[VDC - Terminé] **Cendre et la Vallée Oubliée**

par Nathalie986
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Re: [VDC] **Cendre et la Vallée Oubliée** màj 06/07/24 - Chap9

★★ Guide

 

Chapitre 9 - L'Unique


 

Après sa visite à Caleb et Lilith, Cendre s’était dirigée tout droit vers la maison de l’Ail. Il y avait de la lumière mais, curieusement, personne à l’intérieur et elle avait pourtant scruté les étages sous son apparence de chauve-souris. 

Révélation

Puis elle se rappela alors, que chaque fois qu’il s’éclipsait pour se reposer dans sa crypte, Lestat empruntait toujours la porte arrière de la maison.
Heureusement que Caleb était curieux car, sans lui, elle n’aurait jamais su que le Duc était entré dans un état profond d’hibernation.

 

Elle n’avait donc pas réfléchi plus longtemps, et avait décidé d’utiliser le même stratagème que Caleb : l’entrée vampirique. Le pouvoir était facile à maîtriser et ainsi, elle pourrait voir de ses propres yeux ce que le frère de Lilith avait vu et lui avait conté.


Lorsqu’elle pénétra dans la salle à manger, elle remarqua immédiatement l’urne abandonnée au milieu de la pièce, urne dont Caleb ne lui avait pas fait mention et qui n’avait aucune épitaphe. Cendre devina que ce devait être celle de la rousse à couettes. Pourquoi Lucas l’avait-il laissée là ?


Tout laissait à penser qu’il avait pris sa décision d’hiberner, précipitamment. D’ailleurs, plus personne ne l’avait revu après cette nuit-là. Et vraisemblablement, la rousse et lui n’avaient pas atteint le seuil de la chambre ou de la crypte. 

 

La jeune vampire emprunta alors la porte de derrière, et c’est là qu’elle aperçut un escalier semblant mener à un sous-sol.
« Ce serait logique », pensa-t-elle. « Les cryptes sont toujours au sous-sol. Il doit être là. » 


Elle était alors entrée dans la pièce. Le cercueil en était l’élément principal et une nuée violacée s’en échappait. Lucas était bien là et il hibernait, tout comme Caleb l’avait dit. Et il hibernait certainement depuis cette fameuse nuit où elle avait cru le prendre en flagrant délit de trahison avec la rousse à couettes.


Ses pas tremblants la conduisirent jusqu’à la couche de Lestat et elle se mit à parler tout haut :
- Pourquoi as-tu fait cela ? A cause de ça, j’ai douté de toi et c’est un supplice sans fin de ne point te voir... Pourquoi Lucas ? 


- Tout le monde m’a dit que je ne ressentirais plus rien une fois transformée, et toi le premier, mais c’est faux. Je pense sans cesse à toi, tu me manques. Tellement.
Cendre, qui n’avait presque plus d’émotions depuis sa transformation, se sentit ébranlée devant le cercueil de Lestat. 


Elle s’était alors assise auprès de lui, espérant se confier à l’homme qu’elle avait tant aimé.
- Et puis, il n’y a pas que cela. J’ai trouvé une mixologue, Jesminder. Elle vit chez moi. Je n’en peux plus de sentir ses souffrances. Sa famille lui manque. 


- Et mon garde-manger ? Un vrai mur des lamentations... Et pourtant, j’ai tellement de plaisir à m’abreuver de leur plasma... Alors pourquoi ressens-je alors ces regains de culpabilité que je ne contrôle pas ? Pourquoi Lucas ? Tu pourrais m’aider à comprendre si tu étais près de moi... 


- J’aimerais tellement que tu me reviennes, que tu dissipes tous mes doutes... 


- Sans toi, je me sens comme la jeune femme que j’étais en arrivant dans la vallée et ce soir, j’ai perdu ma force, face à toi. Parce que je n’ai cessé de t’aimer malgré tout. 


Cendre s’était relevée. Elle savait qu’elle devait se ressaisir avant de retourner à la chapelle. Là-bas, elle ne pourrait pas se permettre de flancher. Elle devrait être forte et puissante face à tous.
C’est alors qu’elle entendit une voix, une voix qu’elle connaissait bien... 


- Cendre...
Non, elle ne l’entendit pas, elle était dans son esprit. Sa voix... Le son était étrange mais elle sut... Elle sut que Lucas voulait communiquer avec elle:
- Tu dois faire ce que tu as à faire. Ne tiens pas compte de moi... Notre amour existera, mais plus tard... Un jour... Sois forte.


Puis elle ne discerna plus rien. Seule la nuée violette qui s’échappait du cercueil de Lestat avait pu lui faire croire un instant qu’il avait été là.


Elle avait attendu un moment, espérant entendre une nouvelle fois la voix de son amour, puis était remontée à l’étage.
« Je t’aime, mon amour, oh oui, je t’aime et je serai forte pour toi, mais aussi pour Vlad. Car, quoiqu’il arrive plus tard, je ne pourrais plus trahir Vladislaus. Il est aussi mon ami et ma force, tout comme toi. Tant de choses se sont passées depuis que tu as hiberné... » 

 

Elle faillit hurler sa détresse tant tout cela lui paraissait insupportable mais elle se ressaisit, bien que difficilement. Sa grossesse la rendait un peu trop vulnérable et il fallait qu’elle parte, de toute façon. La maison de l’Ail portait bien son nom et elle ne pourrait pas y survivre longtemps, surtout avec un bébé dans le ventre.


Cette nuit-là, Cendre s’était réfugiée dans sa crypte et avait contemplé ce tableau, celui de la maison de l’Ail, celui qu’elle n’avait jamais terminé, ce tableau qui représentait tout pour elle. 

 

Elle le décrocha du mur et le posa sur son chevalet, dehors, face à la maison de Lestat, en pleine tempête de neige annoncée. Mais elle s’en moquait. Cette nuit, elle finirait de peindre sa toile.


Et elle l’avait finie. La maison de Lucas était là, sous ses yeux, telle qu’elle se la rappelait. Un nid d’amour à une époque où l’ail ne la faisait pas autant souffrir, à une époque où elle peignait encore en plein jour sans crainte de brûler vive.


Le jour allait bientôt se lever et Cendre était fatiguée. Les dernières révélations de la nuit l’avaient exténuée mais, avant d’aller se coucher, elle encadra et raccrocha la toile achevée.


Elle savait à présent que Lestat l’avait toujours aimée et que jamais il ne l’avait trahie. Alors, même s’il avait choisi d’hiberner pour des années, il serait sa force et elle ne le décevrait pas.
« Tu dois faire ce que tu as à faire », avait-il dit. Et elle le ferait, avec, en plus, la certitude qu’il était à ses côtés. 


Ce jour-là, Cendre s’endormit en sachant que non loin de là, dans la maison de l’Ail, Lucas pensait à elle.


Lorsqu’elle se réveilla le lendemain, Cendre se demanda si elle n’avait pas rêvé les propos de Lestat. Il fallait qu’elle en ait le cœur net. Elle se servit donc de la radio portative et appela Caleb, pour lui demander de venir de toute urgence. Si quelqu’un pouvait l’éclairer sur ce qui s’était passé, c’était bien lui. L’homme était une véritable encyclopédie à lui tout seul, sur le sujet des vampires.

 

Caleb était arrivé très vite, l’air inquiet.
- Qu’y a-t-il ? Quelque chose ne va pas avec le bébé ?
- Le bébé va très bien mais j’ai besoin de tes lumières.
- Oh ? 


Il s’était servi un verre au bar puis avait écouté son amie.
- Je suis allée voir Lestat après que je sois partie de chez vous hier soir et il s’est passé un truc très étrange.
- Ah oui ? Hum, ce nectar est une pure merveille, c’est incroyable tout ce que l’on peut faire avec des plasmafruits ! 


- Oh, tu m’écoutes ?! Ce que j’ai à te dire est très sérieux.
- J’ai entendu. Il s’est passé un truc étrange. Qu’est-ce que tu as fait ? Tu as essayé de le réveiller pendant son hibernation ? 


- Pas du tout. Je me suis approchée du cercueil puis j’ai entendu Lestat me parler.
- Il t’a parlé ? Tu es bien sûre ? 


Caleb était allé reposer son verre, soudain attentif aux paroles de Cendre.
- On ne peut pas dire qu’il me parlait réellement. C’était comme si j’entendais sa voix dans ma tête.
- Et que t’a-t-il dit ?
- De faire ce que j’avais à faire. 


Caleb s'était assis tranquillement et avait souri:
- Vous vous aimez, n’est-ce pas ?
- Arrête de dire n’importe quoi ! 


- Je vais t’expliquer. Les vampires peuvent lire dans les pensées des humains mais ne peuvent pas lire dans les pensées de leurs semblables, sauf dans quelques cas particuliers seulement, où nous pouvons communiquer entre nous par télépathie. Mais les cas sont de plus en plus rares. C’est ce qui t’est arrivé.
- De quels cas particuliers parles-tu ?


- De l’amour d’une mère avec son enfant, ou encore de l’amour entre deux vampires. Le vrai amour, j’entends. Nous, vampires, ne pouvons aimer qu’une seule fois au cours de notre vie éternelle. Un seul amour, le vrai, l’Unique, comme nous l’appelons, et Lestat a trouvé en toi son Unique, apparemment. Et s’il a pu communiquer avec toi, c’est qu’il est aussi le tien. 

 

Cendre ne chercha pas à nier:
- Très bien. Puisque tu as tout deviné, je ne vais pas te mentir. Je ne sais pas s’il est mon Unique, comme tu dis mais je sais que je l’aime. Et je t’en prie, mon ami, ne dévoile pas mon secret. Tu sais ce que je risque.


- Je ne le ferai pas. Je tiens bien trop à ton amitié pour cela, et à celle de Lestat aussi.
- Tu crois que c’est pour cette raison qu’il a pu communiquer avec moi ?
- J’en suis sûr. Et lorsque tu maîtriseras suffisamment tes pouvoirs, tu pourras aussi communiquer avec lui.


- Nous pourrons donc discuter ? Même s’il hiberne ?
- En quelque sorte, oui. Et même s’il n’hiberne pas. Vous aurez la fortune incroyable de pouvoir vous parler, sans que personne autour de vous ne sache ce que vous vous racontez.

 

Avant de prendre congé, Caleb s'émerveilla:
- Vous avez de la chance. De toute ma longue vie, je n’ai pas encore croisé mon Unique.
- Caleb... Motus et bouche cousue, hein ? Tu ne parles de ça à personne. 


Après le départ de son ami, Cendre aspira à aller se reposer dans sa crypte. Elle allait descendre l’escalier qui y menait lorsqu’il lui sembla entendre des bruits en provenance du garde-manger.


Elle s’approcha de la porte, bien décidée à entendre ce qui se passait de l’autre côté. 


Jesminder, toujours aussi déterminée à libérer les prisonniers de Cendre, avait ouvert toutes les cellules, enfin presque toutes. Elle avait sciemment « oublié » d’ouvrir celle de Dirk Dreamer, qu’elle détestait au plus haut point.
Elle les avait tous réunis dans le couloir du garde-manger, leur faisant signe de ne pas dire un mot et de la suivre en silence. 


Mais ce que Jesminder ignorait, c’est que Madame lisait dans les pensées. Et Madame Valrose, déçue par son comportement, avait rappelé Caleb, son ami fidèle, à la rescousse pour intercepter cette tentative d’évasion, elle-même ne pouvant pas sortir en plein jour.
Elle voulait voir jusqu’où pouvait aller sa servante. Cendre avait alors descendu l’escalier menant à sa crypte. Elle attendrait ici des nouvelles de Caleb mais elle avait déjà compris que Jess lui avait dérobé le trousseau de clés qu’elle avait imprudemment laissé dans l’un des tiroirs de la cuisine. 



La myshunienne était donc arrivée sans encombre dans le vestibule, talonnée de près par Brant Hecking, Julia Wright et Clara Bjergsen. Elle les conduisait d’un pas ferme vers la chapelle et leur procurait, de par son enthousiasme, l’excitation nécessaire à une évasion réussie.


- Nous y voilà, les amis ! La porte de la chapelle... La sortie est juste là. Il fait déjà jour et Madame ne pourra pas nous suivre dehors car elle craint le soleil.
Clara semblait dubitative.
- Tu es sûre ? Je trouve que cette évasion est beaucoup trop facile.
- Moi aussi, enchérit Julia
Brant, lui, pensait à son mari et tous les moyens qui pouvaient le ramener à lui étaient bons.
- Oui, j’en suis sûre. Elle ne se lève jamais avant onze heures et elle ne sait pas que j’ai ses clés. 


Les quatre acolytes arrivèrent sans encombre jusqu’à la place et la traversèrent, mais lorsque qu’ils en franchirent les portes, Clara soupira un « Je vous l’avais dit ».
Trois vampires leur faisaient face et leurs visages n’étaient pas amicaux.
Jesminder stoppa nette leur avancée. 


Ce fut le vidame de Montsimpa qui prit la parole.
- Où comptez-vous aller, humains ? Ne vous a-t-on pas dit qu’on ne sortait pas de cette ville ? 


- Il n’y a aucune issue pour vous ici, rajouta Lilith en souriant.


Jesminder ne se laissa pas démonter. Elle avait entraîné les trois autres dans cette folle évasion et elle se devait de les sortir de là.
- Nous cherchions juste notre chemin. Peut-être pourriez-vous nous aider. Nous voulons seulement quitter cette ville sans faire d’histoire.
Ses trois compagnons, eux, paraissaient de plus en plus inquiets et ne pipaient mot. 


Ce fut Caleb qui lui répondit :
- Vous appartenez à Madame Valrose. Nous allons vous ramener chez elle, et elle seule décidera de votre sort.

 

Lilith avait ensuite aidé son frère et le vidame à ramener les prisonniers récalcitrants dans leurs cellules respectives puis elle était rentrée chez elle, laissant les deux hommes s’entretenir avec Cendre.


Caleb s’était alors adressé à elle :
- C’est ta servante qui a tout manigancé. Je crois que tu le sais. Elle mérite d’être punie.
- Je le sais bien. Mais j’ai besoin d’elle, et je ne peux pas la tuer.
- Et que comptez-vous faire alors ? questionna le vidame. Un tel affront ne peut pas rester impuni. 


