feu, action d'animer le feu pour donner aux mets le dernier degré de cuisson. Le cuisinier est dans son coup de feu, Voy. aussi le n° 16. Fig. et familièrement. Coup de feu, le moment où l'on est le plus occupé. Il est dans son coup de feu.
10° Feux de joie, ceux qu'on allume sur les hauteurs ou sur les places publiques en signe de réjouissance.
Ce même peuple, un an auparavant, avait fait des feux de joie de la prise de M. le prince [LAROCHEF., Mém. 148]
On a fait à Vienne, à Londres, à Versailles des feux de joie pour des batailles que personne n'avait gagnées [VOLT., Cons. à un journal.]
Quand Babylone en feu célébrait vos conquêtes [ID., Sémir. I, 1]
Feu de la Saint-Jean, feu qu'on allume le jour de la Saint-Jean.
Nous avons fait deux admirables feux devant cette porte ; c'était la veille et le jour de Saint-Jean ; il y avait plus de trente fagots [SÉV., 26 juin 1680]
Faire les feux, s'est dit absolument pour faire des feux de joie, se réjouir.
Faites-en les feux dès ce soir [LA FONT., Fabl. II, 15]
11° Au plur. Il se dit des feux qu'allume une armée, et de son bivouac.
Déjà les feux sont presque éteints ; Et le silence règne en ces lieux inhumains [VOLT., Triumv. IV, 2]
Quelqu'un l'arrêta [l'empereur], en lui montrant l'arrière-garde ennemie entre lui et la ville, et derrière, les feux d'une armée de cinquante mille hommes [SÉGUR, Hist. de Nap. VII, 13]
Des feux qui brillèrent sur notre gauche dans la nuit du 23 au 24 avertirent du mouvement des Russes vers Malolaroslavetz [ID., ib. IX, 2]
12° Le feu, le supplice du bûcher. Le supplice du feu.
Le Tartuffe dans leur bouche [des hypocrites] est une pièce qui offense la piété ; elle est d'un bout à l'autre pleine d'abominations, et l'on n'y trouve rien qui ne mérite le feu [MOL., Tart. Préf.]
L'un, défenseur zélé des bigots mis en jeu, Pour prix de ses bons mots le condamnait au feu [BOILEAU, Épît. VII]
On reprochera toujours à la mémoire du cardinal de Richelieu la mort de ce fameux curé de Loudun, Urbain Grandier, condamné au feu comme magicien par commission du conseil [VOLT., Louis XIV, 2]
Brûler à petit feu, brûler lentement un condamné, afin de rendre le supplice plus cruel.
Elle est brûlée à petit feu à la Grève [SÉV., 406]
L'empereur du Japon fait brûler à petit feu les chrétiens qui sont dans ses États [MONTESQ., Espr. XXV, 13]
On brûla à petit feu dans Valladolid tous ceux qui étaient soupçonnés ; et Philippe des fenêtres de son palais contemplait leur supplice, et entendait leurs cris [VOLT., Mœurs, 163]
Par extension.
La fièvre brûla deux ans Voiture à petit feu [SARRASIN, dans RICHELET]
Fig.
Il n'y avait point encore de nouvelles, c'est brûler à petit feu [SÉV., 305]
Faire mourir quelqu'un à petit feu, lui causer des peines d'esprit, des inquiétudes, des chagrins qui le minent.
Un diable de neveu Me fait par ses écarts mourir à petit feu [PIRON, Métrom. II, 1]
Au moyen âge, épreuve du feu, épreuve qui s'employait pour décider des accusations.
On faisait porter au plaideur, à une certaine distance, un morceau de fer rougi au feu ; on mettait aussitôt ses mains dans un sac, et si, à l'expiration d'un délai fixé, elles portaient les marques du feu, il était irrévocablement condamné [BARGINET, Hist. du gouv. féodal, II, 2]
Fig. Par allusion aux anciennes épreuves par le feu. Mettre la main au feu pour une personne ou une chose, être sûr que la main mise au feu pour soutenir cette personne ou cette chose ne brûlerait pas, de même que ne brûlerait pas la main de l'innocent.
En mettre mon doigt au feu [LA FONT., Nic.]
J'aurais pour elle au feu mis la main que voilà [MOL., Éc. des mar. III, 10]
Il aurait mis sa main au feu qu'elle n'était pas revenue [HAMILT., Gramm. 10]
On dit dans le sens contraire : Je n'en mettrais pas la main au feu. Fig. et familièrement. Il se jetterait dans le feu pour lui, il se mettrait au feu pour lui, il ferait tout pour lui prouver son affection, son dévouement.
Ne savez-vous pas que je me mettrais au feu pour vous faire plaisir ? [GENLIS, Théât. d'éduc. la Lingère, I, 2]
Danse du feu, danse de sauvages dans l'Amérique septentrionale, autour du poteau auquel ils attachent leurs prisonniers. Le feu de l'enfer, les tourments des damnés.
Ou la princesse palatine portera la lumière dans vos yeux, ou elle fera tomber, comme un déluge de feu, la vengeance de Dieu sur vos têtes [BOSSUET, Anne de Gonz.]
Le feu du purgatoire, les peines que souffrent les âmes dans le purgatoire.
13° Cautérisation à l'aide du fer rouge. Il faut appliquer le feu aux plaies faites par la morsure des chiens enragés.
À mesure qu'Hercule coupe les têtes de l'hydre, Iolas y applique le feu, afin de les empêcher de renaître [BALZ., De la cour, 1er disc.]
Fig. Employer le fer et le feu, employer les remèdes, les moyens les plus violents. Bouton de feu, instrument de fer en forme de bouton qui, chauffé, sert à faire des cautérisations. Feu potentiel s'est dit autrefois pour ce qu'on nomme aujourd'hui cautère potentiel. Terme de maréchal. Donner le feu à un cheval, appliquer un couteau de fer tout ardent sur quelque tumeur qu'on veut résoudre.
14° Terme de chimie. Feu nu ou immédiat, le feu ordinaire sur lequel on met un vaisseau. Feu de roue, un feu disposé en cercle autour d'un creuset. Feu de réverbère, celui qui se fait dans un fourneau, par la réverbération de la chaleur, qui frappe le vaisseau par-dessus et tout autour. Feu de fusion, charbons allumés autour d'un creuset. Feu de suppression, un feu de charbons dont on couvre tout à fait le creuset ou le vaisseau. Feu de lampe, se dit d'un appareil dans lequel le vaisseau est échauffé par la chaleur toujours égale d'une lampe. Feu de bain, celui du bain de vapeurs, du bain-marie, du bain de cendre et autres de cette espèce. Feu de digestion, ou ventre de cheval, la chaleur du fumier. Feu olympique, le feu du soleil, dont on ramasse les rayons avec des verres ardents. Fig. et familièrement. Faire feu violet, faire du feu violet, faire quelque chose qui éclate d'abord, où il paraît de la vivacité, mais qui bientôt se dément. Locution prise de ce qu'une flamme qui n'est pas blanche n'est pas portée à un haut degré d'incandescence.
15° Terme de métallurgie. Feu, bas fourneau où s'opère la réduction d'un métal. Feu catalan, bas fourneau en forme de renardière. Feu d'atteinte ou de fusion, celui qu'on emploie pour la fusion et la calcination des métaux. On dit dans les verreries, le premier, le second, le troisième feu, pour marquer le degré d'avancement de l'ouvrage.
16° Coup de feu, défaut résultant de l'action trop vive du feu sur un objet. Cette porcelaine a un coup de feu. Ce rôti a un coup de feu.
17° Pompe à feu, pompe mue par une machine à vapeur, s'entend quelquefois de la machine elle-même. Cheval de feu, synonyme peu usité de cheval-vapeur. Pompe à feu, se dit aussi des pompes à incendie.
18° Décharges d'armes à feu. Essuyer le feu de l'ennemi.
Il arrive sans artillerie, monte à l'escalade de la citadelle sous le feu du canon ennemi, et, malgré une résistance opiniâtre, il prend la forteresse [VOLT., Mœurs, 152]
Tel court au feu avec intrépidité qui ne laisse pas d'être un très mauvais officier [J. J. ROUSS., Scienc. 2]
Soldat bientôt, courant au feu, Je perdis une jambe en route [BÉRANG., Ange gard.]
Il presse Davout qui le suit ; mais ce maréchal n'arriva près du champ de bataille qu'avec la nuit, quand les feux s'affaiblissaient, quand tout était décidé [SÉGUR, Hist. de Nap. IX, 2]
