Yoshi's Crafted World - Critique

Un jeu de plateforme très amusant, léger en termes de défi ou d’ambition, mais débordant de créativité et de charme.

Yoshi’s Crafted s’est révélé être exactement le jeu que j’imaginais. Il s’agit d’un jeu de plateforme très agréable au design délicieusement charmant, qui n’entend pas révolutionner la série comme Breath of the Wild a pu le faire pour Zelda, ni affiner significativement sa formule, à la manière d’Odyssey pour la saga Super Mario. Si le concept proposé ici peut parfois sembler aussi mince que les décors en carton particulièrement crédibles qui parsèment ses niveaux, cela ne m’a pas empêcher de prendre énormément de plaisir sur ce nouvel épisode.

Yoshi’s Crafted World n’est pas un jeu de plateforme particulièrement difficile, de sorte que le plaisir qu’il ne procure ne réside généralement dans le fait de surmonter un défi. À l’exception des quatre niveaux qui se débloquent à l’issue de la campagne, la majorité de sa quarantaine de stages se boucle facilement. Les ennemis sont pour la plupart passifs, les nouveaux costumes adorables de Yoshi le protègent des dommages, et ce dernier peut planer quasi-indéfiniment, ce qui a pour effet de simplifier largement les phases de plateforme.

Mais la difficulté n’a jamais constitué l’élément central d’un jeu Yoshi, et atteindre la ligne d’arrivée est loin d’être la seule chose à faire dans Crafted World. Ses niveaux sont remplis à ras bord de collectibles, dont beaucoup requièrent une certaine adresse pour être obtenus (il vous faudra les viser avec des oeufs), une exploration minutieuse des moindres recoins des stages, ou un minimum de gestion de ressources afin de s’assurer de disposer d’un nombre suffisant d’oeufs au moment opportun.

Atteindre la ligne d’arrivée est loin d’être la seule chose à faire dans Crafted World.

Même durant les passages les plus simples, les sons et les animations adorables de Yoshi lorsqu’il sautille ou évolue sur le parcours rendent chaque action terriblement amusante. Ses mécaniques de mouvement le rendent particulièrement plaisant à contrôler, et le fait de gober des ennemis pour les transformer en oeufs/munitions se révèle tout aussi jouissif qu’il pouvait l’être dans Super Mario World 2 : Yoshi’s Island il y a 24 ans. Dans ce nouvel épisode, vous pouvez viser directement votre cible (étant donné que le réticule mouvant nécessitant un timing précis a été mis au placard), ce qui m’a offert d’avantages d’opportunités d’utiliser cette attaque iconique tout en simplifiant grandement ma tâche.

Le titre intègre une grosse quarantaine de stages, regroupés au sein de mondes disposant de leur propre thématique (comptez 2 à 3 niveaux par monde) et basés sur l’adorable esthétique « artisanale » de Crafted World. Les différents stages que vous parcourez s’apparentent tous à des dioramas « fait-main », des plateformes flottantes maintenues par de la ficelle aux décors d’arrière-plan constitués de morceaux de carton peints, et la quasi-totalité des éléments semblent avoir été fixés ensemble à l’aide de ruban adhésif. Ce style visuel enchanteur est décliné dans une grande variété de thèmes iconiques du jeu-vidéo, comme un monde désertique ou un monde de glace, ainsi que quelques niveaux particulièrement sympathiques se déroulant au sein d’un château japonais.

Chacun des stages proposés renferme entre cinq et huit fleurs souriantes à découvrir et 20 pièces rouges qui vous permettront de débloquer une fleur supplémentaire à l’issue du niveau, sachant que vous pourrez également en obtenir deux autres en le terminant avec une barre de santé remplie et un total de plus de 100 pièces. J’arrivais généralement à trouver la plupart des fleurs d’un niveau lors de ma premières tentative, mais les pièces rouges étaient cachées de façon beaucoup plus insidieuse - je peux compter sur les doigts d’une main le nombre de fois où je suis parvenu à compléter un niveau à 100 % dès mon premier essai, ce qui m’a constamment donner envie de me replonger dans ces stages.

J'ai apprécié la variété des mécaniques introduites, même s'il reste dommage qu'elles ne soient pas réutilisées ensuite.