- Rassurez-vous, Timothée. J’ai ma petite idée sur la question, et je pense que Jess ne commettra plus de pareilles folies.

 

A suivre 🙂

 

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Re: [VDC] **Cendre et la Vallée Oubliée** màj 06/07/24 - Chap10

★★ Guide

 

Chapitre 10 - Un comte à la maison


 

Jesminder était profondément anéantie. Peu de temps après la réintégration de sa chambre, elle avait entendu des hurlements en provenance des cellules, puis plus rien. Elle imaginait le pire, et elle savait que si le pire s’était produit, c’était à cause d’elle.
Madame l’avait prévenue : « à la moindre tentative de complot, je les tue tous les trois et je te confine dans tes quartiers. » Voilà, on y était. Au lieu de les sauver, elle les avait voués à leur perte. Elle aurait tellement voulu mourir, elle aussi.

Révélation

Cendre avait laissé ses amis s’occuper des prisonniers. Elle devait tenir la menace qu’elle avait faite à Jesminder, quelques mois plus tôt, mais, était-ce dû à son état actuel, elle ne se sentait pas de la mettre en pratique elle-même. Caleb, Lilith et Timothée avaient donc été ravis de l’aider.
Un peu plus loin, dans leurs cellules, Jess et Dirk avaient entendu les cris des autres détenus. Jesminder avait tenté de dissimuler son désespoir et Dirk s’était demandé comment une célébrité telle que lui avait pu se fourrer dans un tel pétrin.


Ce soir-là, Cendre avait enterré numéros six, sept et huit, en compagnie de ses amis, qu’elle avait absolument tenu à avoir à ses côtés.


Elle se sentait accablée, mais ne savait mettre des mots sur cette tristesse envahissante. Caleb la rassura en lui affirmant que la grossesse pouvait parfois jouer ce genre de tours. Et elle acquiesça même si elle supposait qu’il y avait autre chose. Elle n’avait pas voulu la mort prématurée de ces trois-là, et elle en voulait à Jess.

 

Cette nuit-là, Cendre partit à la recherche de nouveaux humains pour garnir son garde-manger. Elle rencontra alors deux femmes et un homme : Eliza Pancakes


Dina Caliente 


Et Erwin Pries. Il semblait très bizarre et un peu paranoïaque sur les bords celui-là. Mais comme les deux femmes, il suivit Cendre. Aucun d’entre eux ne s’était méfié de la jeune femme enceinte qui leur proposait un toit pour la nuit.


Après avoir enfermé numéro douze dans sa cellule, Cendre s’apprêta à aller dans sa crypte. En entrant dans le vestibule, elle eut la surprise de voir que Vladislaus l’y attendait.
- Vladi ! Je suis heureuse de vous voir. Que me vaut cette visite ? 


- Je viens m’installer chez vous ma chère. Timothée est passé me voir et m’a informé que votre servante vous avait trahie.
La nouvelle n’enchantait pas Cendre...
- Vous vous installez chez moi ? Mais je n’ai même pas de cercueil à vous proposer.


- Je me moque royalement du cercueil ! Dans votre état, vous avez autre chose à gérer que les extravagances de votre servante. Je vais donc y veiller. D’ailleurs, qu’avez-vous fait d’elle ? 


- Rien ! Elle est consignée dans ses quartiers et j’irai lui parler quand bon me semble. Il s’agit de ma servante et je ne veux pas que vous vous mêliez de mes affaires avec elle. J’y perdrai toute crédibilité.
- Je le conçois, mais n’avez-vous pas peur qu’elle récidive ? J’ai vu que vous n’aviez pas perdu votre temps pour regarnir votre garde-manger.


- Elle pourrait, oui, mais elle ne le fera pas. Si vous restez chez moi, j’aimerais aussi que vous me fassiez confiance. C’est possible, ça ?
- C’est tout à fait possible.


Cendre avait laissé Vladislaus pour descendre dans sa crypte. Cette journée l’avait éprouvée. Trois décès... Tout cela parce que Jess n’avait pas écouté ses consignes.
Cendre savait que sa servante n’aspirait qu’à une chose, revoir son mari et son fils, mais elle ne pouvait pas le lui accorder, et les portes de la ville étaient, heureusement, toujours fermées.
Elle ne voulait aucun mal à Jess et avait même une petite idée pour apaiser ses souffrances. Mais ce ne serait pas pour tout de suite.


Privée de sa « fidèle » servante, Cendre dut donc se remettre à préparer elle-même les repas des prisonniers, et à les leur apporter, y compris ceux de Jess et Dirk. 


Chaque fois qu’elle lui amenait son repas, Jesminder la regardait avec ce petit air triste au fond des yeux. Elles ne se parlaient pas, mais les regards en disaient parfois plus long que les mots. Et les pensées de Jess étaient noires.

 

Cendre avait cependant décidé de ne pas lâcher. Jess avait fauté et, même si elle la considérait comme une humaine courageuse, comme l’humaine qu’elle avait elle-même été autrefois, elle devait aussi lui faire comprendre que lorsqu’elle faisait une promesse, il ne s’agissait pas de paroles en l’air. Alors elle devrait plier, même si le cœur de Cendre en était bouleversé.


Le comte s’était donc installé chez Cendre pour son troisième trimestre de grossesse et elle profitait de ce qu’il soit là pour bénéficier de ses leçons captivantes et passionnantes. 


Ils pouvaient parler pendant des heures de l’histoire des vampires et Cendre, enthousiaste, ne cessait d’apporter des théories incroyables dont Vlad semblait se délecter.


En contrepartie du gîte et du couvert (Cendre partageait aussi son garde-manger avec le Comte), elle lui demanda d’apporter ses repas au premier géniteur, qu’elle avait de plus en plus de mal à supporter.
Vladislaus était ravi car cela lui procurait une bien sympathique distraction, trois fois par jour. Il adorait voir la star mondiale tapoter sur son téléphone pour essayer d’obtenir un réseau qui n’existait pas à Forgotten Hollow.


Comment Cendre avait-elle pu choisir un humain aussi primitif pour sa future descendance ? Celui-là passait son temps à faire des pompes ou à s’admirer devant un miroir, quand il ne luttait pas inutilement avec son téléphone portable. Qu’il pouvait être futile, ce Dirk ! Mais bon, Cendre clamait qu’il était beau et musclé, et qu’il faisait un parfait géniteur, alors, pourquoi pas ?


En attendant, le Comte profitait de ses instants uniques auprès de sa protégée et lui enseignait, tel l’organiste qu’il était, la beauté du son qui sortait de cet instrument qu’il encensait. 


Et Cendre semblait lui en être toujours reconnaissante. Elle aimait apprendre et elle posait toujours les bonnes questions, questions qu’elle posait déjà lorsqu’elle n’était qu’une humaine : pertinentes et perspicaces. Cette femme était décidément très intelligente et il s’enorgueillissait qu’elle fut sa promise.


Elle avait même réussi à le faire rire en le convaincant de faire un concours de bonhomme de neige. Et elle avait aussi ri de bon cœur, en décrétant que son rire à lui était vraiment démoniaque. 

 

Durant la journée, Cendre prêtait son cercueil à Vladislaus pour qu’il puisse de reposer tranquillement et, pendant ce temps, elle recevait ses amis.


Elle recevait aussi certaines personnes qu’elle avait rencontrées dans les catacombes comme Francis Caron, qui tenait une galerie d’art et grâce à qui, elle avait vu les ventes de ses toiles grimper en flèche.


Ou encore Bella Swan, cette vampire en mal d’enfants qui souffrait de ne pas encore avoir connu l’Unique qui aurait pu lui donner ces petits êtres qu’elle attendait tant.
Bella avait toujours l’air tellement triste... 


Cendre et elle se rencontrèrent de plus en plus souvent, et elles finirent par sympathiser. Trouvant une oreille compatissante, Bella s’épancha alors auprès de la future maîtresse vampire en lui avouant qu’elle regrettait sa vie humaine.


- Tu regrettes ? Mais depuis quand es-tu vampire ?
- Une vingtaine d’années, à quelque chose près. J’avais à peine vingt-six ans lors de ma transformation. Je vous envie, vous savez.
- Je ne vois pas pourquoi. Ma position n’est pas enviable, tu peux me croire.


- De mon point de vue, elle l’est. Vous allez pouvoir mettre au monde tous les bébés que vous souhaitez et fonder une grande famille. C’est cela que je vous envie.
- Tu ne devrais pas. 


- Je vais devoir tuer tous mes bébés, s’ils naissent humains. C’est le prix à payer pour sauver la Vallée Oubliée et devenir Maîtresse Vampire, un bien lourd tribu que je ne souhaiterais à personne. Tu vois, Bella, tu n’as vraiment rien à m’envier.
- Ces bébés humains... vous pourriez les transformer à l’adolescence... Ainsi, ils pourraient vivre.
- Malheureusement, la Tradition est stricte, je dois m’en séparer.
- C’est une bien lourde croix à porter, et je vois aussi de la souffrance dans votre regard, Maîtresse, je me trompe ?

 

Cendre ne répondit pas. Elle devait aller de l’avant.
A une semaine de la fin de sa grossesse, elle devint vampire majeur et choisit de faire une fête dans la crypte pour fêter l’évènement. Elle avait même invité Francis et Bella, contre l’avis du Comte, qui ne les trouvait pas assez « racés », à son goût.

« Ce sont de petits vampires de seconde zone », avait-il déclaré.

 

Mais elle s’en moquait bien, car ces deux-là étaient ses amis à présent, et elle les voulait auprès d’elle pour ce grand jour. Après tout, c’étaient les catacombes qui faisaient vivre la vallée, même si Vladi semblait parfois l’oublier.
Caleb était un véritable lien entre les deux, et il sauva la soirée avec ses blagues vampiriques un peu lourdes au goût de tous.


C’est aussi Caleb qui transforma la salle de combat en piste de danse. Il avait ramené un phonographe et réussit à persuader tout le monde de le suivre sur la piste, y compris Vlad qui prit une moue sérieuse de grand danseur. Comme quoi, les vampires aussi savaient s’amuser !
Cendre se tourna alors vers son ami :
- Tu ne m’avais pas dit qu’il y aurait de la musique !
- C’était une surprise ! J’espère qu’elle te plait !
Bien sûr qu’elle lui plaisait. Elle fêtait son nouveau rang de vampire en dansant, chose qu’elle n’avait pas fait depuis longtemps. Et, en plus, son nouveau rang allait lui permettre de s’occuper du cas de Jess. 


Alors, oui, elle était ravie.
Au lever du jour, elle convia ses invités à rentrer chez eux. Elle avait besoin de se reposer et de se retrouver un peu seule.


Le Comte avait tenu à installer un berceau dans sa crypte, mais elle trouvait que c’était prématuré.
Ce soir, ses pensées allaient vers Jesminder. Cela faisait quatre mois qu’elle ne l’apercevait que brièvement, lorsqu’elle lui apportait ses repas. Et Jess semblait dépérir. Elle devait faire quelque chose pour elle.


Elle se leva, bien déterminée à aller lui parler et à faire ce qu’elle avait à faire car, après tout, depuis cette tentative d’évasion, les deux femmes ne s’étaient plus parlé.


Malheureusement, le destin en décida autrement.
Cendre ressentit les premières douleurs de l’accouchement et n’eut d’autre choix que faire marche arrière pour s’approcher du berceau que Vlad avait judicieusement placé dans sa crypte. Mais pourquoi avait-elle autant dansé ce soir ? 


Elle se préparait à faire naître son enfant seule lorsqu’elle sentit la présence de son vieil ami à ses côtés. Il s’était installé derrière elle sans mot dire, mais il était là.


Le premier bébé de Cendre naquit donc le jour où elle devint vampire majeure. Elle espéra secrètement que ce jour lui porterait bonheur et que sa fille Amandine serait un petit vampire.
Malheureusement, Cendre n’en aurait pas la certitude avant les trois ans de la fillette, et le Comte sut lui rappeler, sans ambages, la dure réalité.
- Vous devez la laisser à son père. Une maîtresse vampire ne peut pas s’occuper de sa progéniture tant qu’elle n’est pas sûre de sa race. Et nous ne savons pas si votre bébé est un humain ou un vampire.



Cendre reposa alors immédiatement la petite Amandine dans son berceau. Le regard sans pitié de Vlad veillait à ce qu’elle fasse tout dans les règles, sans pleurnicherie. Alors, c’est ce qu’elle ferait.
- Vous êtes parfaite, ma chère. Je vais pouvoir vous laisser à présent. Je m’en retourne dans mon manoir. Tenez-moi informé de l’évolution de cette petite.


Lorsque Cendre se fut assurée que Vladislaus était vraiment parti, elle reprit sa fille dans ses bras.
- Dis-moi que tu seras un petit vampire ! Tu ne peux pas être humaine, tu es la chair de ma chair ! 


Elle se changea puis amena le bébé à son père, lui expliquant qu’il lui faudrait s’occuper d’elle jusqu’à ce qu’on sache si elle était ou non un vampire.
- Mais je ne sais pas m’occuper des bébés, moi !
- Tu apprendras ! Comme tout le monde.


- Ce bébé sent mauvais ! Déjà que ma cellule n’est pas grande, je vais finir par être intoxiqué par ses odeurs.
- Il ne tient qu’à toi qu’elle reste propre, dans ce cas. Tu auras chaque jour tout ce qu’il te faut pour prendre bien soin d’elle. En attendant, je te laisse quelques couches, des biberons et du lait. Je te conseille de bien t’occuper d’elle, sinon tu auras à faire à moi, et tu sais que je ne plaisante pas.


Elle était alors ressortie de la cellule de Dirk, laissant sa fille derrière elle. Un vrai déchirement. Comme elle comprenait mieux Jess à présent. Et il lui faudrait attendre trois ans avant de savoir...


Cendre traversa la place. Elle avait besoin de parler à Lucas. Alors, elle installa un fauteuil près de son cercueil et commença à lui raconter ce qu’elle ressentait.


Il n’y a qu’avec lui qu’elle se sentait libre d’exposer ainsi son cœur et son âme et, après sa discussion avec Caleb, elle était persuadée que Lucas l’entendait, ou du moins, qu’il savait qu’elle était là. Elle resta ainsi auprès de lui, entamant un long monologue qui dura quelques heures.