On vit alors son frère [du général Delzons] se jeter sur lui, le couvrir de son corps, le serrer dans ses bras, et vouloir l'arracher du feu et de la mêlée ; mais une seconde balle l'atteignit lui-même, et tous deux expirèrent ensemble [ID., ib.]
Les avant-postes des deux empires répugnaient à renouveler les hostilités ; un nouvel ordre vint, une même hésitation y répondit ; enfin Murat, irrité, commanda lui-même, et ces feux dont il semblait menacer l'Asie, mais qui ne devaient plus s'arrêter qu'aux rives de la Seine, recommencèrent [ID., ib. VIII, 6]
Faire feu, se dit d'une troupe qui tire avec ses fusils et son artillerie.
L'armée faisait un feu continuel sur celle de Marlborough [VOLT., Louis XIV, 19]
On dit semblablement dans la marine : faire feu des deux bords. Feu de tribord. Feu de bâbord. Faire feu, se dit aussi d'un soldat qui lâche isolément un coup de fusil La sentinelle fit feu, et le poste accourut. Feu de peloton, décharge faite à la fois par tout un peloton. Feu de deux rangs ou de file, feu d'une troupe qui tire par file et sans interruption. Feu roulant, tir d'une troupe tel que, chaque homme ou chaque division tirant à volonté, il en résulte une suite incessante de coups.
Les Anglais firent un feu roulant, c'est-à-dire qu'ils tiraient par divisions [VOLT., Louis XV, 15]
Fig. Un feu roulant de saillies, d'épigrammes, saillies, épigrammes lancées coup sur coup. Faire un feu d'enfer, tirer rapidement un grand nombre de coups de canon, de coups de fusil. Éteindre le feu ou les feux de l'ennemi, démonter ses canons et les empêcher de tirer par une artillerie supérieure en nombre ou en habileté. Exercice à feu, voy. EXERCICE. Entre deux feux, se dit d'un corps de troupes enveloppé par l'ennemi et sur lequel on tire de deux côtés.
Cinq fois dans cette journée ce poste se trouva dépassé par les colonnes russes qui poursuivaient les nôtres, et cinq fois ses coups, ménagés et tirés à propos sur leur flanc et sur leurs derrières, inquiétèrent et ralentirent leur impulsion ; puis, quand nous reprenions l'offensive, cette position les mettait entre deux feux, et assurait le succès de nos attaques [SÉGUR, Hist. de Nap. IX, 2]
Fig. Entre deux feux, se dit d'une personne pressée de deux côtés par des créanciers également menaçants, par des ordres contraires, etc. Aller au feu, aller à un combat où l'on se sert d'armes à feu. Voir le feu, assister à un combat. Ces troupes n'avaient pas encore vu le feu. Familièrement. Aller au feu comme à la noce, marcher allégrement au combat. Accoutumer un cheval au feu, l'accoutumer à entendre tirer des coups de fusil, de canon, sans en être effrayé. Elliptiquement, feu ! se dit pour commander à une troupe de tirer. Faire long feu, se dit au propre d'une arme dont le coup est lent à partir. Fig. Faire long feu, se dit d'une affaire qui traîne en longueur. Faire faux feu, se dit en parlant d'une arme à feu, lorsque l'amorce prend feu sans que le coup parte. Lance à feu, sorte de fusée emmanchée qui sert à mettre le feu à une pièce d'artillerie ou d'artifice. Mettre le feu à un canon, allumer l'amorce qui enflamme la charge. Mettre le feu aux poudres, faire sauter un magasin de poudre ; et fig. provoquer l'explosion de révoltes, de séditions, de révolutions, d'entreprises violentes. On dit dans un sens analogue : le feu prend aux poudres. Les armes à feu, les fusils, les pistolets, les canons, les mortiers. Bouche à feu, une pièce d'artillerie. Coup de feu, détonation, décharge d'un fusil. On entendait des coups de feu dans le bois. Blessure faite par une arme à feu. Il avait un coup de feu à la jambe. Pot à feu, voy. POT. Feu grégeois, voy. GRÉGEOIS.
19° Terme de fortification. Le flanc du bastion d'où l'on tire sur l'ennemi.
20° Feu d'artifice, jeux et effets de lumière produits par la préparation de matières inflammables d'après les règles de la pyrotechnie. Tirer un feu d'artifice.
C'est au mélange de la limaille de fer avec du zinc que sont dus les beaux effets de nos feux d'artifice [BUFF., Min. t. v, p. 410, dans POUGENS]
Fig. Suite de traits brillants dans la conversation. Feu chinois, sorte d'imitation des feux d'artifice, au moyen de transparents, qui sert de jouet aux enfants.
21° Le feu qu'on entretient ordinairement dans une cheminée, dans un poêle. Il y a presque toujours six feux dans cette maison.
Il ne faut que deux feux [MAINTENON, Lett. à d'Aubigné, t. I, p. 174, dans POUGENS]
22° Cheminée, chambre à feu.
Que l'artisan ne puisse transmettre à ses enfants la cabane qu'il a bâtie et où ils sont nés, le champ qu'il a acquis et payé du produit de son travail, le lit même où ses enfants recueilleront ses derniers soupirs, s'ils n'ont pas vécu avec lui sous le même toit, au même feu et à la même table [VOLT., Mél. littér. autre lettre d'un bénédictin.]
Le coin du feu, un des coins de la cheminée, voy. COIN. Les plaisirs du coin du feu.
Vous autres héros seriez bien fâchés qu'on vous laissât vivre tranquillement ; vous croyez être demeurés au coin du feu, à moins que vous ne vous alliez brûler sur le mont Oeta, de même que fit Hercule [LA FONT., Lett. XXIV]
J'étais au coin du feu de Mme de la Fayette [SÉV., 18]
Au coin de mon feu vint s'asseoir Un étranger vêtu de noir, Qui me ressemblait comme un frère [A. DE MUSSET, Poésies nouv. Nuit de décembre]
Fig. Il n'a jamais quitté le coin de son feu, il n'a jamais voyagé. Place au feu et à la chandelle, accès auprès de la cheminée et auprès de la table où la chandelle est allumée ; ancienne formule des gîtes d'étape.
23° Garniture de feu, ou, simplement, feu, l'ensemble de ce qui garnit une cheminée (chenets, pelle et pincettes). Acheter un beau feu.
Il me faut un feu doré ; que la grille en soit très grosse ; j'aime le grand feu préférablement à toute autre délicatesse [MAINTENON, Lett. à d'Aubigné, 10 fév. 1681]
24° Un ménage, une famille, dans un village ou dans un bourg. Il y a cent feux dans ce village.
L'auteur réduit chaque feu à trois personnes ; mais, par le calcul que j'ai fait dans toutes les terres où j'ai été et dans celle que j'habite, je compte quatre personnes et demie par feu [VOLT., Dict. phil. Population.]
Suivant le dénombrement des feux exactement fait en 1751 [ID., ib. Lois (Esprit des).]
La répartition des impôts est d'autant plus facile dans cette province [la Provence], qu'elle a été divisée en différents feux, mesure conventionnelle qui exprime une valeur quelconque.... cette opération se borne à dire ; si l'on divise la province en tant de feux, combien telle ville doit-elle avoir de feux, par rapport à telle autre ? et ensuite, si la province doit payer telle somme, combien doit-on payer par feu ? [MIRABEAU, Collection, t. II, p. 378]
Terme d'administration. À feux croissants, se dit de la quantité croissante de bois que des usagers prennent dans une forêt.
Le droit d'usage en bois prélève directement une part importante des produits forestiers, et, lorsqu'il est constitué à feux croissants, c'est-à-dire susceptible de s'accroître avec la population usagère, il finit souvent par absorber la totalité de ces produits [DE FORCADE, Rapport au min. des fin. 20 fév. 1860, in-4°, p. 23]
N'avoir ni feu ni lieu, n'avoir point de logis assuré, mener une vie vagabonde.
Mais moi, grâce au destin, qui n'ai ni feu ni lieu, Je me loge où je puis et comme il plaît à Dieu [BOILEAU, Sat. VI]
Puisqu'ici la vertu n'a plus ni feu ni lieu [ID., Sat. I]
M. de Valentinois n'avait ni feu ni lieu que chez son beau-père [SAINT-SIMON, 33, 129]
Par extension.