Crafted World vous incite même à rejouer les niveaux que vous avez déjà complétés en vous offrant davantage de fleurs lorsque vous obtenez certains objets spécifiques, cachés à l’arrière-plan ou au premier plan d’un niveau. Vous pouvez lancer les oeufs de Yoshi hors du chemin 2D qu’il emprunte, et il se révèle étonnamment naturel de viser l’élément que vous souhaitez (bien que cela puisse devenir légèrement plus délicat dans les zones denses où les cibles sont nombreuses). Lorsque l’un des PNJs à l’écran de sélection de niveau vous demande de trouver et de toucher cinq vaches dans un certain stage, vous devrez le reparcourir en inspectant soigneusement les décors en carton pour y repérer les ruminants plutôt que de vous soucier de le terminer rapidement. Cette chasse aux objets représente une façon amusante d’être récompensé pour avoir revisité ou tenté de compléter un stage à 100 %, bien qu’il reste frustrant que ces tâches vous soient dispensées une par une, ce qui obligera les joueurs complétionnistes à passer d’un niveau à l’autre une bon nombre de fois.

Les niveaux eux-mêmes se révèlent tous uniques, variés et amusants à parcourir, même si peu d’entre eux m’ont réellement épaté en introduisant des idées surprenantes. En dehors de certaines mécaniques de gameplay spécifiques, comme les stages spéciaux vous permettant de contrôler Poochy, la quasi-totalité des parcours intègre un gimmick particulier destiné à ralentir votre progression. Parmi mes préférés figurent notamment un niveau où des aimants se fixent à de grandes boites de conserve pour créer de nouvelles plateformes, un niveau en scrolling automatique dans lequel votre vision est obstruée par des panneaux ne laissant apparaître que la silhouette des personnages et objets (ce qui vous oblige à jouer en fonction des ombres qui y sont projetées) et même un stage avec des clowns tueurs qui poussent des cris stridents et tentent de frapper Yoshi avec leur hache.

Mêmes les moins intéressantes de ces mécaniques possèdent une touche unique qui les aide à se démarquer et évite que Crafted World ne sombre dans la répétition. Malheureusement, peu d’entre elles sont réutilisées par la suite ou combinées avec d’autres. Chaque stage suit la formule désormais bien rodée des jeux de plateforme Nintendo : introduire une mécanique, mettre en avant ses spécificités pendant le niveau, puis terminer en proposant une version légèrement ardue pour tester vos compétences, avant de la jeter aux oubliettes.

J’espérais que ces concepts intéressants seraient mieux employés par la suite, ou du moins revisités dans un stage optionnel avec une difficulté accrue. J’ai finalement eu un aperçu de cela dans les stages post-campagne de Crafted World (malheureusement au nombre de quatre), qui figurent assurément parmi les niveaux les plus difficiles et les plus amusants du titre. Ce qui renforce l’idée que le jeu aurait grandement gagné à exploiter les nombreuses opportunités de mettre à l’épreuve vos compétences en tirant profit des mécaniques intéressantes introduites dans les autres niveaux.

Il est possible d'arpenter l'envers du décor de la quasi-totalité des stages.

Cependant, l’introduction d’une nouveauté bienvenue, vous permettant d’arpenter l’envers du décor de la quasi-totalité des stages, intervient assez tôt dans le jeu. Le ruban adhésif utilisé pour assembler les différents éléments du décor est ici clairement visible, et les pièces et autres collectibles disparaissent en raison de l’accent mis sur la rapidité. Trois mini-Poochy sont disséminés au fil du parcours et un chronomètre apparait dans la partie supérieure droite de l’écran, ce qui participe à faire de ces niveaux des défis speedrun amusants, et non de banales versions miroirs des stages déjà visités.

À défaut de vous proposer un défi particulièrement consistant, Crafted World préfère s’appuyer sur ce genre de nouveautés et d’extras afin d’éviter que l’expérience de jeu ne s’essouffle trop - et y parvient durant une bonne partie des sept à huit heures nécessaires pour boucler l’aventure. J’ai ensuite passer deux heures passionnantes à débloquer et compléter ses niveaux bonus, puis quelques autres pour compléter à 100 % certains mondes, qui se sont révélées moins excitantes, étant donné que parcourir les niveaux à la recherche d’objets s’apparentait à une version plateformesque d’Où est Charlie dans l’univers de Yoshi.