Cela lui fit un bien fou de pouvoir vider son sac.
Puis, quand elle en vint au sujet de Jess, elle décida qu’il était temps pour elle de rentrer. Tout était clair dans sa tête. Elle devait agir maintenant.


Lorsque Cendre arriva dans la chambre de Jesminder, celle-ci dormait. Elle entreprit immédiatement de la réveiller.
- Jess, il faut que je te parle. Lève-toi.


La jeune servante avait alors allumé les lumières puis s’était assise au bord de son lit. Cendre la rejoignit et entra, sans perdre de temps, dans le vif du sujet :
- Jess, je ne supporte plus de te voir malheureuse, et tu as assez payé cette tentative d’évasion. Alors, je lève ta punition. Tu pourras sortir de tes quartiers et reprendre ta vie dans la crypte, ainsi que tes cours de mixologie avec moi. Mais avant, je veux te permettre d’être plus heureuse.


- Plus heureuse ? Vous vous fichez de moi ? Comment pourrais-je être heureuse en restant ici ?
- Laisse-moi t’hypnotiser. Je ne sais pas si ça marchera mais, au moins, ça ne te fera pas de mal, et tu te sentiras mieux.



Jesminder était fort tentée par la proposition de Madame. Après tout, sa situation ne pouvait pas être pire que ce qu’elle vivait à présent. Alors, pourquoi pas ?
- D’accord, hypnotisez-moi... 


Cendre l’avait donc hypnotisée, oui, mais ce que Jesminder ignorerait à tout jamais, c’est que la vampire l’avait également vidée de son esprit de vie, de sa mémoire et de tous ses souvenirs.


Lorsqu’elle eut terminé, Jess s’était complètement affaiblie.


Cendre savait que sa servante aurait besoin de longues heures de sommeil récupérateur et que, lorsqu’elle se réveillerait, elle aurait oublié toutes les personnes qui avaient fait partie de sa vie jusqu’à présent, y compris elle-même. Il faudrait refaire connaissance avec Jess et lui inventer une nouvelle vie mais dans celle-ci, elle n’aurait ni mari, ni enfant et elle pourrait désormais être heureuse.

 

A suivre 🙂

 

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Re: [VDC] **Cendre et la Vallée Oubliée** màj 06/07/24 - Chap11

★★ Guide

 

Chapitre 11 - Une loyauté assurée


 

Elle s’était réveillée ce matin-là, étrangement bizarre. Elle ne savait pas où elle était mais, pire que ça, elle avait oublié son nom et, pour ne rien arranger, une brûlure lancinante se faisait ressentir au niveau de son cou.

Révélation

Elle se dirigea vers la salle de bain dont la porte était restée ouverte et s’empressa de soulager une envie diffuse mais bien réelle.


Puis elle s’observa dans le miroir. Elle avait deux traces de piqûres dans le cou. Que lui était-il arrivé ? En regardant son environnement, la jeune femme se dit qu’elle ne devait pas être bien riche.



Elle fila sous la douche. Cette odeur de transpiration était insupportable. Combien de temps avait-elle dormi pour sentir le bouc à ce point-là ? Elle ne se rappelait rien. 


« Bon sang ! Mais pourquoi est-ce que je ne me souviens pas ? ».
Elle avait revêtu les vêtements qui se trouvaient là, et avait relevé ses cheveux en chignon. Pourquoi ? Elle ne saurait le dire mais le geste lui était venu machinalement. Pourtant, devant ce miroir, elle ne se reconnaissait toujours pas. 


Elle recoiffa alors ses cheveux comme ils étaient auparavant et décida d’aller jeter un œil à son environnement, mais lorsqu’elle voulut ouvrir la porte de sa chambre, elle découvrit que celle-ci était fermée à clé.
Elle tambourina alors de toutes ses forces pour se faire entendre.
- Ohé ! Il y a quelqu’un ? 


Une femme blonde apparut, une femme qui semblait la connaître.
- Bonjour Jess, comment te sens-tu ?
Jess ? Alors, elle s’appelait Jess !
- Bonjour... Vous me connaissez ? 


- Bien sûr que je te connais ! C’est quoi cette question ?
- Je ne me souviens pas... Je ne sais pas qui vous êtes, ni qui je suis non plus...


- Alors, ce qui t’est arrivé est bien plus grave que ce que je ne le pensais.
- Quoi ? Que m’est-il arrivé, Madame ? 


La dame blonde, qui semblait sincèrement inquiète pour elle, la conduisit jusqu’à une cuisine accessible par de hautes portes surmontées de barbelés.
- Il faut que tu manges, lui avait-elle dit.


Elle semblait si prévenante. Elle lui servit une omelette et s’enquit de ses souvenirs :
- Cette cuisine ? Elle ne te rappelle vraiment rien, Jess ?
- Non... je suis désolée. 


- Ce n’est pas grave. Nous ferons tout ce qu’il faut pour te rappeler qui tu es.
Comme elle était gentille ! Cette femme devait avoir une grande importance dans sa vie pour se soucier d’elle à ce point.
- Je te raconterai ta vie, Jess, tu verras. Tes souvenirs finiront par remonter à la surface. 


Et elle la lui avait racontée. La dame blonde s’appelait Madame Valrose. Une nuit, il y a deux ans, elle avait retrouvé Jess blessée devant le pas de sa porte, et elle l’avait recueillie sans aucune hésitation, bien que Jess fut humaine...
- Comment ça, humaine ? Bien sûr que je suis humaine. C’est encore une des choses dont je sois sûre. Ce n’est pas votre cas ?


- Malheureusement, non. Je suis un vampire et toi, Jess, tu défendais notre cause. Tu savais que tous les vampires n’étaient pas mauvais, et tu voulais le prouver au monde entier. Seulement, certains humains ne pensent pas comme toi, et c’est pour cette raison que tu t’es retrouvée devant chez moi cette nuit-là. Ils voulaient te tuer pour te faire taire. J’avais confiance en toi, alors je t’ai hébergée. 

 

- Cette histoire semble incroyable... surtout lorsque les marques que j’ai au cou me font penser à une agression de vampires.
- Evidemment ! Ils n’ont pas réussi à te tuer la première fois alors maintenant, ils font tout pour que tu doutes. Mais l’histoire est toute autre.
- Et quelle est-elle ? 


- Elle est triste, Jess... Les humains ont toujours eu peur de nous alors que nous ne leur voulions pas de mal.
Madame Valrose expliqua, qu’à cause de cela, la Vallée Oubliée avait fermé ses portes, pour que le monde des humains et celui des vampires soient à tout jamais inaccessibles l’un pour l’autre. Mais le sort qui avait été jeté n’avait fonctionné que partiellement et les humains arrivaient encore à rejoindre Forgotten Hollow, pour ne plus jamais pouvoir en ressortir. 


Madame Valrose prit soudain un air grave.
- Nous dûmes alors prendre une décision capitale pour assurer notre survie : tout humain qui se perdrait dans la vallée deviendrait pour nous un potentiel repas. Ce fut la seule décision raisonnable pour assurer la survie de notre race.
En décrivant sa nouvelle vie à Jess, Cendre savait que la réalité n’était pas bien loin de son invention. 

 

- Et moi dans tout ça ? Qu’ai-je fait? Ai-je cautionné tout cela ? Vous dites que nous étions amies, que je défendais votre cause... mais tout cela semble n’avoir aucun sens. Je n’aurais pas pu laisser mes semblables se faire tuer.


- Bien sûr que non ! Mais tu savais que nous n’avions pas le choix. Tu étais là quand nous avons pris notre décision, et tu savais aussi que c’était la seule à prendre, même si elle nous a tous déchirés. Tu t’es toi-même proposée pour rester à mes côtés afin de pouvoir alléger les souffrances des prisonniers. Nous n’avions pas le choix ! Essaye de t’en rappeler ! C’était ta cause !


- Je n’arrive pas à m’en souvenir, je suis navrée.


Madame Valrose lui raconta aussi à quel point elle lui était dévouée. Elle lui parla du garde-manger et des géniteurs, de ces personnes dont Jess s’occupait avec prévenance au fil des jours, en cuisinant pour elles ou en leur rendant visite, simplement pour parler, parfois.


Madame lui racontait tout ce qu’elle pouvait pour l’aider à retrouver ses souvenirs. C’est ainsi qu’elle en vint à lui parler de son bébé, une petite Amandine qui devait rester près de son père, et dont elle était privée à cause de la Tradition. Elle devrait attendre trois ans avant de savoir si cette petite poupée allait être vampire ou humaine et si, pour être plus crue, elle allait vivre ou mourir.
Il était vraiment tragique, le destin de Madame Valrose... 


Elle lui apparut alors comme une femme extrêmement vulnérable, bien qu’elle soit un vampire, et sa vulnérabilité la rendit tout de suite plus sympathique à ses yeux. En voyant cette femme si préoccupée par le devenir de son enfant, elle sut que les vampires n’étaient pas si différents des humains que cela, et elle devina pourquoi, dans le passé, elle avait choisi de les soutenir.
- On ne tue pas les enfants, Madame Valrose ! On cherche une autre solution.

 

Jess avait alors vu se dessiner un sourire sur les lèvres de sa sauveuse.
- Mais oui, tu as raison ! Il y a toujours d’autres solutions. 


- Bien sûr qu’il y en a d’autres. Je ne suis pas maman mais, s’il y a une chose dont je suis certaine, c’est que je ne pourrais pas tuer mon bébé. 


Au cours de leurs nombreuses discussions, la jeune femme lui avait aussi appris qu’elle était une reine en mixologie et, qu’avant d’être amnésique, Jess lui donnait même des cours.
Puis elle lui avait raconté la vie des prisonniers humains dans ses cellules et expliqué combien la présence de Jess était nécessaire à leur bien-être car elle apportait de la douceur dans leurs vies, uniquement avec son sourire.

 

Jess avait alors pris la décision de reprendre son rôle de cuisinière auprès de ses semblables et assuré à Madame qu’elle continuerait à apporter ce bien-être qui avait l’air si cher à son cœur, et c’était tout à son honneur.
- Je me sens peut-être un peu patraque à cause de mon cou mais vos prisonniers seront aux petits soins avec moi.
- Je savais qu’on se comprendrait, Jess. Nous nous sommes toujours comprises. Et mon but est d’adoucir le calvaire de ces personnes.


Madame Valrose lui avait aussi signifié qu’elle ne pouvait pas appeler les prisonniers par leurs noms. C’était beaucoup trop compliqué pour elle, car elle ne voulait pas s’attacher. Alors, elle leur avait donné des numéros et demanda à Jess de les nommer, elle aussi, ainsi.
- Aucun problème, Madame. Je comprends bien que ce doit déjà être assez dur comme ça lorsque vous devez vous en séparer. Ce sera sûrement pareil pour moi, alors je vais suivre votre conseil. En plus ce n’est pas toujours facile de se rappeler les noms de tout le monde. 

 

En réalité, Jess se trouvait être quelqu’un ayant naturellement une bonne composition, et elle voulait faire plaisir à Madame. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle sentait que c’était important pour elles deux.


Elle se sentait débitrice à tout jamais envers cette femme si attentionnée avec qui elle faisait même parfois des « soirées pyjama ». Cette femme était vraiment extraordinaire. Si elle ne l’avait pas su, elle n’aurait probablement jamais deviné qu’elle était un vampire.


C’est au cours d’une de leurs soirées « pyjama » que Madame Valrose lui apprit ce qui s’était passé le mois dernier, juste avant son amnésie. 


Les humains qui en avaient après elle et son combat pour la race vampire, avaient fini par suivre ses traces à Forgotten Hollow, sans savoir qu’ils ne pourraient plus en sortir. Deux d’entre eux l’avaient attrapée et attaquée à coup de seringue amnésiante pour faire croire à une attaque de vampires.


- Une seringue amnésiante ?
- Ce sont des seringues à doubles têtes qui imitent les canines de vampire et qui ont pour effet d’annihiler les souvenirs de ceux qui sont touchés.


- Et c’est pour ça que je n’ai plus aucun souvenir ?
- On va tout faire pour que tu les retrouves. Et si ce n’est pas le cas, tu t’en créeras de plus beaux encore.


Jess, bouleversée, voulut alors changer de sujet. Elle demanda à Madame Valrose de lui reparler de son bébé et de cette fameuse et injuste Tradition. Elle sentait que cela lui faisait du bien de parler de sa fille.

 

Elle en parlait même très souvent.
- Et qu’allez-vous faire si elle est humaine ? Qu’allez-vous faire ?
- J’ai ma petite idée... mais ma fille ne souffrira pas.


- Quel genre d’idée, Madame ?
- Une idée qui ne regarde que moi pour le moment, Jess... Mais je t’en ferai part en temps voulu.
- Pourquoi m’appelez-vous toujours Jess, Madame Valrose ? 


- Mais parce que tu t’appelles Jess ! C’est toi qui m’as dit que tu t’appelais ainsi.


- J’ai dû me tromper. Ne me demandez pas pourquoi mais je sens qu’il y avait un « i » dans mon prénom. Je dois m’appeler Jessie. J’en suis presque sûre.
- Et bien, soit. Je t’appellerai Jessie.


- Madame...
Jessie avait prononcé ce mot timidement.
- Croyez-vous que ces mauvais humains qui en ont après moi pourraient à nouveau me faire du mal et enlever les souvenirs que j’ai de vous ?
- Non, Jessie. Ils ne le pourront plus. Nous nous sommes occupés d’eux.


- « occupés d’eux » comme « vraiment disparus » ?
- C’est exactement ça.


Madame Valrose était vraiment unique. Elle l’avait sauvée à deux reprises des griffes de ces humains malfaisants qui n’entendaient rien à la cause des vampires et voulaient les anéantir coûte que coûte, quitte à sacrifier une des leurs comme Jessie.


Alors Jessie devait la remercier. Elle savait ce qu’elle devait faire. Elle alla la trouver, une nuit, et lui jura loyauté et fidélité. Elle désirait plus que tout que les vampires puissent, eux aussi, avoir une vie heureuse, une vie qui ne soit pas entravée par les actions malfaisantes d’humains malveillants.
Elle continuerait donc le combat qu’elle avait mené jusque-là, même si elle ne s’en souvenait pas encore. Mais Madame Valrose en valait la peine, elle le sentait.