Mme de Vins a été à Saint-Germain ; bon Dieu quelle différence ! on lui a fait assez de compliments, mais c'était son pays, et elle n'y a plus ni feu ni lieu [SÉV., 7 fév. 1680]
Fig.
En elles la santé n'avait ni feu ni lieu [RÉGNIER, Sat. XI]
25° Il se dit de la simple lueur des torches, des flambeaux, des fanaux. Il est défendu de chasser au feu, de pêcher au feu.
26° Terme de palais. Bougies dont on se sert aux audiences des criées pour déterminer la durée du temps pendant lequel on peut enchérir. Aucune adjudication ne doit être faite qu'après l'extinction de trois feux.
27° Terme de théâtre. Ce qu'un acteur reçoit en sus de ses appointements fixes, chaque fois qu'il joue ; usage dont l'origine est ainsi rapportée par CASTIL-BLAZE, Hist. de l'Acad. de musique : Les chanteurs et symphonistes de la musique du roi recevaient, en sus de leurs appointements, du pain, du vin et de la viande à six bonnes fêtes de l'année ; ces aliments furent appréciés en argent en 1 700, et chaque musicien reçut ainsi un supplément ; à la fin du XVIIIe s. ce supplément fut appliqué aux bougies, que les premiers sujets voulaient avoir au lieu de chandelles dans leurs cabinets, et dès lors la somme allouée prit le nom de feux.
Ce rôle [du chien de Montargis, dans le mélodrame de ce nom] fut créé dans l'origine par un caniche nommé Vendredi, appartenant à l'un des administrateurs du théâtre de la Gaîté ; parmi ses successeurs, on cite avec éloge Catulle, qui avait été dressé par un artiste du même théâtre et qui recevait cinq francs de feux par représentation, [, Biblioth. des chartes, 5e série, t. V, p. 524]
28° Torche, instrument de destruction. Les soldats marchaient le fer et le feu dans les mains. Mettre à feu et à sang, exercer toutes les destructions, toutes les cruautés de la guerre.
Il l'empêche d'y mettre tout à feu et à sang [BOSSUET, Hist. I, 11]
Henri IV prit enfin le seul parti qui convenait à sa situation et à son caractère : il fallait se résoudre ou à passer sa vie à mettre la France à feu et à sang et hasarder sa couronne, ou ramener les esprits en changeant de religion [VOLT., Hist. parl. ch 34]
Fig. et familièrement. Rompre à feu et à sang, se brouiller à feu et à sang, se dit de personnes entre qui éclate une très vive inimitié.
Il m'a dit que l'archevêque de Reims rompait à feu et à sang avec le coadjuteur s'il ne venait avec vous [SÉV., 19 janv. 1674]
Marmontel et l'abbé Arnaud sont brouillés à feu et à sang [LAHARPE, Correspond. t. II, p. 74, dans POUGENS]
29° Fanal allumé sur une plage. On entretient des feux sur toutes les côtes. Le feu du Havre. Feu fixe, fanal qui est immobile. Feu tournant, fanal qui tourne mû par des rouages. Feu à éclipse, fanal qui cesse à des intervalles réglés de luire, ce qui le fait reconnaître des navigateurs. Feu à éclats, feu dont l'intensité varie par des interpositions de verres. Terme de marine. Se dit des fanaux allumés la nuit sur un bâtiment pour faire connaître la position qu'il occupe. Porter le feu, se dit du vaisseau amiral qui guide la flotte. Feu de conserve, artifice nommé aussi moine, qui brûle lentement. Faux feux, signaux qui se font avec des amorces de poudre.
30° Météore enflammé. Le ciel brille d'éclairs et de feux. Le ciel est tout en feu, il est sillonné à chaque instant par les éclairs. Le feu du ciel, la foudre.
Le feu du ciel est tombé sur vos moutons et sur ceux qui les gardaient, et il a tout réduit en cendres [SACI, Bible, Job, I, 16]
Feu Saint-Elme, voy. ELME (SAINT-) Feu follet, voy. FOLLET.
31° Feu grisou, voy. GRISOU.
32° Il se dit de la lumière des astres, du soleil.
L'Orient était tout en feu [FÉN., Tél. VI]
Les feux du firmament, les feux de la nuit, les astres. Les feux du jour, de l'aurore, l'éclat du jour.
Vous flattez nos tyrans ; aux premiers feux du jour Un jeune ambitieux vous voit grossir sa cour [C. DELAV., Vêpres sicil. I, 2]
Dieu du jour ! Dieu des nuits ! Dieu de toutes les heures ! Laisse-moi m'envoler sur les feux du soleil ! [LAMART., Harm. I, 2]
33° La chaleur du soleil. Les feux d'un soleil brûlant. Les feux de l'été, les chaleurs excessives de l'été.
Rien ne peut arrêter sa vigilante audace [de Louis XIV] ; L'été n'a point de feux, l'hiver n'a point de glace [BOILEAU, Lutr. II]
On dit de même les feux de la canicule.
34° Éclat que lance un diamant frappé par la lumière.
Il [le diamant] est fort beau, sans doute, et jette quantité de feux [MOL., l'Av. III, 12]
L'or et les diamants brillent sur ses habits ; Son turban disparaît sous les feux des rubis [VOLT., Scythes, I, 1]
Ces feux sont les couleurs de la lumière décomposée (rouge, orangé, jaune, vert, bleu, indigo, violet) qui viennent frapper l'œil. Fig. Le feu des regards, des regards animés.
C'était des yeux pleins de feu, des regards agaçants [HAMILT., Gramm. 6]
Personne n'osait approcher, tant la hardiesse de l'entreprise et le feu qui sortait de ses yeux avaient jeté d'épouvante parmi les ennemis [ROLLIN, Hist. anc. Œuvres, t. VI, p. 532, dans POUGENS]
Il rassemble avec eux ces bataillons épars, Qu'il anime, en marchant, du feu de ses regards [VOLT., Henr. VIII]
Le feu lui sort par les yeux, ses yeux étincellent de colère.
Le feu sort à travers ses humides prunelles [BOILEAU, Épître IV]
35° Couleur de feu, couleur qui ressemble à celle du feu. Un ruban couleur de feu.
Le chevalier était tout couvert de couleur de feu et fort brillant [MAINTENON, Lett. à Mme de Villarceaux, 27 août 1660]
Près d'entrer dans ces maisons [de Moscou], toutes closes et inhabitées, ils avaient entendu en sortir une faible explosion ; elle avait été suivie d'une légère fumée qui aussitôt était devenue épaisse et noire, puis rougeâtre, enfin couleur de feu, et bientôt l'édifice entier s'était abîmé dans un gouffre de flammes [SÉGUR, Hist. de Nap. VIII, 6]
Tache de feu, ou, simplement, feu, tache rousse qui se voit sur la tête ou le corps de certains chevaux, chiens ou autres animaux. Ce cheval a du feu au flanc. Marque de feu, tache d'alezan vif tranchant sur le fond de la robe.
36° Vive chaleur qui, par un effet vital, se fait sentir dans le corps ou dans une partie du corps. Le feu de la fièvre. Être tout en feu. Le piment met la bouche en feu.
Je savourais la proposition, cette fortune subite mettait mes esprits en mouvement ; le cœur m'en battait, le feu m'en montait au visage [MARIV., Pays. parv. 1re part.]
Visage en feu, visage rougi par l'effet de la colère, du vin, etc. Le feu du rasoir, sensation brûlante qu'on éprouve à la face quand on vient de se faire la barbe.
37° Nom vulgaire de diverses éruptions. Feu volage, rougeur passagère à la face ou au cou, qu'on aperçoit quelquefois chez les femmes hystériques ou mal réglées, et chez les enfants. Feu volant, synonyme d'échauboulure. Feu sacré, un des noms de l'érysipèle. Feu persique, nom donné jadis au zona. Feu de dents, éruption déterminée chez les enfants par la dentition. Feu Saint-Antoine, maladie (probablement un érysipèle gangréneux) qui a fait de grands ravages en France vers le XIe siècle. Terme de vétérinaire. Feu d'herbes, espèce d'éruption qui se manifeste particulièrement chez les vaches. Feu, synonyme de rafle 2. Feu sacré, voy. BOUQUET. Terme rural. Maladie que contractent les plantes pendant les sécheresse.
38° Il se dit des passions, des sentiments, des mouvements de l'âme comparés à un feu qui brûle. Le premier feu de la colère, Le feu du courage. Cela diminua le feu de son zèle.
Une épouse fringante et jeune et dans son feu [LA FONT., Coupe.]
Comme elles [l'ambition et l'amour] demandent beaucoup de feu [PASC., Amour.]