Bien que j’ai pris beaucoup de plaisir à parcourir le jeu, celui-ci se révèle extrêmement prévisible, à une époque où Nintendo impressionne par ses innovations. La musique de Crafted World symbolise à merveille l’expérience de jeu prise dans son ensemble : adorable et envoûtante au départ, elle finit irrémédiablement par s’essouffler. Les partitions rappellent certains thèmes musicaux de Pikmin, et se révèlent bien moins marquantes que celles des précédents volets de la série Yoshi.

Certains costumes spéciaux, comme celui de Bill Balle, s'agitent lorsque vous courez.

Toutefois, Crafted World parvient à limiter ce sentiment de lassitude en introduisant un nouveau système de costumes. Il y en a plus de 170 à collectionner, que vous obtenez en dépensant vos pièces d’or dans des distributeurs reprenant les thèmes des différents mondes. Vous pouvez également débloquer une poignée de costumes spéciaux qui ne s’obtiennent qu’avec certains Amiibo, permettant quelques excentricités, comme la possibilité pour Yoshi de revêtir... un costume de Yoshi. Les tenues les plus rares vous protègent largement des dégâts, et choisir de ne pas en porter permet d’augmenter significativement la difficulté (qui n’aura toutefois rien d’insurmontable).

En 2019, il semble que même la licence Yoshi ne soit pas à l’abri du fléau des boîtes à butin - désolé c’est plus fort que moi. Ici, pas de microtransactions, étant donné que les différents distributeurs ne donnent pas de doublons et que les pièces d’or s’obtiennent en parcourant les stages, mais un autre moyen d’agrandir votre collection. Si certains de ces costumes se révèlent peu intéressants - une poignée change simplement la teinte ou la texture de Yoshi (et le costume d’inspiration amérindienne, basé sur le design de l’un des boss, semble particulièrement douteux, sachant que Nintendo avait choisi de retirer les éléments reprenant une imagerie similaire dans Super Smash Bros Ultimate en fin d’année dernière) - d’autres, comme celui de Bill Balle, absolument adorable avec ses bras qui s’agitent lorsque vous courez, valent assurément le détour.

La protection supplémentaire qu’ils vous apportent se révèle également importante dans le mode coopératif à 2 joueurs de Crafted World, chaotique et amusant, mais qui peut parfois se révéler particulièrement confus sur certains stages. La plupart des niveaux ne semblent pas avoir été pensés pour être joués à deux simultanément, et il n’était pas rare que mon coéquipier et moi nous gênions, en sautant accidentellement l’un sur l’autre (ce qui annulait nos actions), en nous gobant (ce qui nous faisait perdre tous nos oeufs), ou lors des passages impliquant l’utilisation de cordes (qu’il était bien difficile de partager).

C’est un joyeux bazar, même si l’on reste loin de New Super Mario Bros, qui avait le mérite de vous offrir davantage d’espace pour pouvoir éviter vos alliés. L’aspect du mode coopératif le plus réussi reste sans conteste la possibilité pour l’un des Yoshi de grimper sur le dos de l’autre - ce qui pose une question philosophique effrayante et déroutante à laquelle je n’ai ni le temps ni la volonté de répondre. Cette possibilité rappelle irrémédiablement Mario Kart : Double Dash (avec l’un des joueurs contrôlant les déplacements et l’autre se chargeant viser et de tirer) et fait de cet étrange mode hybride un nouveau défi amusant.

Verdict

oshi’s Crafted World est un jeu de plateforme intéressant et charmant qui vaut assurément la peine d’être joué, mais il manque une opportunité nette d’être plus que cela en ne tirant jamais pleinement parti des idées les plus ingénieuses qu’il introduit. S’il regorge de collectibles originaux qui pousseront les joueurs complétionnistes à les traquer jusqu’au dernier, il reste décevant que Crafted World n’exploite pas le potentiel entrevu dans les stages bonus en nous offrant un défi global plus consistant. Ce qui ne m’a toutefois pas empêché d’apprécier les heures que j’ai passées sur le jeu.

Dans cet article

Yoshi's Crafted World

Nintendo | 29 mars 2019
  • Plate-forme / Sujet

Test Yoshi’s Crafted World

7.8
Bon
Yoshi’s Crafted World est jeu de plateforme très amusant, léger en termes de défi ou d’ambition, mais débordant de créativité et de charme.
Yoshi's Crafted World