 

A suivre 🙂

 

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Re: [VDC] **Cendre et la Vallée Oubliée** màj 06/07/24 - Chap12

★★ Guide

 

Chapitre 12 -  Impitoyable Tradition


 

2025. Que de temps avait passé depuis ce jour de 2020 où Cendre était arrivée dans la Vallée Oubliée et avait frappé, blessée, à la porte de Caleb et Lilith.
Mais elle s’en était bien sortie, la petite Cendre.

Révélation

Voilà deux ans et demi qu’Amandine était née et, presqu’autant qu’elle avait ôté ses souvenirs à Jess, ou plus exactement à Jessie, pour lui inventer une nouvelle vie. Et ça fonctionnait plutôt bien.


Jessie avait redécouvert qu’elle savait cuisiner mais qu’elle n’aimait pas la viande. Pourtant, ça ne l’empêchait toujours pas d’en cuisiner pour les prisonniers, comme avant.
Elle restait égale à elle-même, enjouée, serviable et proche des autres, telle que Cendre l’avait connue au début.


Mais, à la différence de son ancienne vie, elle soutenait maintenant sa maîtresse à cent pour cent, tout en continuant à s’entretenir gaiement avec ses prisonniers.
Elle avait même demandé à Cendre une tenue de servante pour aller leur donner à manger.
« Ils verront tout de suite que je ne suis pas de leur côté, comme ça ! ». C’était discutable mais c’était la logique de Jessie, et Cendre avait bien ri avant de lui accorder cette faveur. C’est Bella qui lui dégota une tenue de servante ainsi que d’autres vêtements. 


Oui, Jessie prenait son rôle très au sérieux et veillait au bien-être quotidien des prisonniers. Elle avait même entrepris de faire le ménage dans leurs cellules, tâche que Cendre avait toujours rechigné à faire. Une vraie fée du logis.


Elle s’occupait aussi régulièrement d’Amandine lorsque Dirk vaquait à « d’autres occupations » importantes, et elle ne manquait jamais de raconter à Madame, les derniers sourires de sa fille.


Cendre ne s’inquiétait pas. Elle allait régulièrement s’assurer que la cohabitation entre Dirk et sa fille se passait bien et elle savait depuis très longtemps que la star mondiale s’était découvert une passion pour ce petit être qu’ils avaient en commun.


Et cela avait d’autant plus de valeur que Dirk ne se savait pas observé. Elle aurait tellement voulu être à sa place, et pouvoir tenir leur fille, qu’elle aimait tant, dans ses bras.
Mais la Tradition était implacable et elle ne devait pas faillir.

 

Deux ans et demi... Que le temps passait vite ! Voilà bien longtemps que Cendre avait pris la décision d’enlever tout l’ail qui servait de décoration à la maison de Lestat (un an, peut-être deux...). Peut-être lui en voudrait-il un jour mais elle n’avait pas eu d’autre choix pour continuer à venir le voir régulièrement, et avec tout cet ail, elle aurait pu mourir.


Elle avait aussi pris la décision d’enterrer la pauvre victime de Lestat dans son jardin. L’urne ne pouvait pas rester indéfiniment au milieu de son salon... 


Elle allait le voir tellement souvent son Lucas. Les vapeurs violettes qui sortaient de son cercueil la rassuraient chaque fois, et elle lui racontait alors sa vie : le Comte, Jess, devenue Jessie, ses amis Lilith et Caleb ou encore Francis et Bella, et les prisonniers. Et puis surtout, Amandine.

 

Deux ans et demi. Cendre avait adoré ce jour où Jessie s’était souvenu d’avoir des talents de mixologue. Elle paraissait tellement heureuse. 


- Je crois que je m’en rappelle, Madame ! Je m’en souviens même très bien ! Mes souvenirs vont revenir, je le sens !
- Ne te l’avais-je pas dit, Jessie ?
Cendre savait pourtant que ses souvenirs principaux ne reviendraient pas, ceux qui concernaient directement les personnes qu’elle avait connues, à moins qu’elle-même ne les lui rende. Et tant mieux ! C’était un tel plaisir de la voir ainsi que son amnésie en valait la peine.


Deux ans et demi... Il était grand temps pour Cendre d’envisager sérieusement l’avenir d’Amandine, qu’elle soit vampire ou humaine.


Cette nuit-là, elle avait retrouvé son amie Bella à l’entrée des catacombes.


Les deux femmes s’étaient alors entendues sur un sujet qui ne concernaient qu’elles, un secret qui ne devrait jamais être révélé. Cendre savait qu’elle prenait des risques mais elle avait décidé de tout miser sur Bella.


Son amie avait d’ailleurs voulu s’assurer qu’elle ne divaguait pas et lui avait fait répéter trois fois ce qu’elle venait dire. Elle non plus ne voulait pas prendre de risque, et les risques allaient être énormes dans cette affaire. 


Lorsque Bella eut la garantie que le marché serait honnête, et aussi dangereux pour elle que pour sa maîtresse, elle en accepta toutes les conditions. 

 

- Personne ne le saura jamais, n’est-ce pas ?
- Bella... Tu viens de dire oui et si tu l’as dit, c’est que tu as confiance en moi. Alors non, personne ne le saura jamais.



Personne, sauf peut-être Lestat, car Cendre alla lui confier leur petit secret, une décision bien inoffensive après tout puisque Lucas ne pourrait rapporter les termes de cet accord interdit à personne.


Six mois plus tard, février 2026...

Numéro douze s’en alla suivi de près par numéro dix. Alors qu’ils s’éteignirent d’épuisement, comme tous les autres, seule numéro onze résistait encore. 

Révélation
Pour rappel : Numéro dix, c’est Eliza Pancakes et numéro onze Dina Caliente

Ce même jour, Jessie réveilla sa maîtresse.
Elle pouvait dorénavant circuler librement dans les appartements de Madame mais avait interdiction de se rendre au-delà de la chapelle sous peine d’être confrontée à des vampires affamés.


- Votre fille a trois ans aujourd’hui, Madame ! C’est pour cela que je me suis permise de vous réveiller.


Cendre avait tenu à être auprès de sa fille ce jour-là et Jessie le savait. La petite Amandine était mignonne comme tout, avec les yeux clairs de sa mère et les cheveux crépus de son père mais... elle était humaine.
Cendre devrait se séparer d’elle. La vie n’était pas toujours facile et l’éternité encore moins. 

 

Jessie était abasourdie. Après toutes ces discussions qu’elles avaient eues toutes les deux, et durant lesquelles Madame se dévoilait attachée à sa fille, elle allait quand même mettre fin à la vie de sa fille ! Elle n’en croyait pas ses oreilles.


Pourtant, elle avait bien vu ce baiser que sa maîtresse avait déposé sur le front d’Amandine, ce signe d’infinie tendresse qui lui avait fait espérer que l’avenir de la petite fille serait tout autre et que la Tradition irait au diable.

 

Mais Madame avait déposé la bambinette en lui disant :
- Je dois te dire au revoir, je n’ai pas le choix.
Et Jessie avait préféré quitter la pièce pour ne pas vivre les minutes qui allaient suivre.


Mais les minutes qui suivirent furent bien silencieuses et Jessie n’entendit rien depuis sa chambre.
Cendre regarda tristement la petite Amandine :
- Mais avant de te dire au revoir, nous allons nous promener, toi et moi.
Et Cendre fit ce qu’il y avait à faire.


Jessie, elle, s’effondra sur son lit, recroquevillée comme un fœtus. Madame avait dû trouver une solution pour ne pas faire souffrir la petite mais comment avait-elle pu accepter la Tradition et être si insensible ?
Elle avait pourtant cru en elle, et en sa capacité à pouvoir faire vivre son enfant.

 

Elle y avait tellement cru... La petite Amandine... Elle l’avait serrée dans ses bras... et elle-même, simple servante, l’aimait déjà comme sa fille. Pourquoi ces maudites traditions vampiriques existaient-elles ? 


Quelques heures après l’anniversaire de sa fille, lorsque la nuit tomba, Cendre passa beaucoup de temps à arranger un endroit agréable afin de se souvenir d’Amandine.


Puis elle s’était occupée de donner une sépulture à numéros dix et douze, l’anniversaire de sa fille ne lui ayant pas permis de s’en soucier avant.


Vladislaus s’était alors invité dans la chapelle, et elle avait dû contrôler une impulsion qui lui dictait de lui envoyer son poing dans la figure. Mais elle devait donner le change car elle sentait que le comte la gardait à l’œil... 

 

Alors, elle l’avait invité à déguster un Yorkshields de seize ans d’âge et ils firent la causette comme si de rien n’était ou presque... car Cendre avait dû lui assurer, avec le sourire, que la disparition de sa fille ne lui faisait ni chaud, ni froid. Une bonne gorgée de nectar, ça oui, ça lui ferait du bien.


- Oh, vous savez, vous m’avez préparée à ce qui allait arriver. Et puis, je ne connaissais pas cette enfant. Je l’ai laissée à son père pendant trois ans. Elle ne représente rien pour moi.


- Je dois admettre que vous me ravissez. Vous êtes décidément la plus compétente pour devenir ma grande maîtresse vampire. Je ne m’étais pas trompé à votre sujet.
- Vous me flattez mais je n’en suis pas encore là. Souvenez-vous que je dois devenir maîtresse vampire d’abord. Et ça fait trois ans que je suis vampire majeure. Je stagne, mon cher.


- Vous devriez reprendre les combats avec Monsieur Vatore. Il m’a fait savoir que vous ne vous entrainiez pas beaucoup. Utilisez-vous vos pouvoirs, au moins ?
- Bien sûr, je fais de mon mieux, Vladi. Nous avons l’éternité, non ?


- Tout à fait. Il n’y a aucune date butoir. Rien ne presse et vous semblez gérer à merveille.
- Alors, vous ne serez pas déçu, mon ami. 


Lorsqu’il partit, Cendre sentit la rage monter en elle. 


Une rage si forte qu’elle para instinctivement sa forme sombre. Comment avait-il osé venir la déranger alors qu’elle faisait le deuil de son enfant ? Et qui était le responsable de tout ça ? 


Cendre déploya ses ailes de chauve-souris et vola jusqu’à la cellule de Dirk. 


Elle se jeta alors sans prévenir sur la seule personne responsable de sa tristesse, cet incapable qui n’avait pas été apte à lui donner un petit vampire. 


C’était bien la peine de faire le beau et de se sentir supérieur aux autres.
Voilà presque quatre ans qu’elle le supportait et elle se fit plaisir en vengeant l’affront qu’il avait un jour fait subir à Jessie en la traitant de moins que rien. 


« Adieu Dirk Dreamer. Repose en paix au paradis des stars. Justice a été faite et Amandine ne méritait pas un père tel que toi, de toute façon. »


Lorsque la Faucheuse en eut fini avec la célébrité, Cendre sentit des larmes couler le long de ses joues.


Des larmes qui n’étaient pas destinées à Dirk, mais à sa fille qu’elle ne reverrait plus.
Elle devait se ressaisir avant que Jessie ne la voit dans cet état. Ce n’était pas digne d’une maîtresse.


Mais c’était trop tard. Malgré sa propre peine, Jessie était venue vers Cendre.
- Qu’y a-t-il, Madame ? C’est Amandine, n’est-ce pas ? Vous avez l’air aussi triste que moi.


Cendre s’ingénia à rassurer sa servante.
- Je ne pouvais pas faire autrement. La communauté vampire a les yeux rivés sur moi et, au moindre faux pas, je grille sur la place publique... et toi, Jessie... toi, tu seras donnée en pâture à des vampires assoiffés. Je ne pouvais pas faire autrement. 


Jessie avait compris. Elle savait que Madame n’avait pas eu d’autre choix que se plier à la Tradition, et elle voyait bien que celle-ci en avait le cœur anéanti. Elle lui était reconnaissante d’avoir voulu la protéger, elle, une simple servante.
Alors ce serait elle, Jessie, qui soutiendrait sa maîtresse face aux dures décisions qu’elle aurait à prendre. Elle savait que Madame n’était pas mauvaise. 

 

Jessie s’était alors retirée à la demande de Cendre qui avait besoin de rester seule avec ses pensées, de tristes pensées dont elle voulait se libérer.


Elle se rendit chez Lucas. Il était la seule personne à qui elle aurait voulu confier son désarroi et elle reprit forme humaine pour approcher de son cercueil.


- J’ai perdu ma fille aujourd’hui, Lucas. Est-ce que la vie va ainsi longtemps me priver des êtres que j’aime le plus au monde ? 


- Comment as-tu fait ? Tu as élevé toi-même ta fille humaine jusqu’à l’âge de quatre-vingt-dix ans ? Lucas... je ne suis pas digne de toi.


Sa voix s’insinua dans les pensées de Cendre :
- Mon amour... Ta décision a été la bonne... Tu prends les justes décisions... Fie-toi à ton jugement... tu ne le regretteras pas. 


C’était la deuxième fois en plus de quatre ans qu’elle entendait la voix de Lucas et, sous l’exaltation du moment, sa forme sombre réapparut.


Lestat le sanguinaire, son Unique amour, lui avait parlé et, grâce à lui, elle savait qu’elle avait fait le bon choix. Il fallait continuer et sa descendance devait voir le jour. Et il était indispensable qu’elle s’y mette sérieusement.

 

A suivre 🙂

 

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Re: [VDC] **Cendre et la Vallée Oubliée** màj 06/07/24 - Chap13

★★ Guide

 

Chapitre 13 - Générations humaines


 

Fin 2034... Cendre avait déjà mis au monde cinq enfants dont les trois premiers, des filles, avaient rapidement dévoilé leurs natures humaines dès l’âge de trois ans, de tout petits êtres fragiles qu’elle ne souhaitait pas oublier et auxquels elle allait rendre visite chaque nuit. Ne pas les oublier... Surtout ne pas les oublier...

Révélation

Sa première fille, Amandine, lui avait été donnée par Dirk Dreamer, une célébrité mondiale à l’égo surdimensionné. La deuxième, Hortense, était née en 2026, de sa folle nuit avec un certain Izzy Fabulous, un maigrichon soi-disant connu, lui aussi, (décidément !) mais dont elle n’avait jamais entendu parler, et pour cause, elle avait laissé son humanité depuis sept ans déjà, à l’époque. Folle nuit, disait-on donc, et précipitations le jour de l’accouchement où Cendre n’eut même pas le temps de reprendre forme humaine. 