Ces passions ne sont plus que l'esprit même, et ainsi elles remplissent toute sa capacité ; je ne parle que des passions de feu [ID., ib.]
Enfin les feux de la jeunesse ont passé ; je suis vieux, et je me trouve à cet égard [à l'égard des femmes] dans un état tranquille [MONTESQ., Lett. pers. 9]
Ce cœur triste et flétri, que les ans ont glacé, Ne peut sentir les feux d'un désir insensé [VOLT., Fanat. I, 1]
Le feu de son jeune âge et de ses passions [ID., Brutus, III, 2]
Le comte d'Alberg joignait le feu d'un jeune homme à l'expérience de soixante campagnes [ID., Charles XII, 2]
Désir de fille est un feu qui dévore, Désir de nonne est cent fois pis encore [GRESSET, Vert-vert, ch. II]
Quand on se plaignait à lui de mes emportements, il se con tentait de répondre : ce feu de jeunesse passera [GENLIS, Veillées du chât. t. I, p. 279, dans POUGENS]
Prétextat l'a soustraite à mes sévérités ; Ses discours pleins de feu.... [LEMERC., Frédég. et Brun. II, 5]
À cette nouvelle, Napoléon retrouve le feu de ses premières années : mille ordres d'ensemble et de détail, tous différents, tous d'accord, tous nécessaires, jaillissent à la fois de son génie impétueux [SÉGUR, Hist. de Nap. VIII, 11]
Mais quand ce feu céleste [l'amour de la gloire] éblouirait ton âme.... [LAMART., Harm. II, 12]
Jeter tout son feu, faire ou dire tout ce que la colère ou l'indignation inspire, et s'apaiser soudain. Jeter son feu signifie aussi faire d'abord preuve de talent, de génie, et puis rester au-dessous des espérances conçues. On dit dans un sens analogue : Cet acteur a jeté tout son feu dans le premier acte ; cet écrivain a jeté tout son feu dans les premiers chapitres de son ouvrage. On dit aussi jeter son feu, en parlant d'un jeune homme qui commence à s'émanciper. Laissez-lui jeter son feu, il se calmera bien vite. Un tempérament de feu, personne très portée aux plaisirs de l'amour.
La délicatesse de sentiment ne s'allie guère à un tempérament de feu [DUCLOS, Mém. Œuvres, t. X, p. 44, dans POUGENS]
De feu, en feu, passionné, ardent, très animé.
Mais, quoi que m'ordonnât cette âme toute en feu, Je promettais beaucoup et j'exécutais peu [CORN., Rodog. I, 6]
L'âme toute en feu, les yeux étincelants [ID., Théodore, IV, 4]
En cet âge de feu Où le corps à l'esprit s'assujettit si peu [ROTROU, Vencesl. IV, 1]
Quand je suis tout de feu, d'où vous vient cette glace ? [RAC., Phèd. v, 1]
Ne redevenait-il pas tout de feu pour lui ? [MASS., Prof. rel. 4]
Être de feu, tout de feu, tout feu pour quelque chose, être passionné, engoué pour cette chose.
L'homme est de glace aux vérités ; Il est de feu pour les mensonges [LA FONT., Fabl. IX, 6]
39° Vivacité d'esprit, d'imagination, de style, comparée à l'éclat du feu.
Aussitôt malgré moi tout mon feu se rallume [BOILEAU, Sat. II]
La vie est courte, il n'y a pas un moment à perdre à l'âge où je suis ; la vie des talents est encore plus courte ; travaillons, tandis que nous avons encore du feu dans les veines [VOLT., Lett. d'Argental, 20 janv. 1762]
Quand mes yeux éclairés du feu de son génie [ID., Fanat. I, 4]
Ma vivacité leur plut, et, m'apercevant que je les amusais par le feu de mes idées, je m'y livrai encore plus [DUCLOS, Confess. Comte de ***, Œuvres, t. VIII, p. 6, dans POUGENS.]
On dit dans un sens analogue : un esprit tout de feu ; une âme de feu.
Il y a quelque différence entre un esprit de feu et un esprit brillant : un esprit de feu va plus loin et avec plus de rapidité ; un esprit brillant a de la vivacité, de l'agrément et de la justesse [LA ROCHEF., Réfl. div. 156, 13]
Avoir du feu, se dit d'un cheval qui a de la vivacité ; dans ce sens on dit cheval de feu. Il se dit pour inspiration. Il ne sait pas régler son feu. Être plein d'un beau feu.
On a dit que les poëtes étaient animés d'un feu divin, quand ils étaient sublimes ; on n'a point de génie sans feu, mais on peut avoir du feu sans génie [VOLT., Dict. phil. Feu.]
Voilà d'où naquit ma subite éloquence ; voilà d'où se répandit dans mes premiers livres ce feu vraiment céleste qui m'embrasa, et dont pendant quarante ans il ne s'était pas échappé la moindre étincelle [J. J. ROUSS., Confess. IX]
Le feu de la composition, l'espèce d'entraînement, d'application ardente, avec laquelle on travaille à la composition d'un livre, d'un discours, d'un tableau, d'une œuvre musicale, etc. On dit dans un sens analogue : dans le feu de l'action.
40° Vivacité d'action, de mouvement, de geste. Cet orateur a du feu.
Il faut du feu, de l'activité [pour la vérité des passions] [PASC., Amour.]
Tant que l'on a du feu, on est aimable ; mais ce feu s'éteint, il se perd [ID., ib.]
41° Il se dit des liqueurs spiritueuses dans lesquelles l'alcool laisse sentir son montant. Cette eau-de-vie a beaucoup de feu. On demande des vins qui aient du feu.
42° Poétiquement, feu, la passion de l'amour.
Ton frère, je l'avoue, a beaucoup de mérite ; Mais souffre qu'envers lui cet éloge m'acquitte, Et ne m'entretiens plus des feux qu'il a pour moi [CORN., la Place roy. I, 1]
Souviens-toi du beau feu dont nous sommes épris [ID., Cinna, I, 3]
Et si Rome savait de quels feux vous brûlez [ID., Nicom. I, 2]
À quelque point qu'on aime, Quand le feu diminue, il s'éteint de lui-même [ID., Suréna, IV, 2]
Non pas que cet amour prétende encore à vous : Tout son feu se résout en ardeur de courroux [MOL., le Dép. V, 8]
Allumer les feux sacrés d'un chaste mariage [FLÉCH., Dauph.]
De mes feux mal éteints je reconnus la trace [RAC., Andr. I, 1]
Pour la veuve d'Hector ses feux ont éclaté [ID., ib.]
L'autre avec des regards éloquents, pleins d'amour, L'a de ses feux, madame, assurée à son tour [ID., Baj. III, 2]
Et je ne savais pas que, pour moi plein de feux, Xipharès des mortels fût le plus amoureux [ID., Mithr. II, 1]
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables [ID., Phèdre, I, 3]
Vous nourrissez un feu qu'il vous faudrait éteindre [ID., ib. III, 1]
Et du feu criminel qu'il a pris dans ses yeux [ID., ib. IV, 1]
Prendre feu, devenir amoureux.
Comme elle prend feu d'abord ! [MOL., M. de Pourc. II, 6]
Son cœur prend feu dès ce moment [ID., Fourb. I, 2]
Qu'on lui dise un mot tendre, elle est soudain éprise, Croit tout, prend feu sur tout, et c'est là son destin [TH. CORN., Baron d'Albikrak, I, 3]
Mettre en feu pour quelqu'un, inspirer un ardent amour pour lui.
Si le ciel pour mon choix vous donne tant de haine, Vous a-t-il mise en feu pour ce grand capitaine ? [CORN., l'Illus. com. III, 1]
43° Révolution, agitation, mouvements populaires, guerres.
Toute l'Europe est en feu [SÉV., 540]
Il ne s'agissait de rien moins que d'allumer le feu de la guerre civile [BOSSUET, Var. 10]
Vous avez trouvé tout votre royaume soumis, et vous l'avez laissé tout en feu par une cruelle guerre civile [FÉNEL., Dial. des morts mod. Henri III, la duchesse de Montpensier.]
Lorsque tout est en feu par la guerre [ID., Tél. v.]
Le feu qui dévorait les colonies françaises et qui s'étendait tous les jours, pouvait aisément gagner les siennes [RAYNAL, Hist. phil. X, 16]
Il se dit aussi des disputes.
Dans le feu des disputes entre les patriciens et les plébéiens [MONTESQ., Esp. XI, 15]
Mettre en feu, exciter guerres, troubles, querelles.
Les disputes d'Arminius mettaient en feu toutes les Provinces-Unies [BOSSUET, Var. XIII, § 1]
L'amour avait mis tout en feu dans l'île [FÉN., Tél. VII]
Mettre en feu, s'est dit, en un cas particulier : représenter, exposer que tout est en feu.
Sa muse en arrivant ne met pas tout en feu [BOILEAU, Art p. III]
44° Feu ardent, un des noms vulgaires de la bryone.

PROVERBES

  • Il n'est feu que de bois vert, il n'y a pas d'activité plus grande que celle de la jeunesse.
  • Il n'est feu que de grand bois, c'est avec les choses les plus solides, avec les hommes les plus habiles ou les plus puissants qu'on réussit le mieux.
  • Le bois tortu fait le feu droit, c'est-à-dire peu importent certains défauts d'une chose pourvu que le résultat soit atteint.
  • Il n'y a dans cette maison ni pot au feu ni écuelles lavées, se dit d'une maison qu'on trouve en désordre.

HISTORIQUE

  • Xe s.
    Enz en l'fou la getterent, com arde tost [afin qu'elle soit brûlée vite] [, Eulalie]
  • XIe s.
    Et fous et flambes i est apareillez [, Ch. de Rol. CLXXXI]
    Des haumes clairs li fuus en escarbone [les étincelles jaillissent] [, ib. CCLXI]
    Contre le ciel vole li fouz [les étincelles] tous clairs [, ib. CCLXXXVI]
  • XIIe s.
    De verz albes espines à faire un feu ardent [, Ronc. p. 199]
    Il i ont mis du feu tout rasé [ras] un tonel [, Sax. IX]
    Li fous Deu chaït del ciel, si degastast les berbiz et les enfanz [, Job, p. 500]
  • XIIIe s.
    Largesse semble à feu de paille ; Quant il est ars, jà rien ne vaut [LE COMTE DE BRETAGNE, Romancero, p. 161]
    Et ce fu li tiers feus qui fu en Constantinoble, puis que li pelerin i vindrent [VILLEH., CVI]
    Quant Berte sent le feu, à Dieu graces en rent [, Berte, XLVII]
    Et Symons fait le feu, n'ot pas le cuer vilain [, ib. XLIX]
    Cel jour s'est bien chaufée Berte delez le fu [, ib. LI]
    Que nul ne puisse prendre aprentiz, se il ne tient chief d'ostel, c'est à savoir feu et leu [, Liv. des mét. 69]
    Garde que tu ne paroles à home discordant [ami de la discorde], que tu ne boutes busche en son feu [BRUN. LATINI, Trésor, p. 361]
    Ne vos afiez en celz que vos avez guerroiez, que il ont toz jors en lor piz le feu de la haine [ID., ib. p. 360]
    Plus a de busche en feu, plus art [plus il y a de bûches au feu, plus il brûle] [LEROUX DE LINCY, Prov. t. II, p. 379]
  • XIVe s.
    Mettez sur le feu et faites à petit feu chauffer [, Ménagier, II, 5]
    Et le poursuivroient à feu et à sang, et toute sa lignée bouteroient dehors [, ib. I, 4]
  • XVe s.
    Adonc fit-il [Philippe d'Artevelle] une taille en Flandre, que chascun feu toutes les semaines paieroit quatre gros [FROISS., II, II, 161]
    Au feu ! au feu ! courez tous mes amis [CH. D'ORL., Bal. 27]
    Ardant desir de veoir ma maistresse A assailly de nouvel le logis De mon las cueur, qui languist en tristesse, Et puis dedens partout a le feu mis [ID., ib. 27]
    Parler boute feu en maisons, Et destruit paix, ce riche avoir ; On aprent à faire et à voir Selon les temps et les saisons [ID., Rondeau, 35]
    Fay, Belias, fay bon feu de là, Et j'en feray aussy de çà [, la Nat. de N. S. J. C.]
    Il se tient plus coi qu'un feu couvert [LOUIS XI, Nouv. XXIX.]
  • XVIe s.
    La maniere de composer un feu fort et aspre, qui bruslera tout ce qu'il attaindra [, Liv. de canonerie, dans REINAUD et FAVÉ, Du feu grégeois, p. 134]
    Les povres sots jurent qu'ils mettroient leur doigt au feu sans brusler, pour soutenir qu'elles sont femmes de bien [MARG., Nouv. XX]
    Tout le monde y accouroit comme au feu [DESPER., Contes, XXX]
    ....Avec une colere telle qu'ont voulentiers ces gens de feu [il s'agit d'un maréchal] [ID., ib. LXII]
    Comme un canon qui fait faux feu [YVER, p. 540]
    Ce feu ardent [fou, emporté] de Chavigny a.... [CARLOIX, VI, 48]
    D'Aubigné, prenant feu à ces paroles, ne put s'empescher.... [D'AUB., Vie, CXXVIII]
    Brissac avec 1200 arquebusiers fit si beau feu qu'il mit tout dehors [D'AUB., Hist. I, 279]
    Cela failli, nostre chef gascon, ayant le feu à la teste, attrempa la joie des refformez par la prise du Mont de Marsan [ID., ib. I, 296]
    ....Qu'ils sauroient l'heure par le tocsain de la grosse cloche du pallais et qu'ils missent du feu [lumières] aux fenestres [ID., ib. 216]
    Le roi s'est jetté dans le lict tout en feu, et nous a dit : Voiez-vous ce traistre ? [ID., ib. II, 189]
    Quelques navires à feu [brûlots] [ID., ib. 482]
    Quand au feu du foudre, il est plus chaud que nul autre feu, parquoy à bon droit il est appellé le feu des feux [PARÉ, XXIII, 10]
    Ils souffrirent d'estre bruslez vifs en un feu avant desadvouer leurs opinions [MONT., I, 299]
    C'est un vray feu d'estoupe [peu durable] [ID., III, 372]
    Mettre un païs à feu et à sang [ID., IV, 167]
    C'est demy vie que de feu [GÉNIN, Récréat. t. II, p. 236]
    Un fou jamais ne laisse un feu en paix [ID., ib. 252]
    Les reitres ne sont point si [ne sont jamais si] dangereux que quand on est meslé avecques eux ; car c'est tout feu [LANOUE, 313]
    Feu bien couvert, comme dit ma bru, Par sa cendre est entretenu [LEROUX DE LINCY, Prov. t. I, p. 69]
    Le feu ayde le queu [cuisinier] [ID., ib. p. 71]
    Un feu de marionnette, trois tisons et une buschette [un petit feu] [ID., ib.]

ÉTYMOLOGIE

  • Bourguign. fô ; picard, fu ; provenç. foc, fuoc, fuec ; catal. fog ; espagn. fuego ; portug. fogo ; ital. fuoco ; du latin focus, foyer. Feu n'a donc point de rapport avec l'allemand Feuer, qui tient au grec.
Émile Littré's Dictionnaire de la langue française © 1872-1877

feu

FEU. n. m. Dégagement de lumière et de chaleur produit par la combustion. Les anciens regardaient le feu comme un des quatre éléments. Le culte du feu. Les adorateurs du feu. La nature, les propriétés du feu. L'action du feu sur un corps. Le feu volatilise l'eau. Faire jaillir du feu d'un caillou. Un globe de feu. Une pluie de feu. Le feu des volcans. Un feu souterrain.

Feu central, Le foyer de chaleur qu'on suppose exister au centre du globe terrestre.

Fig., C'est le feu et l'eau se dit de Deux choses tout à fait contraires, de deux personnes qui sont de natures, de caractères entièrement opposés.

Faire feu se dit d'un Corps qui en choquant contre un autre produit du feu, des étincelles. Les pieds des chevaux font souvent feu sur le pavé.

Fig. et fam., Faire feu des quatre pieds, Employer tous ses efforts pour réussir en quelque affaire.

Fig., Le feu lui sort des yeux, Ses yeux sont étincelants de colère.

Fig. et fam., N'y voir que du feu, Être tellement ébloui, qu'on n'y voit rien. Par extension, il signifie Ne rien comprendre à quelque chose, ne pas s'apercevoir d'une supercherie, d'un vol, etc.

Il signifie encore Combustion du bois ou autres matières. Feu clair, vif, ardent. Feu à rôtir un boeuf. Feu de charbon, de bois, de tourbe, de paille. Les feux d'un bivouac. Une étincelle de feu. Le feu sacré qui brûlait dans le temple de Vesta. Faire du feu, un bon feu, un grand feu. Le feu commence à prendre, à s'allumer. Le feu ne peut pas brûler. Allumer, souffler, attiser, entretenir, éteindre, couvrir le feu. Faire cuire quelque chose à petit feu. S'approcher du feu pour se chauffer. Tourner le dos au feu. Mettre le pot au feu. Ces allumettes ne prennent pas feu facilement.

Demander du feu ou Donner du feu se dit du Service que se rendent les fumeurs pour allumer leurs pipes, cigares ou cigarettes.

En termes de Marine, Pousser les feux, Activer la combustion pour augmenter la pression dans la chaudière.

Il se dit particulièrement du Feu considéré comme agent de destruction. Le feu est à tel endroit. On a mis le feu à cette maison. Le feu avait couvé pendant plusieurs jours. Le feu a pris à cette poutre. Le feu a gagné le plancher, a gagné le toit. La ville était toute en feu. Crier au feu et elliptiquement Au feu! Courir au feu. Arrêter les progrès du feu. Se rendre maître du feu. Le feu a tout dévoré. Les ravages du feu. Feu de cheminée. Toute la forêt fut bientôt en feu. Le feu se mit à sa robe, dans ses cheveux.

Mettre le feu à une mine, Faire exploser une mine.

Faire la part du feu se dit, dans un incendie, quand on laisse brûler ce qu'on désespère de sauver, afin de mieux protéger les parties qui peuvent être préservées. Il s'emploie aussi figurément. Dans certaines circonstances il faut faire la part du feu, Il faut sacrifier quelque chose pour ne pas tout perdre.

On y court comme au feu, se dit des Spectacles, et, en général, de tout ce qui attire un grand concours de monde.

Mettre un pays à feu et à sang, Exercer, dans ce pays, toutes les cruautés, toutes les atrocités de la guerre.

Fig. et fam., Il se jetterait dans le feu pour lui, Il ferait tout pour lui prouver son affection, son dévouement.

Fig. et fam., Mettre le feu aux poudres, Déterminer une explosion de sentiments violents; faire éclater une haine, une discorde, une sédition qui couvaient; provoquer une discussion.