Elle n’avait d’autre objectif qu’assurer sa descendance, et elle voulait le faire vite. Pourtant, elle perdait chaque fois du temps car elle devait attendre trois ans pour savoir si sa progéniture deviendrait un vampire. Trois longues années perdues à chaque tentative... Et pourtant, elle y avait cru, avec Akira Kibo, un sim lambda, sain de corps et d’esprit, et fort sympathique.

 

Une troisième petite fille était née de leur union, en 2030, une petite Violette qui s’avéra, elle aussi, être humaine lorsque ses trois ans furent atteints. Cendre commençait à se désoler de n’avoir pas encore eu de descendance et se navrait de devoir chaque fois se séparer de ses enfants.


Quelques mois après les trois ans de Violette, Cendre fit la connaissance de Jeb Harris, un jeune homme tout juste sorti de l’adolescence et qui avait un sac en papier sur la tête. Il lui expliqua, que là d’où il venait, c’était chose courante lorsque quelqu’un faisait une mauvaise action. Il lui plut tout de suite, alors même qu’elle n’avait pas encore entrevu son visage. C’était un homme simple et bienveillant, bien qu’il se dégageât parfois de lui une certaine morosité.


Le jeune homme n’avait pas pris peur lorsqu’elle lui fit voir qui elle était, au contraire. Cela lui était égal de vivre dans une cellule tant qu’il n’avait plus de sac sur la tête. Il trouvait qu’il était bien traité et fut tout ému le jour où Cendre accoucha de leurs bébés !


Jeb lui avait donné deux bébés, des jumeaux qui braillaient de concert. Elle ne s’était pas du tout attendu à cela, une fille et un garçon. Son premier garçon... il serait peut-être sa chance, son petit vampire, puisque les filles n’avaient rien donné jusque-là.


Jessie avait émis le souhait de ne plus s’occuper des bébés de sa maîtresse car elle trouvait de plus en plus dur de les voir disparaître à l’âge de trois ans.
Cendre demanda alors sincèrement à Jeb s’il se sentait capable de s’occuper seul des jumeaux dans sa cellule. Jeb était aux anges. C’était la plus belle chose qui pouvait lui arriver et il accepta tout de suite.


Entre chacune de ses grossesses, Cendre reprenait les entraînements au combat avec Caleb car ceux-ci lui permettaient de se défouler et d’oublier qu’elle laissait ses enfants à la charge de quelqu’un d’autre. De plus, elle ne perdait pas de vue que son but, avant de devenir grande maîtresse vampire, était d’atteindre le rang de maîtresse vampire, et elle voulait s’en donner les moyens. Elle n’avait que trop traîné jusque-là.

 

Parfois, elle perdait et parfois elle gagnait mais ce n’était pas suffisant car elle devait vaincre trois vampires au combat avant de devenir maîtresse vampire. Ces entraînements n’étaient plus suffisants et elle finissait pas se dire qu’elle n’atteindrait jamais son nouveau rang de vampire. 


Avant qu’elle ne croise la route de Jeb Harris, elle fit appel au vidame de Montsimpa. Car elle le savait fort et puissant et, surtout, elle soupçonnait Caleb de la laisser parfois gagner. Le Vidame ne semblait pourtant pas partager son avis.
- Nous allons vérifier tout de suite si vos soupçons sont fondés, Cendre, mais je ne pense pas que Monsieur Vatore vous fasse de cadeaux. C’est quelqu’un d’intègre.


- C’est justement ce dont je veux être sûre. Ne soyez pas tendre avec moi. Je veux un vrai combat.
- Je ne compte pas l’être. Préparez-vous, jeune fille. 


lls s’étaient alors élancés l’un contre l’autre et la puissance du vidame était telle qu’elle sentit immédiatement qu’elle n’aurait pas le dessus. Caleb s’était donc joué d’elle. Elle en était intimement convaincue.


Le vidame la rassura.
- Monsieur Vatore est bien loin d’avoir tous les pouvoirs que je possède, ni les vôtres, mon amie. C’est pour cela que vous réussissez à le vaincre, pas parce qu’il vous laisse gagner. Cessez donc de le croire votre ennemi et ne vous en faites pas, je sens que votre puissance est en train de croître.


- Merci de vos paroles, Timothée. Grâce à vous, je garde espoir.
- Ce ne sont pas de simples paroles. Laissez-moi vous entraîner et vous verrez.


Puis Cendre avait rencontré Jeb Harris près du pont et il n’avait plus été question de combat pendant neuf mois et même plus...


Cendre trouvait qu’elle tardait à mettre au monde ses petits vampires et, alors qu’elle avait regarni son garde-manger depuis plusieurs années, après le décès de Dirk, et que numéro onze était toujours là, ce fut numéro quinze qui lui suggéra une nouvelle approche de sa descendance.


Numéro quinze, alias Catarina Lynx, conseilla à Cendre de se servir du seul homme qui se trouvait dans ses cellules.


Cendre fut d’abord surprise mais elle comprit vite que numéro quinze lui servait ses conseils en espérant avoir ses grâces.
- Tu penses donc que je devrais utiliser numéro quatorze comme géniteur ? Et pourquoi ça ?


- Pour éviter de perdre tu temps. Vos bébés naissent et, chaque fois vous attendez plusieurs années, trois ans je crois, avant d’être enceinte à nouveau. J’avoue que je ne sais pas quelles sont vos raisons, mais pourquoi patienter tant de temps alors que vous pourriez mettre en route une nouvelle grossesse tout en attendant les trois ans de la précédente ?


- C’est une idée très intéressante, numéro quinze.
- Me feriez-vous une faveur pour ce conseil ?
- Et quelle faveur, dis-moi ?
- J’aimerais devenir votre servante, comme Jessie.


- J’ai bien peur que ce ne soit impossible. Je n’ai pas besoin de deux servantes, et Jessie compte trop à mes yeux pour que j’envisage de m’en séparer. Quant à toi, il me serait difficile de prendre à mon service une personne capable d’aussi peu d’égards envers ses compagnons d’infortune... 


Cendre se débarrassa alors de numéro quinze, dont elle jugeait le comportement intolérable et se dirigea vers la cellule voisine, celle de numéro quatorze. L’homme, qui frisait la quarantaine, semblait blasé. Il s’attendait à servir de repas à la belle vampire une fois encore. Mais cette fois-là fut différente :
- Dis-moi, quel est ton nom, déjà ?


Il la regarda, un instant étonné, avant de lui répondre :
- Je m’appelle Salim Benali, Madame.


 

Elle l’avait alors invité à s’asseoir à ses côtés.
- Salim, que dirais-tu de rejoindre mes géniteurs ? Tu n’es pas sans savoir que mes prisonniers géniteurs sont mieux traités que ceux qui résident dans mon garde-manger, n’est-ce pas ?


L’homme s’était alors levé, retrouvant dynamisme et espoir.
- Bien sûr. Nous savons tous ici que vous voulez une descendance et que vos géniteurs repartent vivants avec leur enfant quand il a atteint ses trois ans.


Cendre était estomaquée. Il avait dû mal comprendre, c’est certain. Le bouche à oreille dans les cellules ne semblait pas être au point ou alors... Jessie... Il faudrait qu’elle lui parle.


En tous cas, elle ne détrompa pas l’homme et ils convinrent tous les deux qu’il serait son nouveau géniteur. Puis elle se retira et le laissa se reposer jusqu’au lendemain.


Salim était aux anges. Finie cette vie de misère et finies les ponctions inopinées de plasma ! Il deviendrait un géniteur et sa vie allait être bien différente. Il n’aurait qu’à s’occuper de son fils et, dans trois ans, il quitterait les lieux avec lui. Après tout, il avait toujours voulu un fils même s’il n’avait jamais trouvé la femme idéale pour le lui donner. Et Madame Valrose était, il faut bien le reconnaître, une superbe femme.

 

Cendre avait décidé qu’elle n’userait pas de ses charmes vampiriques avec Salim car celui-ci était consentant, et elle désirait qu’il le restât.
Elle avait alors convié Jessie à se joindre à eux en tant que mixologue de service et celle-ci, pour l’occasion avait revêtu son ancienne tenue de travail.
Quitte à se reproduire, Cendre avait décidé de passer une bonne soirée.


Salim était heureux. Il sentait que sa soirée avec la belle vampire s’annonçait sulfureuse, à commencer par sa belle robe rouge et ce nectar délicieux qu’elle lui proposa. Sa vie allait changer, c’était certain.

 

La belle dame avait fini par congédier Jessie et ils s’étaient retrouvés seuls à discuter d’art et de créativité. Cendre Valrose était peintre et cela lui plaisait beaucoup. 

Cendre, quant à elle, appréciait de pouvoir parler peinture et littérature avec un homme aussi cultivé que Salim. Elle imaginait déjà un futur petit vampire ayant les mêmes passions qu’elle.

 

Elle le laissa donc faire lorsqu’il s’enhardit à poser sa main sur la sienne. L’homme s’y connaissait manifestement en matière de séduction. 


Il s’était alors levé, toujours en lui tenant les mains et Cendre sut qu’elle aboutirait au résultat qu’elle attendait de lui, en ayant cerise sur le gâteau, passé une soirée des plus agréables.


Elle ne fut pas déçue car la suite de la soirée fut au-delà de ses attentes. 


Malheureusement, après plusieurs séances de cracottes, Salim fut tout de même reconduit dans sa cellule. Il ne comprenait pas... Il avait pourtant fait ce qu’il fallait... Mais il dut finalement reconnaître qu’il avait certainement manqué de jugement et qu’il finirait comme nourriture malgré tout.


Les intentions de Cendre étaient pourtant toutes autres. En deux jours, elle fit construire, avec l’aide de son maître d’œuvre et des ouvriers des catacombes, la nouvelle et deuxième cellule pour géniteur et y déménagea Jeb et les jumeaux.


Jeb fut égal à lui-même sur les changements qui s’opéraient dans sa vie et dans celle de ses enfants, et il exprima que la nouvelle cellule était parfaite, même si elle se trouvait être plus petite que la précédente. Son enthousiasme n’avait aucune faille. Seul le bien-être des bébés comptait pour lui, et Cendre le remerciait chaque fois, intérieurement, de lui faciliter les choses à ce point-là. 


Salim rejoignit donc ses nouveaux quartiers lorsqu’elle se fut assuré (au bout de cinq mois) qu’une grossesse était en route, et Salim avait du mal à dissimuler sa joie, tant il semblait satisfait de changer de statut.
- Je pensais que vous m’aviez oublié... Et pourtant, vous ne buviez plus mon plasma... Alors j’espérais tout de même.
- Tu as bien fait. Je n’ai pas pour habitude d’édulcorer la situation de mes prisonniers.
- Merci pour votre honnêteté, Madame Valrose.
- Tu sais donc que tu resteras dans cette cellule au moins jusqu’à la naissance du bébé.
- Oui Madame, je le sais.

 

Ces cinq mois avaient été très prenants. Le Comte, les Vatore, Francis et Bella venaient souvent lui rendre visite, alors qu’elle-même ne sortait plus de la chapelle et de sa crypte, hormis pour se rendre de l’autre côté de la place et parler à Lucas. Les visites qui la comblaient le plus étaient celles de Bella. Bella, qui avait retrouvé le sourire et dont la morosité ne s’affichait plus sur le visage. Bella semblait tellement heureuse que Cendre ne pouvait qu’être heureuse, elle aussi. Et chaque fois que son amie lui racontait une des aventures palpitantes de sa vie, Cendre se voyait fondre comme un vampire au soleil.


Au début de sa grossesse, alors qu’elle le pouvait encore, elle poursuivit ses entraînements avec le Vidame de Montsimpa mais au bout de quatre mois, il lui fallut arrêter et Cendre reprit sérieusement ses cours de mixologie auprès de Jessie, grâce à laquelle elle progressait un peu plus à chaque leçon. Un jour, elle en profita pour lui poser la question qui la taraudait depuis son premier entretien avec Salim.
- Dis-moi, serait-ce toi qui fait courir le bruit que mes géniteurs repartent vivants de chez moi avec leur enfant ?
- Oui, dit-elle simplement.

 

- J’ai pensé que ce serait bien de leur donner un peu d’espoir. C’est quand même mieux que de leur dire ce qui arrive réellement à ces bambins et à leurs pères, non ?
- Ton idée n’est pas mauvaise, c’est certain mais, à l’avenir, j’aimerais que tu me consultes avant d’inventer ce genre de choses.


- Je vous le promets, Madame ! Il se trouve que j’ai été prise au dépourvu avec leurs questions. Il m’a fallu improviser.
- La prochaine fois que tu te retrouves dans ce genre de situation, dis que tu ne sais pas. Ce sera plus simple.


Cette année-là, trois mois avant les trois ans des jumeaux, et après ses nombreuses incursions en la demeure de Cendre, le Comte débarqua un soir, exigeant de rencontrer ses bébés. Il était persuadé que l’un des deux serait immanquablement un vampire et il tenait à le rencontrer.
- Le mâle... Il va être le premier de votre descendance, j’en ai la certitude, ma chère. Ce sera un bon petit vampire.


 

- C’est pour cette raison que vous avez tenu à les voir ? Pour vous assurer que l’un d’eux serait un vampire ? Parce que depuis la naissance de ma première née, je ne vous ai pas beaucoup vu par ici...
- Vous avez déjà échoué trois fois ma chère mais là, je garde espoir car ils sont deux mais aussi parce que je constate que vous n’abandonnez pas. Preuve en est que vous êtes enceinte à nouveau.


Jeb s’était retiré derrière l’espace sanitaire car le Comte l’impressionnait beaucoup trop mais, l’air de rien, il suivait de près la conversation tendue qui concernait ses enfants.
- Bien sûr que je n’abandonne pas. Ma descendance est ma priorité. Ne me dites pas que vous en doutiez.


- Non, évidemment. Mais tous les humains auxquels vous avez donné naissance ne présagent rien de bon. Et les présages, chez les vampires, sont légion. Alors, je voulais m’assurer que vous ne baissiez pas les bras.
- Je ne les baisse pas. J’aurai ma descendance. Renseignez-vous auprès de vos ouailles. J’ai fait construire de nouvelles pièces au deuxième sous-sol pour accueillir mes six petits vampires.