Fig., Prendre feu, S'émouvoir, s'enflammer, s'irriter; dans une discussion, ne souffrir aucune contradiction, aucune contrariété. Vous prenez feu bien aisément. C'est un homme qui prend feu tout de suite, qui prend feu sur les moindres choses. Il se dit aussi de Quelqu'un que l'amour enflamme subitement.

Fig., Jeter feu et flamme, Se livrer à de grands emportements de colère, annoncer l'intention de tout bouleverser. En apprenant cette nouvelle, il jeta feu et flamme. À son entrée en fonction il avait jeté feu et flamme : ce beau zèle se refroidit très vite. Jeter son feu, jeter tout son feu, Faire et dire tout ce qu'inspire la colère, après quoi l'on devient plus calme.

Armes à feu, Les fusils, les revolvers. Coup de feu, Détonation d'une arme à feu et blessure que fait son projectile.

Bouche à feu. Voyez BOUCHE.

Il se dit absolument des Coups que l'on tire avec des armes à feu, avec de l'artillerie. Faire feu sur quelqu'un. Il était sous le feu de l'ennemi. Soutenir le feu, essuyer le feu de la place, le feu du canon, de l'artillerie. Feu rasant. Feu croisé. Feu de file ou de deux rangs. Feu roulant. Feu bien nourri. En termes de Marine, Faire feu des deux bords. Feu de tribord. Feu de bâbord. Dans les commandements militaires, on dit elliptiquement Feu, pour ordonner aux soldats de tirer.

Aller au feu, Aller à un combat où l'on se sert d'armes à feu. Voir le feu, Assister, prendre part à un combat de ce genre. Ce soldat n'a pas encore vu le feu.

Fig., Recevoir le baptême du feu. Voyez BAPTÊME.

Éteindre le feu ou les feux de l'ennemi, Démonter ses canons, les empêcher de tirer en leur opposant une artillerie supérieure par le nombre ou par l'habileté.

Être entre deux feux, être pris entre deux feux, se dit d'un Corps de troupes enveloppé par l'ennemi et qui est exposé à son tir de deux côtés. Il signifie figurément Être exposé à deux embarras, à deux dangers également menaçants.

Faire long feu se dit d'un Fusil, d'un canon dont le coup est lent à partir et n'atteint pas son but. Il se dit figurément et familièrement d'une Affaire qui tra��ne en longueur, qui n'aboutit pas, d'une plaisanterie qui ne produit pas son effet, etc.

Fig. et fam., Un feu roulant de plaisanteries, de bons mots, Des plaisanteries, des mots d'esprit lancés coup sur coup.

Montrer une chose au feu, La présenter au feu pour la faire sécher, ou pour la faire chauffer légèrement.

En termes de Cuisine, Coup de feu, Action d'animer le feu, pour donner aux mets le dernier, le juste degré de cuisson. Le cuisinier est dans son coup de feu. Il signifie figurément Être au moment où l'on est le plus occupé.

Prendre l'air du feu, prendre un air de feu. Voyez AIR.

Le supplice du feu, ou, simplement et absolument, Le feu, Supplice qui consistait à brûler vif le condamné. Jeanne d'Arc fut condamnée au feu.

L'épreuve du feu, Épreuve judiciaire employée au moyen âge et qui consistait à faire manier à l'accusé un morceau de fer rougi au feu; si au bout d'un certain temps il restait sur sa main des traces de brûlure, il était déclaré coupable. L'épreuve du feu consistait aussi quelquefois à passer à travers un bûcher ardent.

En formule d'affirmation et par allusion aux anciennes épreuves judiciaires, J'en mettrais ma main, la main au feu, J'assure que la chose est ainsi, j'en répondrais à mes risques et périls. On dit, dans le sens contraire, Je n'en mettrais pas ma main au feu.

Le feu de l'enfer, Les tourments des damnés. Le feu du purgatoire, Les peines que souffrent les âmes qui sont dans le purgatoire.

Fig. et fam., Un feu d'enfer. Voyez ENFER.

Couleur de feu, Rouge vif et éclatant. Un ruban couleur de feu.

Fig., Taché de feu, ou, absolument, Feu, se dit de Certaines taches d'un roux plus ou moins ardent qui se trouvent sur la tête ou sur le corps des chevaux, des chiens et d'autres animaux. Cet animal est taché, marqué de feu.

Pot à feu. Voyez POT.

Feu grégeois. Voyez GRÉGEOIS.

Fig., Faire feu qui dure, Ménager son bien, ne pas faire trop de dépense. Cela se dit dans un sens analogue, en parlant de la Santé. Il faut faire feu qui dure.

Fig. et fam., C'est un feu de paille, ce n'est qu'un feu de paille, se dit d'un Sentiment qui commence avec ardeur, avec véhémence, et qui est de peu de durée. Cet amour si violent ne sera qu'un feu de paille.

Prov. et fig., Il n'y a point de fumée sans feu. Voyez FUMÉE.

Fig., Jouer avec le feu, S'exposer imprudemment à un péril.

Fig., Mettre les fers au feu, Les fers sont au feu. Voyez FER.

Fig., Faire mourir quelqu'un à petit feu, Le faire languir en prolongeant des peines d'esprit, des inquiétudes, des chagrins qu'on pourrait lui épargner ou lui abréger.

Fig., Jeter de l'huile sur le feu, Attiser la désunion, la discorde.

Fam., Il court comme s'il avait le feu au derrière, se dit de Celui qui court très vite par peur ou répulsion, ou pour éviter quelque chose de désagréable.

Fig., Avoir le feu sacré, Être plein de zèle, d'ardeur, de conviction. Ce professeur, cet élève a le feu sacré.

FEU s'est dit d'un Corps en ignition ou, en termes de Médecine, d'un Caustique que l'on appliquait sur quelque partie du corps de l'homme ou des animaux. On dit encore Pointes de feu. Mettre des pointes de feu.

En termes de Chirurgie, Bouton de feu, Instrument d'acier terminé en forme de bouton, qui sert à cautériser, après qu'on l'a fait rougir au feu. Feu potentiel se dit de Toute substance caustique qui agit lentement.

Chambre à feu, Chambre où il y a une cheminée. Plaque de feu ou de cheminée. Voyez PLAQUE.

Garniture de feu, Grille de métal en forme d'éventail avec la pelle, les pincettes, les chenets, etc.

Fig. et fam., Ne bouger du coin du feu, du coin de son feu. N'aimer que le coin de son feu. Il n'a jamais quitté le coin de son feu. Voyez COIN.

Il se prend encore pour le Feu qu'on entretient ordinairement dans une cheminée ou dans un poêle. Il a presque toujours dix feux dans sa maison. Je sors, n'oubliez pas d'entretenir les feux après mon départ.

Il signifie, par extension, Ménage, famille logée dans une maison. Il y a cent feux dans ce village. Cette bourgade est composée de tant de feux.

N'avoir ni feu ni lieu, Être vagabond, sans demeure assurée.

Il se prend aussi pour la Simple lueur des flambeaux, des torches, des fanaux, etc. Il est défendu de chasser au feu, de pêcher au feu. Il y avait des feux allumés sur la côte.

Feux de joie, Feux qu'on allume sur les montagnes et aussi dans les champs, dans les rues, dans les places publiques, en signe de réjouissance. Feu de la Saint-Jean, Feu de joie qu'on allume le jour de la Saint-Jean.

Feu d'artifice, Feu obtenu par les procédés de la pyrotechnie de façon à réaliser certains jeux et effets de lumière en vue de réjouissances publiques. Tirer un feu d'artifice.

Poétiq., Les feux du firmament, les feux de la nuit, Les astres. Les feux du jour, de l'aurore, L'éclat du jour, de l'aurore.

Il se dit particulièrement, en termes de Palais, des Bougies qui, aux audiences des criées, sont allumées pour déterminer la durée du temps pendant lequel on peut enchérir. Aucune adjudication ne peut être faite qu'après l'extinction de trois feux.

Il se dit encore figurément, en termes de Théâtre, de Ce qu'un acteur reçoit en sus de ses appointements fixes, chaque fois qu'il joue. Cet acteur a tant pour ses feux.

Il se dit en outre des Météores enflammés et des éclairs. On vit des feux brillants dans l'air. Le ciel était tout en feu pendant cet orage.

Feu Saint-Elme, se dit, dans le langage des marins, de Certains feux ou météores qui paraissent quelquefois en mer, dans les nuits obscures, lorsque le ciel est très orageux, et qui parcourent l'extrémité des mâts, des vergues, etc., sous la forme d'aigrettes lumineuses. Le feu Saint-Elme est dû à l'électricité.

Feu follet. Voyez FOLLET.

Feu grisou. Voyez GRISOU.

Il se dit figurément du Brillant, de l'éclat de certaines choses. Il a les yeux vifs et pleins de feu. Le feu de ses regards. Ce diamant jette beaucoup de feu. Le feu d'un rubis.