- J’ai visité votre deuxième sous-sol. J’ai vu aussi que vous aviez prévu un salon dans la crypte. C’est une idée fort sympathique.
- Je vous remercie. J’envisage cet endroit comme le lieu où nous nous réunirons, mes descendants et moi. Mais il n’est pas encore meublé.


C’est parfait. En attendant, allez dans votre garde-manger. Avec le départ de votre numéro quatorze, j’ai pensé qu’il serait bienvenu pour vous d’avoir votre numéro dix-huit. J’espère que votre repas vous plaira.


Numéro dix-huit venait d’entrer dans les cellules de Cendre. Elle s’appelait Moira Fyres et ne semblait pas en pleine santé. Vladi n’avait pas forcément fait le bon choix en lui ramenant cette femme fragile, et elle décida de la laisser en paix pour le moment.


Trois mois plus tard...

Caleb, Jessie et Jeb étaient réunis autour de Cendre pour le grand jour, les trois ans des jumeaux.
Tous espéraient qu’au moins l’un des deux devienne un vampire, et Caleb se voulut rassurant :
- Ne t’en fais pas, ça va aller. 


Le moment de vérité... Samuel et Isaure allaient grandir... Elle les regarda dormir paisiblement, loin des doutes qui la submergeaient, elle, leur mère... Dans un instant, ils allaient se réveiller et devenir de petits bambins... Il fallait qu’au moins un des deux soit un vampire, il le fallait... Cendre retint son souffle.

 

 

A suivre 🙂

 

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Re: [VDC] **Cendre et la Vallée Oubliée** màj 06/07/24 - Chap14

[ modifié ]
★★ Guide

 

Chapitre 14 - Du changement dans la crypte


 

Cendre avait du mal à réaliser. Samuel et Isaure allaient pouvoir rester avec elle ! Les deux bambins étaient des petits vampires. De merveilleux petits vampires, ses petits vampires, à elle !

Révélation

Jessie était rayonnante. Elle savait que sa maîtresse aurait besoin d’elle pour s’occuper des deux bambinous et cela l’emplissait de joie. Et pour une fois, les petits ne quitteraient pas la chapelle pour ne plus y revenir.
- Je suis tellement heureuse, Madame ! Tellement !
Caleb, quant à lui, ne disait rien. Il semblait heureux lui aussi mais son regard ne se portait pas sur les jumeaux.


Sur ordre de Cendre, Jessie emmena les jumeaux et se chargea de les faire manger, de prendre leurs bains et de les amuser.
Cendre désirait rester seule avec Jeb.
- Ils sont magnifiques, vous ne trouverez pas ?


Elle regarda alors cet homme qui lui avait donné les deux premiers enfants de sa descendance, cet homme qu’elle ne savait pas encore comment remercier alors qu’il lui avait fait un cadeau inestimable.
- Jeb..., commença-t-elle


Il l’interrompit :
- Je sais, Madame Valrose. Je viens de passer les trois plus merveilleuses années de ma vie avec Samuel et Isaure et vous allez me les enlever... Puis, vous me tuerez, n’est-ce pas ?


- Tu te trompes. Je n’ai aucune envie de tuer, vraiment aucune.
- Mais votre tradition ? Nos deux enfants sont des vampires...
- Je vais réfléchir à une autre solution. Fais-moi confiance.


Ce même jour, Cendre avait convoqué Nathan Livinghell de toute urgence et l’avait reçu dans ses appartements. Nathan était le maître d’œuvre de la chapelle et de la crypte et rien ne lui faisait peur :
- Deux chambres de bambins et un salon ? Je vous finis ça en deux jours !
- Deux jours ? Tu ne crains pas d’épuiser tes ouvriers à la tâche ?

 

- Les vampires ne s’épuisent jamais à la tâche, mais on peut faire ça en trois jours, si vous préférez, Madame Valrose.
Cendre sentit que l’homme avait détecté une faiblesse chez elle, faiblesse qu’il lui fallait absolument démentir.


- Non. Deux jours, c’est parfait. Si tu m’assures que les ouvriers ne seront pas suffisamment fatigués pour accomplir un travail parfait, parce je veux un travail parfait, alors, ça me va.


Elle avait de toute évidence convaincu son maître d’œuvre.
- Je vous le garantis. Et dans deux jours, vous aurez ce que vous voulez, Maîtresse.
- C’est une très bonne nouvelle. Comme tu l’auras compris, la situation est urgente.
Et elle était vraiment urgente puisque Cendre n’avait prévu aucune chambre pour ses bambins, à part des murs et des pièces dénuées de tout meuble et de tout revêtement de sol ou mural.
L’empressement de Nathan faisait plaisir à voir et elle ne doutait pas que ses ouvriers mettraient encore beaucoup de cœur à l’ouvrage pour contenter leur maîtresse. 


Après avoir congédié son maître d’œuvre, Cendre appela Bella sur son talkie-walkie. 


Les deux femmes s’étaient retrouvées dans sa chambre et Bella lui avait conté les dernières aventures de sa vie, aventures que Cendre écoutaient toujours avec beaucoup d’émotions. Bella semblait plus heureuse maintenant qu’autrefois et cela la ravissait.
- Alors, cette fois, vous gardez les petits auprès de vous ? C’est une merveilleuse nouvelle ! 


- Je n’y croyais plus et c’est enfin arrivé ! Il fallait que je te le dise face à face, je te dois bien ça.
- C’est moi qui vous dois tout. Je suis heureuse de vous voir comblée et, surtout, que vous n’ayez pas à subir une nouvelle fois, une séparation déchirante. 


Les deux femmes échangèrent encore quelques paroles connues d’elles-seules, puis Bella lui annonça qu’elle devait se retirer. Leurs regards devinrent complices. Cendre comprenait.


Elle enlaça son amie avec bonheur et la laissa partir, le cœur lourd. Elle aurait tellement voulu en savoir davantage sur la vie qu’elle menait à présent.


En attendant que Nathan Livinghell aménage les chambres des jumeaux, Cendre avait installé deux lits pour eux dans sa crypte, près de son cercueil. Elle leur lut une histoire et tous finirent par se coucher.


Le lendemain des trois ans des jumeaux, le comte lui rendit visite, les bras chargés de deux gros paquets. Il avait ramené aux enfants une maison de poupée et un coffre rempli de jouets, qu’ils s’empressèrent d’étrenner immédiatement.


Caleb et Lilith, eux aussi, virent gâter les jumeaux en apportant des peluches ; un ours rose pour Isaure et un monstre orange pour Samuel.
Les bambins étaient vraiment contents de leur journée mais Cendre commençait à trouver que le vestibule était de plus en plus encombré.


Heureusement, deux jours plus tard, l’échéance de Nathan avait été tenue et la crypte s’était agrandie de deux chambres et d’un salon.
Les bambins allaient pouvoir enfin profiter d’un espace dédié à leurs activités. 


Cendre passait la majorité de son temps auprès de ses enfants. Elle qui avait grandi sans mère et qui avait été élevée par un père adoptif qui avait commandité sa mort, elle voulait offrir à ses bambins ce qu’il y avait de mieux, et le mieux commençait avec sa présence, à elle.
Isaure pouvait passer des heures à jouer avec la maison de poupée offerte par Vlad.


Et elle aimait beaucoup les histoires que lui racontait sa maman, même si celles-ci faisaient parfois un peu peur.


Isaure venait souvent l’écouter pianoter dans la chapelle et avait toujours un commentaire flatteur pour Cendre :
- Maman, tu zoues cro bien ! 


Mais, avant tout, la bambinette était une petite charmeuse à qui il était difficile de résister, surtout lorsqu’elle roulait des yeux ou employait son plus beau sourire. 


Samuel, lui, était un petit bambin dynamique et, à ses jouets, il préférait de loin la boite à danse de Tonton Caleb. Cendre adorait le regarder hocher la tête au rythme de la musique.


Il ne se passait pas une journée où l’on pouvait croiser le petit coquin dans son plus simple appareil, au détour de l’un des couloirs de la crypte.


Mais ce qu’il affectionnait par-dessus tout, tout comme sa sœur, c’étaient les câlins de sa maman et Cendre n’en était jamais avare. Elle tenait à ce que ses enfant ressentent l’amour qu’elle avait pour eux.


Durant la journée, elle confiait les bambins à Jessie qui les emmenait jouer dehors, car elle était bien consciente que ses petits avaient besoin de prendre l’air.
C’était donc Jessie qui partageait avec eux les promenades en plein jour ou la réalisation d’un bonhomme de neige sous le soleil hivernal, et Cendre avait toujours cette petite pointe de regret lorsque qu’elle les observait tous les trois.


Les jumeaux s’entendaient à merveille et passaient beaucoup de temps dans la chambre l’un de l’autre, à partager des jeux, des babillages et des câlins.


Cendre en était enchantée. Elle n’aurait pu rêver mieux. Qu’est-ce qu’elle les aimait, ces deux-là ! Les moments qu’elle chérissait en leur compagnie, étaient ceux passés durant ces repas de famille qu’elle avait tenu à instaurer chaque soir.
Jessie était toujours de la partie et, heureusement, car cela ne se déroulait pas toujours idéalement. Dans ces moments-là, sa servante parvenait à la calmer, surtout lorsque Samuel le dynamique, jetait sa nourriture sur la moquette.
- C’est la troisième fois, cette semaine ! Franchement, je ne vais pas laisser passer, sinon, il recommencera à chaque fois. C’est intolérable.


Et alors que sa petite sœur (de quelques minutes) s’inquiétait pour lui, Samuel regardait sa mère droit dans les yeux, persuadée qu’elle n’agirait pas contre lui.


- Ce soir, tu seras puni dans ta chambre. Apparemment, tu ne comprends pas lorsque je te dis de ne plus jouer avec la nourriture, alors pas de soirée pour toi aujourd’hui.


- Mais Môman...
- Et il n’y a pas de « mais » qui tienne ! Tu vas aller te coucher. Je n’ai pas envie de passer la soirée avec un petit garçon désobéissant et insolent.


Sa colère n’empêcha cependant pas Cendre de border son fils et de déposer un bai.ser sur son front avant qu’il ne s’endorme.


Quand elle revint au salon, Jessie avait déjà ramassé la nourriture jetée sur le sol et elle avait entrepris de nettoyer la chaise de Samuel. Sa servante était vraiment une perle.


Les soirées au salon étaient toujours empreintes de convivialité et de bonne humeur, et Cendre se demandait comment elle avait pu passer toutes ces années sans entendre rire autour d’elle ou même rire elle-même. Se enfants lui redonnaient le sourire et la force de continuer à assumer son destin. Ils étaient la vie dans la crypte.


Jessie aussi était tellement heureuse que depuis quelques temps, elle s’était mise au tricot.
- « Il fait tellement froid, dehors ! », avait-elle dit. « Au moins, ils auront chaud à la tête vos petits bouts ! ».


Samuel lui manquait ce soir, alors quand elle le vit franchir la porte du salon avec sa petite mine contrite et désolée, implorant de rester avec elle, Cendre n’eut pas le cœur de refuser.


Au contraire, elle le prit dans ses bras et le serra contre elle, en espérant qu’il aurait compris la leçon.


Après avoir couché ses enfants cette nuit-là, Cendre alla boire sur numéro dix-huit. Elle trouvait la femme de plus en plus faible mais elle s’était déjà servi deux fois aujourd’hui sur numéro onze (qu’il lui arrivait parfois d’appeler Dina, il faut dire qu’elle faisait partie des murs, après toutes ces années), alors elle n’avait pas eu le choix... Vlad pouvait se les garder ses cadeaux, à l’avenir. On n’était jamais mieux servi que par soi-même.


Dina Caliente était arrivée dans les cellules de Cendre alors qu’elle n’était qu’une toute jeune adulte. Elle était adulte depuis peu et elle tenait toujours le coup. Elle était là, debout, alors qu’elle avait passé la plus grande partie de sa vie ici.


Cendre lui envoya Nathan Livinghell avec pour ordre de combler les fissures sur les murs et de les repeindre. Il devait également rendre la pièce plus agréable.
- J’ai fait ce que j’ai pu avec le budget que vous m’avez donné. Pourquoi autant d’intérêt pour une humaine ?


Nathan était doué. Il avait peint la cellule de Dina en vert, y avait mis de la moquette au sol, avait accroché quelques affiches et séparé son espace sanitaire avec un paravent.
Cendre, quant à elle, lui avait rapporté quelques livres et un ballon de football, car elle avait su, par Jessie, que numéro onze faisait autrefois beaucoup de sport. 

 

- Numéro onze a le meilleur plasma que je n’ai jamais goûté jusque-là, alors, si j’ai envie de lui rendre la vie un peu plus agréable, j’estime que je n’ai pas à m’en expliquer auprès de toi !
D’ailleurs, sache que si je dois encore justifier mes actes et mes décisions, il se pourrait bien que tu finisses par en payer le prix.
Le bougre s’était finalement platement excusé :
- Bien, Maîtresse. J’espère que vous me pardonnerez ma hardiesse.
- Pour cette fois, oui. Mais c’est la dernière. 


Cendre réalisa, après tout cela, que son garde-manger était très précaire. Entre numéro dix-huit qui paraissait très faible et numéro onze qui déprimait chaque jour un peu plus, Cendre n’avait plus grand-chose à se mettre sous la dent. L’ancienne cellule de Salim Benali était toujours vide et, prise comme elle l’était depuis la naissance des jumeaux, elle n’avait jamais pris le temps de lui trouver un remplaçant.


Alors, il lui avait fallu s’entretenir avec Lucas, le seul qui la comprenait et, malgré les années qui s’écoulaient, il était toujours là et il lui « parlait » de plus en plus :
- Sers-toi de tes géniteurs, ma douce, nourris-toi d’eux... Ils sont aussi source de plasma !


Bien sûr ! Il avait raison. Mais pourtant, elle leur avait promis... enfin, « promis » n’était pas le mot exact. Elle leur avait dit qu’elle ne boirait plus leur plasma. 


Tant pis ! Je deviens trop sentimentale ! Lucas a raison.
Ce soir-là, Cendre se nourrit donc du plasma de Salim et s’en délecta.


Puis elle se rendit dans la cellule de Jeb, qui, égal à lui-même, en vint tout de suite aux faits :
- Alors, ça y est, c’est la fin pour moi ?
- Pas exactement.
- Comment ça ? Vous ne me tuerez pas ?
- Je t’avais dit que je trouverais une autre solution, tu ne t’en rappelles pas ? 


Jeb ébaucha un petit sourire.
- Ne vous en faites pas, Madame Valrose, je connais vos priorités. Dites-moi juste comment vont Samuel et Isaure.


Egal à lui-même, c’est bien ce que Cendre pensait, avec un regard toujours amical et un ton sans animosité.
- Ils sont merveilleux. Samuel joue un peu avec la nourriture et Isaure s’en attriste, mais ils s’aiment et sont si attachants que je peux t’affirmer que nous les avons réussis. 

 

Jeb avait confiance en Madame Valrose. Il sentit à peine qu’elle l’hypnotisait mais, lorsqu’elle s’empara de son cou, il lui sembla que toutes ses douleurs prenaient le large et qu’elles ne reviendraient plus.


Après avoir vidé son esprit de vie, Cendre amorça la transformation du sympathique humain. Elle ne voulait pas le voir tré-passer et il était le premier qu’elle désirait voir libre, le premier qu’elle transformait... et elle espérait que ce serait une réussite car elle ne s’était jamais aventurée dans une telle pratique avant Jeb. Mais elle devait reconnaître qu’il le méritait bien.



Elle réussit à le persuader de boire son propre plasma. Pour une première, elle s’en tirait plutôt bien et elle savait que Jeb ne serait pas seul pour faire face à sa nouvelle vie. Elle avait déjà contacté Francis Caron pour qu’il prenne Jeb sous son aile et lui apprennent les bases et les valeurs d’une existence vampirique. 


Ce soir-là, Cendre rencontra un humain nommé Georges Cahill. Avec ses sourcils bruns et son casque sur la tête, elle n’avait pas soupçonné un instant que cet homme fut un vieil homme... Mais elle n’avait pas le choix, elle ne pouvait pas le laisser fuir. Alors numéro dix-neuf prit place dans le garde-manger. 


Après avoir laissé Cahill dans sa cellule, Cendre se précipita vers celle de Salim. Il était temps pour elle de mettre au monde son petit, et celui-là avait l’air pressé de sortir.
Blanche vint au monde cette nuit-là et Cendre l’abandonna à Salim.
- J’espérais un garçon mais cette petite fille est superbe. Elle sera ma princesse. Je vous promets de bien m’occuper d’elle.



Cendre sortit de la cellule... La douleur l’envahissait, puissante, déchirante... Tout le bonheur que les jumeaux lui apportaient au quotidien n’empêchait pas la souffrance d’une séparation avec un autre de ses enfants... Une souffrance incommensurable.

 

A suivre 🙂

 

 

Bonus : les cinq premiers bambins de Cendre

 

 

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Re: [VDC] **Cendre et la Vallée Oubliée** màj 06/07/24 - Chap15

★★ Guide

 

Chapitre 15 - Une ombre au tableau


 

Cendre s’était rendu compte qu’en méditant auprès du cercueil de Lucas, elle entrait en communication avec lui, comme si leurs esprits étaient intimement liés.

Révélation

Alors, elle y venait de plus en plus souvent, faisait le vide dans sa tête et laissait son Unique accéder à toutes ses pensées. Lestat n’ignorait plus rien d’elle car elle avait mis, en toute confiance, son esprit à nu, pour lui, lui dévoilant ainsi ses joies et ses peines, ses certitudes et ses doutes mais aussi le moindre de ses petits secrets.

 

- Lucas... J’aimerais tellement t’avoir près de moi... Tu me manques.
- Bientôt, ma douce... Lorsque ton destin sera accompli... je viendrai.


Le temps s’écoulait tranquillement dans la petite communauté vampire ainsi que dans la chapelle.
Cendre avait tout de même remarqué que depuis quelques temps, Caleb passait plus de temps chez elle qu’à son propre domicile.


Mais ce n’était apparemment pas pour lui faire la conversation puisqu’il lui préférait la compagnie de Jessie. Il trouvait toujours un prétexte pour aller lui parler, qu’elle soit occupée en cuisine ou à l’éducation des enfants, et leurs échanges pouvaient durer des heures.


Caleb s’invitait même régulièrement aux petites soirées quotidiennes que Cendre partageait avec sa servante et ses enfants. Cendre s’amusait d’ailleurs beaucoup du regard gêné de Jessie chaque fois que son ami la complimentait sur une chose ou une autre. Il lui paraissait évident que Jessie n’avait pas encore compris que le vampire la courtisait doucement.


Voilà deux ans que Cendre avait repris sérieusement les entraînements au combat avec le Vidame de Montsimpa.


Elle se défendait de mieux en mieux et avait même réussi à le mettre à terre une bonne dizaine de fois.


Mais le Vidame n’était jamais complètement satisfait et, bien qu’il reconnut les progrès de son élève, il voulait qu’elle aille encore plus loin.


Il s’était donc mis en tête de l’entraîner aussi sur un punching-ball mais Cendre n’était pas persuader de l’efficacité de cet objet, surtout lorsque Timothée la raillait en lui disant de ne pas le caresser alors qu’elle y mettait toute sa force.


- Et comme ça, c’est mieux ?
- Je crois que je préfère vous montrer une nouvelle fois. Vous manquez de vigueur.
Je lui en mettrai, moi, de la vigueur ! Mais Cendre lui cédait quand même la place.


Timothée lui expliquait ensuite comment positionner ses jambes et avoir des gestes précis et efficaces.
- Imaginez votre pire ennemi face à vous et réglez-lui son compte !


Les jumeaux venaient d’avoir cinq ans et ils grandissaient en devenant chaque jour plus proches l’un de l’autre. Il leur arrivait même parfois de s’endormir l’un contre l’autre après s’être épuisés à jouer.


Et si Isaure était sage et n’aimait pas beaucoup chahuter et faire des bêtises, elle se laissait toujours entraîner par son frère qui savait se montrer très persuasif.
C’est ainsi que Cendre avait dû changer, à deux reprises les lattes du sommier du lit d’Isaure. C’était tellement amusant de sauter sur ce lit !


Amusant aussi de plonger la tête la première dans le panier de linge !


Samuel était un vrai casse-cou !


Mais une fois coincé, il appelait sa maman à la rescousse pour l’aider à se tirer d’affaire.
- Coucou Mman ! Ze suis là !


- Et qu’est-ce que tu fais là-dedans, petit chenapan ?
- Ze zouais et ze suis tombé zans faire esseu-près !


- Allez, viens ! Et je ne veux plus te voir dans cette panière, d’accord ?
- D’accord !
Mais Cendre avait changé la panière à linge et opté pour un modèle avec couvercle qu’elle pouvait fermer avec une sécurité enfant.


Elle passait beaucoup de temps avec ses enfants et ne refusait jamais lorsqu’ils venaient la chercher pour jouer avec eux.


Elle partageait auprès d’eux des moments de tendresse et d’amour. Ces petits êtres innocents qu’elle avait portés un jour dans son ventre étaient devenus toute sa vie.


Les jumeaux se disputaient rarement mais lorsque son attention se portait trop longtemps sur l’un des deux, l’autre ne manquait jamais de lui faire comprendre que, lui aussi, avait besoin de sa mère.


Et elle savait comment les apaiser.
Samuel et Isaure n’étaient pas jaloux l’un de l’autre puisque Cendre ne donnait jamais à l’un plus qu’à l’autre. Le frère et la s��ur grandissaient donc ensemble, unis, et proches de leur mère. 


Et tandis qu’Isaure appréciait les moments calmes et câlins dans les bras de sa maman, Samuel, lui, préférait des jeux plus audacieux.
Isaure n’aimait pas être bousculée mais elle était toujours en admiration devant son risque-tout de frère qui n’avait pas peur d’avoir la tête à l’envers.


Cendre les emmena très tôt faire des promenades nocturnes pour leur faire découvrir la Vallée Oubliée car, même si Jessie leur faisait prendre l’air durant la journée, elle ne pouvait, en sa qualité d’humaine, aller plus loin que le jardin.


L’autre raison était qu’elle voulait familiariser très vite les enfants avec le monde de la nuit car c’est ce monde-là qui deviendrait un jour leur univers.
- Moman, veux pas rentrer, moi !
- Il va pourtant falloir aller dormir maintenant.


- Veux zouer encore un peu !
- Oh oui ! On peut faire un nounours de neige, comme avec Zessie ?


Cendre se laissait souvent convaincre mais c’était pour son plus grand plaisir à elle aussi, il faut bien l’admettre.


Et puis, ce n’était pas bien grave si ses petits se couchaient tard puisqu’un jour, ils ne pourraient vivre que la nuit.


Francis Caron débarqua une nuit dans la chapelle pour prévenir Cendre de l’arrivée de nouveaux vampires dans les catacombes.
- Ils ne sont pas venus ensemble. Leurs arrivées se sont étalées sur plusieurs dizaines d’années, un par un. Cela ne nous a pas paru étrange puisque personne ne sait à l’extérieur qu’on ne peut pas ressortir de Forgotten Hollow. Ils se sont donc installés naturellement et se sont très bien intégrés à la communauté.
- Alors pourquoi venir m’en parler et pourquoi cette soudaine inquiétude ?


- Il semblerait qu’ils se connaissaient tous avant de débarquer ici. Certains d’entre nous les ont vus se réunir et sont persuadés qu’ils complotent. Contre qui ? Nous ne le savons pas encore mais une chose est sûre, ils ne se réunissent pas pour jouer aux cartes. Nous avons de bonnes raisons de croire que leurs survenances échelonnées sur des années étaient préméditées.
- C’est une accusation très grave. En as-tu parlé au Comte ?


- Non. Je comptais sur toi pour le lui dire. Je ne suis que le « petit peuple » à ses yeux, ne l’oublie pas. Et toi, tu es dans ses petits papiers.
- Très bien, mais j’espère que ces accusations ne sont pas des élucubrations. Le Comte est notre souverain à tous et je n’aimerais pas l’importuner avec de fausses rumeurs.
- Ce ne sera pas le cas. Tu as ma parole. 


Cendre avait totalement confiance en Francis et elle se rendit donc au manoir Straud la nuit suivante pour rapporter au Comte les propos du propriétaire de la galerie d’art.
- Je suis bien d’accord avec vous, ma chère, ces nouvelles sont alarmantes et je ne pense pas qu’il faille les prendre à la légère.


- Si complot il y a, je suis persuadée qu’il ne peut être fomenté que contre vous. Il va falloir vous mettre à l’abri.
- Vous êtes touchante mais je suis puissant et, si je n’ai jamais tremblé, je ne vais pas commencer à le faire devant ces intrigants.


- J’aimerais que vous veniez à la chapelle quelques temps, le temps que cette histoire soit réglée ou que l’on soit sûrs qu’il n’y ait aucun complot contre vous. Je vous cèderai ma crypte, c’est promis, le temps de votre séjour.


- Votre offre est délicieuse mais je la décline. Je ne suis pas du genre à fuir devant l’ennemi, je ne l’ai jamais fait. Par contre, supporter vos petits braillards toute la journée, non merci, mais très peu pour moi.
- Vladi...


- Cessez de vous tracasser pour moi, je vous prie. Je ne vous ai pas encore tout dit.
- C’est-à-dire ?
- Je savais, avant même que vous ne m’en informiez, ce qui se tramait dans les catacombes. C’est moi qui vous ai envoyé Francis la nuit dernière, et qui lui ai suggéré de vous demander de venir vous-même m’annoncer la nouvelle.

 

- Mais c’est complètement délirant ! Et dans quel but ? Si vous saviez déjà tout, pourquoi cette mise en scène ?
- Je voulais être certain que vous n’étiez pour rien dans ce conciliabule et m’assurer de votre loyauté.



Cendre était consternée. Comment le Comte avait-il osé imaginer, ne serait-ce qu’une seconde qu’elle avait pu conspirer contre lui ? Elle s’apprêtait à lui répondre lorsque Francis fit son apparition dans le salon.


- Francis ! Espèce de traître ! Comment as-tu pu me faire un coup pareil ? Tu m’as regardée dans les yeux en me mentant !
- Ne lui en voulez pas, ma chère. Il a agi sous mes ordres. Francis est lieutenant et voilà bien longtemps qu’il est aussi le commandant en chef de ma milice secrète.


- De mieux en mieux ! Maintenant, j’aimerais savoir pourquoi vous ne m’avez pas fait confiance, Vladislaus.
- J’avais confiance mais je voulais être certain que vous ne vous étiez pas mis en tête de prendre ma place en tant que souveraine de la Vallée Oubliée. Vos pouvoirs grandissent et votre force aussi. Cela aurait été du domaine du possible.
- Belle preuve de confiance ! Et moi qui m’inquiétais pour vous !


- De façon charmante, je dois bien le reconnaître mais ne soyez pas trop sévère avec moi. Les intérêts de Forgotten Hollow passent avant tout le reste, vous le savez bien, et je me devais de lever le doute.


Bien que vexée par l’attitude du Comte, Cendre dut reconnaître qu’il avait agi comme elle l’aurait certainement fait elle-même, si elle s’était retrouvée à sa place. Elle décida de ne pas lui en tenir rigueur.
- Alors, quels sont nos plans maintenant, Francis ? demanda-t-il à son lieutenant.


Francis et Lilith, dont Cendre apprenait cette nuit-là qu’elle fait aussi partie de la milice secrète de Vladislaus (aussi appelée milice Straudienne), avaient établi que les vampires étrangers arrivaient régulièrement dans la Vallée Oubliée au rythme de tous les cinq ans.
Selon leurs calculs, le prochain devrait franchir ses portes dans quatre ans et il serait fermement attendu par la milice tout entière. Le bougre se verrait alors contraint d’avouer les raisons de sa venue ainsi que celle de ses acolytes et ce, par tous les moyens.


D’ici là, bien sûr, la milice continuerait à surveiller, dans l’ombre, les conspirateurs afin d’essayer d’obtenir plus d’informations sur leurs motivations. Ils étaient à présent au nombre de neuf, le premier ayant mis un pied sur le sol de la vallée en 1998, il y a quarante-et-un ans.
- Ah... et j’ai oublié de te dire cela, Cendre, mais ton précieux maître d’œuvre, Nathan Livinghell, fait partie de la clique.