Il signifie aussi Inflammation, vive chaleur ou État de ce qui est extrêmement échauffé, animé. Le feu de la fièvre. Avoir la bouche tout en feu, le palais tout en feu. Il était si fort en colère, qu'il avait les yeux tout en feu, que le feu lui montait au visage. Avoir le feu au visage.

Feux de dents, Éruption provoquée par les dents chez les jeunes enfants.

Le feu du rasoir, Sensation brûlante que l'on éprouve à la face quand on vient de se raser.

Il se dit figurément pour Ardeur, violence, véhémence, en parlant des Sentiments, des passions, des grands mouvements de l'âme, etc. Le feu de la jeunesse. Le feu des passions. Le feu des désirs. Quand le premier feu, quand le feu de sa colère sera passé. Cela parut diminuer le feu de son zèle. Être plein d'un beau feu, Être plein de zèle.

Fig. et fam., Être tout feu, tout flamme, Se donner avec ardeur à une entreprise, à une opinion, à une personne.

Le feu de la composition se dit, en termes de Littérature et de Beaux-Arts, de l'Espèce d'entraînement, d'application ardente avec laquelle on se livre à la composition d'un ouvrage. Ces fautes peuvent échapper à l'écrivain, à l'artiste dans le feu de la composition, lorsqu'il est dans le feu de la composition. On dit dans un sens analogue Dans le feu de l'action.

Il se dit poétiquement, au figuré, en parlant de la Passion de l'amour. Le feu de l'amour. Les feux dont il brûle.

Il se dit aussi, figurément, de la Vivacité d'action, de mouvement, de geste, d'esprit, d'imagination, de style, etc. Cet orateur a du feu. Ce peintre, ce poète a beaucoup de feu dans l'imagination. Le feu de l'imagination. On dit dans un sens analogue C'est un esprit tout de feu. Une âme de feu.

Jeter son feu signifie Faire d'abord preuve de talent et ne pas réaliser ensuite les espérances qu'on avait données de soi. On dit dans un sens analogue Cet auteur a jeté son feu, tout son feu dans le premier acte de sa tragédie, dans le premier volume de son ouvrage. On dit aussi Ce cheval a beaucoup de feu.

Il se dit encore, figurément, en parlant de la Guerre, des séditions, des troubles civils, des mouvements populaires, etc. Cet événement allait mettre en feu toute l'Europe, allait mettre le feu à l'Europe. On fit courir de mauvais bruits qui mirent toute la ville en feu. Le feu qui couve.

feu

FEU, EUE. adj. Qui est mort depuis peu de temps. Il est invariable quand il précède l'article, un adjectif possessif ou un nom qui n'est pas déterminé. Feu la reine. Feu ma mère. Feu Madame Henriette. La feue reine. Ma feue mère. Les feus rois de Suède et de Danemark. Il ne se dit guère au pluriel.
Dictionnaire de L'Académie française 8th Edition © 1932-5

feu

Feu, m. Ignis, Aucuns le veulent escrire par oe diphthongue, foeu, comme venant de Focus, Il vient de phôs, mot Grec qui signifie lumiere, et en vulgaire Grec, Feu.

Prendre les oiseaux de riviere par nuict au feu, c'est à dire, avec une meche ardant faite de vieux drapeaux conficts en suif fondu et entortillez en façon d'une torche, de la grosseur du bras, et d'un pied de long.

Le feu qu'on a mis en quelque lieu, Ignis subiectus.

Feu couvert et qui ne luit point, Ignis sopitus.

Feu qui dure long temps, Lentus ignis.

Un grand feu bruslant une maison, ou autre chose, Incendium.

Feu volage, Petigo, Impetigo, Lichen lichenis.

Le feu sainct Antoine, Ignis sacer, Pusula.

Qui est malade du feu sainct Antoine, Pusulosus.

¶ Allumer le feu, Ignem facere.

Devenir en feu, Ignescere.

S'ils n'eussent assopi et esteinct ce feu, Nisi orientem illum ignem oppressissent.

Il faut faire grand feu et clair, Camino luculento vtendum.

Faire sortir du feu d'une pierre, Excudere, vel excutere scintillam, vel ignem e scilice.

Gaster par feu et destruire, Corrumpere igni.

A feu et à sang, c'est à tout raser sans qu'il en demeure aucune chose, et faire que ce que l'espée ne pourra desfaire, le feu le consume: ainsi dit-on mettre tout à feu et à sang, et publier la guerre à feu et à sang, En l'abbregé des chroniques de France. Charles Duc de Bourgoigne, voulant faire la guerre aux Liegeois, fit crier ban et arriere ban en ses païs, tenant cil qui faisoit le cri, une espée à une main, et une torche à l'autre, signifiant que tout seroit mis à feu et à sang, comme advint, car en la cité de Liege furent faictes les plus grandes cruautez et inhumanitez que jamais furent faictes en ville, dont chronique face mention.

Mettre le feu dedans quelque chose, Ignem subiicere.

Mettre le feu dedans ses ouvrages, Ignem operibus inferre.

Mettre le feu à quelque chose, Incendere, Offerre incendium, Instammare.

Mettre le feu au Capitole, Ignes Capitolio iniicere.

Se garder de mettre le feu au temple en bruslant la ville, Ignem ab aede abstinere.

Mettre le feu aux estoupes, Gliscentem inuidiam accendere. B.

Demander du feu, Ignem quaerere.

Qui est de feu, Igneus.

Toute chose propre à allumer le feu, comme petits esclats, drapeaux en un fusil et semblables, Fomes.

Bois sec à quoy se prend facilement le feu, Igniarium.

Il n'est jamais feu sans fumée, Flamma fumo est proxima.

Un homme qui n'a feu ne lieu, vagabond, Homo sine lare, sine sede, Errabundus.

Nous en avons fait les feuz de joye, Nos hilaria ob eam rem egimus, vel celebrauimus. B.

¶ Feu ardant, ou Coulevrée blanche, Bryonia, Vitis alba.

Feu, adject. Accompagné d'un substantif, signifie defunct, trespassé, comme, Le feu Roy, feu mon pere, Rex, paterve functus vita. Et vient de ce Latin, Defunctus, Par retranchement de la preposition De, et non de focus, comme aucuns estiment, pour autant (selon leur dire) qu'on brusloit anciennement les corps des trespassez. Aussi le pourroit bien extraire de cette tierce personne, Fuit. Qui est du temps passé de la maniere indicative au verbe Sum. Comme feu signifiant en ce sens, a esté, ou fut. c. a vescu et n'est plus.

Jean Nicot's Thresor de la langue française © 1606

feu


FEU, s. m. [Monosyllabe, dout. au sing. long au pluriel, feux.] 1°. L'un des quatre élémens, qui est chaud et sec. "Soufler, alumer, atiser, détiser, éteindre, entretenir, couvrir le feu. "Mettre le feu à une maison. "Le feu a pris à ce lambris. "La ville était toute en feu. "Crier, courir au feu. "Se tenir au coin du feu. "Mettre le pot au feu. = 2°. Cheminée où l'on fait du feu. "Chambre à feu. "Il y a dix feux dans cette maison. = 3°. Ménage, famille. "Ce village est composé de cent feux, il y a cent feux. = 4°. Flambeaux, torches, fanaux. "On avait allumé des feux sur toute la côte. "Il est défendu de chasser, de pêcher au feu. = 5°. Coups des armes à feu. "Être exposé au feu, ou être sous le feu des énemis. "Les Anglais faisaient grand feu. = 6°. Météores enflamés, la foudre, les éclairs. "L'air était tout en feu. "Le feu du Ciel. — Poétiquement, les feux du firmament, les feux de la nuit, les astres. = 7°. Brillant, éclat. "Le feu d'un rubis, d'une escarboucle. "Ce diamant a beaucoup de feu. "Il a les yeux pleins de feu.
   Les atributs de ton Dieu
   Sur les astres, dans la nûe,
   Sont écrits en traits de feu.     Le Franc.
= 8°. Inflamation, ardeur. "Le feu de la fièvre. "Avoir le visage tout en feu. "Le feu lui montoit au visage, etc. = 9°. Figurément, il se dit des passions: le feu de la colère, de la concupiscence. — Pyrrhus dit, dans Andromaque.
   Brûlé de plus de feux que je n'en allumai.
Le poète mêle le propre avec le figuré. Ce vers a été fort critiqué. C'est un concetti à l'italiène; et on l'apèlerait aujourd'hui un calembourg.
   Quoi! ton volage coeur se livrera toujours
   À~ des feux étrangers, à de folles amours?
       La Chaussée.
= 10°. Sédition, mouvement populaire. "Le feu de la discorde, de la révolte. "Toute la ville était en feu. = 11°. Vivacité de l'esprit. "Orateur plein de feu: esprit tout de feu. "Ce Peintre a un grand feu d'imagination.
   12°. FEU compôse, avec un grand nombre de mots, des expressions du style simple et familier. — Prendre feu: s'échaufer, parler avec vivacité. — Être entre deux feux, (n°. 5°.) ataqué des deux côtés. — N'avoir ni feu, ni lieu, (n°. 3°.) n'avoir point de retraite assurée; être fort paûvre. — Se jeter dans le feu, pour éviter la fumée: s'exposer à un grand danger, pour en éviter un moindre. — Se jeter au feu pour quelqu'un, l'aimer jusqu'à tout sacrifier pour lui.
   Au feu pour lui, Monsieur, nous nous jetterions tous...
   Pardon, on n'en dit pas peut-être autant de vous.
        Barthe, l'Homme personel.
En mettre la main au feu, assurer qu'une chôse est ou n'est pas. "J'en mettrais la main au feu. — Jeter de l'huile sur le feu, irriter des persones déjà aigries. — Mettre le feu sous le ventre à quelqu'un; l'encourager. — Jeter feu et flamme, être dans une grande colère. — Être tout de feu, plein d'ardeur, de zèle pour, etc. "La plupart des jeunes persones prennent les chôses vivement; et dans certains momens, elles sont toutes de feu pour la piété; mais dès que leur imagination cesse d'être frapée, ce feu s'éteint et elles retombent dans leur première langueur. L'Ab. Reyre, Éc. des jeunes Demoiselles. — La Fontaine retranche tout.
   L'homme est de glace aux vérités,
   Il est de feu pour les mensonges.
En prôse du moins, il faut dire, tout de feu. = On dit de deux persones, qui ont de l'antipathie l'une pour l'aûtre, ou dont les caractères sont fort oposés, qu'elles sont le feu et l'eau. "Mme de B... et elle forment le plus bel assortiment de feu et d'eau, que j'aie jamais vu. Sév.Faire grand'chere et beau feu, faire beaucoup de dépense. Voy. BRûLER, COIN, ÉTOUPE, FER, FUMÉE, MOURIR. = On apèle au propre un grand feu, feu à rôtir un boeuf, feu de reculée, feu de verrerie. — Au contraire, feu de pâille, est au figuré (st. famil.) une ardeur, un zèle bientôt refroidis.
   Mettre à feu et sang. (style historique) sacager, ravager. "Ils mirent tout à feu et à sang, dans la campagne. Vertot. — * d'Avrigni dit, écrire à feu et à sang. "Un homme (Jans.) qui avait écrit à feu et à sang contre nos Rois. — L'analogie trompe, et elle a trompé ici cet excellent écrivain. Cette expression est un vrai barbarisme. = * M. Desgrouais done cette qualification à faire faux feu: il veut qu'on dise rater. Cependant l'Acad. dit au mot Faux, que faux feu se dit d'une arme à feu, lorsque l'amorce prend et que l'arme ne tire pas.

feu


FEU, FEûE, adj. [l' eu est long au fém.] Suivant Ménage, il ne se dit que des persones mortes, que nous avons vûes, ou que nous avons pu voir; suivant l'Acad. de ceux, qui sont morts il n'y a pas long-temps; feu mon père; le feu Roi, la feûe Reine. — On ne dira pas feu Platon, feu Aristote, etc. excepté en vers burlesques, comme a fait Scarron. MEN.
   Rem. 1°. Ce mot n'a point de pluriel, et à en croire Bouhours, il n'a pas même de féminin; et l'on doit dire ma feu mere, et non pas, ma feûe mère. Mais il y a une distinction à faire. Quand feu est après l'article ou le pronom, on dit feu au feûe, suivant le genre; quand il marche devant, on dit toujours feu. "La feûe Reine, ma feûe mère; feu la Reine, feu ma mère. = 2°. Si nous avons conu ou pu conaître plusieurs de ces persones mortes, qui aient eu même dignité, ou même emploi, alors ces mots de feu, feûe ne s'entendent que de la persone, qui est morte la dernière. Le feu Pape, est aujourd'hui Clément XIV. Et du temps de Louis XIV, ceux qui avoient conu Anne et Thérèse d'Autriche, quand ils disaient la feûe Reine, entendaient parler de la femme et non pas de la mère de ce grand Roi.
   3°. * Le feu Bacha pour l'Ex-bacha, est une nouveauté assez burlesque. "Il a fait demander au feu Bacha, etc. Journ. de Gen. = Cela ne peut se dire que dans le style comique.
   Feu mon esclâve, enfin s'il me faut l'épouser.
   Pourroit bien en venir à me tyranniser.
       Barthe.

Jean-François Féraud's Dictionaire critique de la langue française © 1787-1788
Synonymes et Contraires

feu

adjectif feu
Littéraire. Qui est mort.

feu

nom masculin feu
1.  Destruction par les flammes.
2.  Vif éclat.
3.  Décharge d'une arme.
4.  Littéraire. Combat armé.
5.  Ardeur des sentiments.
Le Grand Dictionnaire des Synonymes et Contraires © Larousse 2004
Traductions

feu

Feuer, Ampel, Brand, Schlusslicht, verstorbenfire, light, traffic light, bonfire, firearm, flame, heat, lighthouse, lights, blaze, latevuur, brand, (het) vuren, brander, brandstapel, gevecht, licht, pistool, pitאור (ז), אש (ז), בעירה (נ), דליקה (נ), יקוד (ז), לבה (נ), להבה (נ), מנוח (ז), נור (ז), שלהבת (נ), שריפה (נ), אוֹר, אֵשׁ, דְּלִיקָה, יְקוֹד, לֶהָבָה, מָנוֹחַ, שַׁלְהֶבֶת, שְׂרֵפָהvuurfocoheňildπυρ, φωτιά, πυράfajrofuego, semáforoآتشtuli, palo, tulipaloआगtűzapieldurfuoco, incendio, fiamma, fu, fanale, fornello火, ファイヤー, 火事, 火災ild, bålogieńfogo, lumeогоньeld, brand, brasamotoateş, yangınآگ, 火灾, 红绿灯نارvatraไฟlửa ()
nom masculin pluriel feux
1. ce qui brûle faire du feu prendre feu un feu de cheminée
2. incendie un feu de forêt mettre le feu à qqch
qui brûle une maison en feu
3. chaleur utilisée pour la cuisson mettre une casserole sur le feu cuire qqch à feu doux
4. ce qui permet d'allumer le tabac As-tu du feu ?
5. signal lumineux sur un véhicule les feux de routede positionde croisementstop
6. signal qui permet de passer ou non Le feu est rouge.
7. tir une arme à feu
Kernerman English Multilingual Dictionary © 2006-2013 K Dictionaries Ltd.

feu

[feux] (pl) [fø]
nm
(l'un des éléments)fire
en feu → on fire
prendre feu → to catch fire
mettre le feu à → to set fire to, to set on fire
avez-vous du feu? → have you got a light?
(incendie)fire
au feu! → fire!
feu de forêt → forest fire
(dans un foyer, une cheminée) faire du feu → to make a fire
allumer un feu → to light a fire
Ils ont allumé un feu dans la cheminée → They lit a fire in the fireplace.
feu de bois → wood fire
feu de tourbe → peat fire
(= signal) → light
mon feu arrière droit → my right rear light
un feu rouge → a red light
le feu vert → the green light
[cuisinière] → ring
une cuisinière à trois feux → a stove with three rings
à feu doux → over a slow heat
à feu vif → over a brisk heat
mijoter à feu doux → simmer over a gentle heat
à petit feu (CUISINE) → over a gentle heat (fig)slowly
(= sensation de brûlure) → burning sensation
(MILITAIRE) (= tirs) → fire
un feu nourri → sustained fire
commander le feu → to give the order to fire
tué au feu → killed in action
faire feu → to fire
ouvrir le feu → to open fire
pris entre deux feux → caught in the crossfire
(autres locutions) mettre à feu [+ fusée] → to fire off
ne pas faire long feu (fig) → not to last long
être tout feu tout flamme (passion) → to be aflame with passion; (enthousiasme) → to be fired with enthusiasm
dans le feu de l'action → in the heat of the moment feux
nmpl
(AUTOMOBILES) (sur un véhicule)lights
N'oubliez pas d'allumer vos feux → Don't forget to put your lights on.
feux de croisement → dipped headlights (Grande-Bretagne), dimmed headlights (USA)
feux de route → headlights on full beam (Grande-Bretagne), headlights on high beam (USA)
tous feux éteints (NAVIGATION, AUTOMOBILES) → without lights
(de signalisation routière)lights, traffic lights
Tournez à gauche aux feux → Turn left at the lights.
(littéraire) les feux de ... → the lights of ...
On voyait briller les feux de la ville → We could see the city lights shining.
les feux du couchant → the fiery colours of the sunset
feu arrière nm (AUTOMOBILES)rear light
feu d'artifice nmfirework display, fireworks pl
feu de camp nmcampfire
feu de cheminée nmchimney fire
feu de joie nmbonfire
feu de paille nm (fig)flash in the pan
Collins English/French Electronic Resource. © HarperCollins Publishers 2005
Collins Multilingual Translator © HarperCollins Publishers 2009