- Oh, celui-là, j’ai de plus en plus de mal à le supporter. J’ai l’impression qu’il observe la moindre de mes réactions. J’envisageais justement de me débarrasser de lui
- Il ne faut pas. Cela éveillerait les soupçons. Continue à l’embaucher lorsque tu as besoin de lui, mais reste tout de même sur tes gardes. Le problème, avec ces gens-là, c’est qu’ils se sont infiltrés partout au sein de notre communauté et que beaucoup d’entre nous sont amis avec eux. Il ne faudrait pas qu’ils en viennent à les mener, eux aussi, à comploter.


Le lendemain matin, Cendre aida les jumeaux à s’habiller puis resta un instant avec eux. Elle ignorait ce qui se tramait dans les catacombes mais cela n’augurait rien de bon. Son instinct maternel protecteur s’en trouva exacerbé. Personne ne toucherait à ses enfants.


Peu importe les intentions de ces comploteurs, elle serait prête à les affronter. Ils ne savaient pas encore à qui ils avaient à faire.
Le Vidame et elle convinrent donc de passer à des entraînements quotidiens intensifs. Une fois par semaine ne serait plus suffisant au vu de la sourde menace qui s’insinuait dans leur communauté. 


Et les entraînements portèrent leurs fruits puisque Cendre venait à bout de Timothée Renard trois fois sur quatre. Elle avait la rage. Il était hors de question que qui que ce soit vienne perturber la petite vie paisible qu’elle menait avec ses enfants dans les profondeurs de la chapelle.

 

A suivre 🙂

 

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Re: [VDC] **Cendre et la Vallée Oubliée** màj 06/07/24 - Chap16

★★ Guide

 

Chapitre 16 - Des bambins au top !


 

Trois mois plus tard, alors que Francis et Lilith géraient les catacombes et qu’ils avaient promis de la prévenir au moindre problème, Cendre rencontra Cameron Fletcher, un éternel étudiant qui aimait faire le pitre bien qu’il s’approchât, dramatiquement pour lui, de la quarantaine.

Révélation

Le jeune homme n’avait jamais quitté l’université car elle représentait pour lui le terrain de jeu idéal pour toutes ses idées de génie, et aussi le lieu rêvé pour avoir toutes les jeunes femmes à sa botte.
Le garde-manger de Cendre laissait de plus en plus à désirer mais elle choisit de faire de ce « faux jeune » son prochain géniteur, et il lui fut très facile de le mener jusqu’à sa chambre.

 

Le petit génie lui donna cependant du fil à retordre malgré ses pouvoir de séduction accrus et il ne lui fallut pas moins d’une bonne demi-heure pour le séduire définitivement.
Qu’est-ce qu’il avait celui-là ? Il n’avait pas remarqué à quel point elle était séduisante ?


Heureusement, lorsqu’il fut convaincu, il ne se fit pas prier deux fois pour rejoindre la couche de Cendre.
« Non mais, c’est quoi ces hommes mûrs qui se prennent pour des ados ? Il n’y a qu’à voir sa coiffure... », pensa-t-elle avant de filer sous la couette.


Après une nuit fortement excentrique avec un Cameron parfaitement en forme et, somme toute, fort sympathique, Cendre put se ravir d’être une nouvelle fois enceinte.


Et si ses deux bambins étaient encore trop jeunes lorsque Blanche est née pour se rappeler que leur maman avait aussi, à l’époque, un gros ventre qui a ensuite miraculeusement disparu, ils ne manquèrent pas, cette fois, de lui faire remarquer qu’elle avait grossi :
- Maman, pourquoi ton ventre est si gros ? 


- Mon ventre est ainsi car je porte un bébé, ma chérie, comme je l’ai fait pour Samuel et toi.
- Chouette ! Samuel avait raison alors ! Il dit que c’est un petit frère ou une petite sœur ! 


- Disons qu’on ne le sait pas encore. Si le bébé est un vampire comme nous, alors oui, ce sera un petit frère ou une petite sœur.
- Ah bon... mais s’il n’est pas comme nous ? Ce sera quoi ?
- Il partira vivre ailleurs où il sera plus heureux.
Samuel jouait avec ses cubes mais il n’avait pas perdu une miette de la conversation.


- Moi je sais que un autre bébé attend de grandir pour savoir si il est notre sœur, comme le bébé du ventre de maman. Alors, on aura peut-être plein de sœurs et de frères parce que le ventre de maman, il fait plein de bébés !
- C’est vrai Maman ce qui dit Samuel ?
- Oui ma puce. Je ne sais pas comment il sait ça mais j’aimerais que ces bébés soient tous des vampires.


- Ben c’est pas grave alors ! Si les bébés sont pas nos frères ou nos sœurs, le ventre de maman en fera des autres qui seront des fampires !


Samuel avait une logique bien à lui qui réussissait à coup sûr à convaincre sa sœur et à attendrir sa mère. Son innocence était sans faille et Cendre s’émerveillait chaque jour devant la candeur de ses propos pourtant si réalistes.


Et heureusement pour ses jumeaux immaculés, la réalité, la vraie, ne les avait pas encore entachés de sa cruauté, celle qu’elle constatait chaque nuit depuis plus de treize ans, après la naissance de sa première née.


Ce jour-là, c’était l’anniversaire de Jessie, et Cendre avait décoré la salle de combat afin de lui préparer une surprise.
- Alors ? Qu’est-ce que vous pensez de la déco, les enfants ?
- C’est cro beau ! Et elle va être cro contente Zessie !


Cendre avait réuni tout le monde ce soir-là car sa servante était depuis longtemps maintenant, appréciée par son cercle d’amis. Tous avaient répondu présents à l’invitation et la surprise avait été totale


Jessie ne quitta pas Caleb des yeux, les bambins dansèrent, trop heureux de faire la fête avec les grands, et Vladislaus se demandait pourquoi les enfants étaient autorisés à s’agiter ainsi au milieu des adultes. Bref, la fête s’annonçait joyeuse.


Jessie souffla ses bougies dans la liesse générale, extrêmement touchée par l’attention de sa maîtresse qui avait organisé pour elle cette superbe soirée.


Mais lorsque Cendre voulut la féliciter, elle fut devancée par Caleb qui la prit dans ses bras et, à voir le sourire de Jessie, Cendre fut désormais certaine qu’il se passait quelque chose entre ces deux-là.


Après la soirée, la vampire et sa servante débarrassèrent la salle de combat des vestiges de la fête puis elles s’installèrent à la cuisine pour boire un dernier verre.
- Est-ce mon imagination ou Caleb et toi ?...
- Comment avez-vous deviné ?
- Il suffit de vous regarder.


- Il ne s’est encore rien passé, vous savez. Nous flirtons, c’est tout. Mais c’est tellement agréable.
- Qu’il soit vampire ne te dérange donc pas ?
- Pas du tout ! Il est tellement charmant ! 


- Tu sais que c’est lui qui m’a suggéré d’organiser cette petite fête pour ton anniversaire ?
- Oui, il me l’a dit mais il a aussi dit que c’est vous qui aviez tenu à tout préparer, toute seule. Merci, Madame Valrose. Merci d’avoir fait ça pour moi ! 


Deux jours après, numéro dix-neuf décédait. Cela faisait un moment que ça menaçait d’arriver et que Cendre, pour l’épargner et ne pas l’affaiblir davantage, ne se nourrissait plus sur lui. Georges Cahill était le premier humain qui mourrait de vieillesse dans les cellules de la chapelle.


Numéro dix-huit serait certainement la suivante puisqu’elle avait pris un sacré coup de vieux ces derniers temps. La femme avait toujours été fragile depuis son arrivée et elle supposait qu’avec son âge avancé, les choses n’iraient pas en s’améliorant.


C’était la raison pour laquelle elle ne lui prélevait qu’une petite quantité de plasma et qu’elle finissait son repas dans la nuque plus savoureuse de numéro onze qui savait très bien à quoi s’en tenir quand Cendre arrivait dans sa cellule, ou dans celle de numéro quatorze.

 
Révélation
J’ai été vraiment contente lorsque Dina s’est finalement décidée à utiliser le ballon de foot que j’avais laissé sur le sol de sa cellule. Elle a mis le temps avant de s’en servir !

Il devenait donc impératif de renouveler le garde-manger au plus vite afin d’assainir cette situation compliquée pour tout le monde.
Cendre partit donc chasser en quête de nourriture et tomba un soir sur Mark Eggleston, un humain de toute évidence friand de jeux d’échecs.


Numéro vingt-et-un était un homme de trente-cinq ans, en pleine santé et elle n’avait pas douté une seconde que son plasma serait parfait.


Elle ne fut pas déçue. Ce repas était de loin le meilleur festin qu’elle eût fait depuis longtemps.


Un soir, en lisant le volume trois de l’encyclopédie vampirique, Cendre lut à nouveau un passage faisant mention de la possibilité de guérir le vampirisme. Les écrits avaient l’air formels mais n’indiquaient toujours pas la recette de ce remède miracle.


Elle reposa le recueil. Avait-elle toujours envie de redevenir humaine aujourd’hui ? Cela faisait bien longtemps qu’elle ne s’était plus posé la question. Il lui semblait qu’elle avait vécu dans la Vallée Oubliée toute sa vie, et elle n’était plus sûre de rien.


Quelques nuits après, elle ressentit les premières contractions annonçant l’accouchement et Jessie tint, cette fois, à être auprès de sa maîtresse pour le cas où elle aurait besoin d’elle.


Mais tout se déroula à merveille, comme les six fois précédentes, et Cendre mit au monde un petit Clotaire.


Et, comme à chaque fois, elle prit son enfant dans les bras et le serra fort contre elle afin de s’en remplir avant de le laisser à son père. Lui qui était un grand enfant, désespérait complètement de devoir s’en occuper mais il aurait été bien mal venu qu’il refusât.


Sept mois plus tard... Mars 2041...

Blanche fêta ses trois ans et Cendre s’émerveilla de voir que sa bambinette était née vampire.

Elle ferma les yeux pour savourer cet instant magique où elle réalisa que Blanche allait pouvoir vivre dans la chapelle avec ses frère et sœur ; sa petite fille grandirait auprès d’elle et ferait partie de sa descendance officielle.


Salim qui, jusque-là, était resté à l’écart, s’approcha de Cendre, tout heureux.
- Alors, on part quand, la petite et moi ? Vous avez bien dit que je pourrais quitter ces lieux avec elle lorsqu’elle aurait trois ans, non ?


Non. Cendre n’avait jamais rien dit, mais elle ne l’avait pas détrompé non plus. Tout était dans la nuance.
- Bien sûr. Laisse-moi profiter d’elle une heure ou deux, et lorsque je te la ramènerai, vous pourrez partir.
- Merci. Je vais attendre avec impatience.


Lorsque Cendre arriva au salon, Jessie était en peine conversation avec les jumeaux, un grand débat semble-t-il entre princesses et dinosaures, et Samuel s’était installé dans le fauteuil de sa mère.


- Bonsoir les enfants ! Je viens vous présenter Blanche. C’est votre petite sœur et elle fait désormais partie de notre famille. Je compte sur vous pour lui faire bon accueil.
- Quel bonheur, murmura Jessie.
- C’est trop bien, dit Isaure en souriant.
- Ben moi, j’aurais préféré un petit frère, rajouta Samuel en grimaçant.


Ce fut Isaure qui, la première, s’empressa de faire un gros câlin à sa petite sœur, sous les regards attendris de Cendre et de Jessie. Et Blanche, ravie d’avoir une grande sœur, lui fit plein de bisous.


Samuel, qui constata que finalement la petite dernière avait l’air sympa, se lança lui aussi dans la danse des câlins. Et elle le lui rendait bien, sa nouvelle petite sœur.


Cendre s’amusait de voir son fils faire le beau devant les filles. Samuel paraissait ravi d’avoir un auditoire aussi attentif à toutes ses histoires. Il était l’aîné, même s’il ne l’était que d’une minute ou deux de sa jumelle, mais on le sentait déjà protecteur envers ses sœurs.


En voyant que tout se déroulait au mieux du côté des bambins, Cendre se rapprocha de Jessie pour lui demander de rester auprès d’eux. Elle devait s’absenter pour régler un problème au plus vite.
- Evidemment, Madame. Vous savez bien que je les ai à l’œil, vos bambins. Et puis-je me permettre de vous dire quelque chose, Madame Valrose ?
- Je t’écoute, Jessie.
- Je suis très heureuse que Blanche soit parmi nous ce soir !
- Moi aussi, Jessie, moi aussi.


Cendre se rendit ensuite jusqu’à la cellule de Salim Benali et avança vers lui d’un pas déterminé. Elle n’avait pas le choix et, même si Salim avait été un bon père pour Blanche, elle devait s’en séparer.


Justement pour cette raison, elle choisit de ne pas le tuer. Elle se devait de le remercier pour lui avoir donné Blanche et pour s’être impeccablement occupé d’elle pendant trois ans. Alors, avant de le transformer, elle lui ôta son esprit de vie. Salim avait bien mérité de vivre sa prochaine existence en paix.


Une fois le rituel achevé, Cendre appela Francis pour qu’il vienne le chercher. Salim serait, avec lui, en de bonnes mains pour parfaire son éducation vampirique.


Au fil du temps, Jessie s’impliquait de plus en plus dans la vie des trois bambins de sa maîtresse, et elle avait même installé, avec l’accord de celle-ci, un petit coin dans le salon pour leur apprendre les bases de leur héritage vampirique.


Les trois petits étaient sous le charme de cette institutrice improvisée qui savait leur expliquer, sans leur faire peur, les coutumes vampires les plus abominables.


Cendre s’invitait souvent, durant ces heures de la journée, pour observer les leçons que Jessie dispensait à ses enfants comme des histoires, des histoires vraies cependant, des histoires qui contaient aussi, avec douceur, l’arrivée de Cendre dans la Vallée Oubliée.

 

Et les bambins en redemandaient tant et si bien qu’ils allaient parfois chercher Jessie dans sa chambre au moment où elle s’apprêtait à dormir, Jessie qui ne se faisait pas prier pour les accompagner au salon et leur narrer la suite de l’histoire.


Toutes ces histoires suscitaient toutefois moultes interrogations dans les jeunes esprits des enfants et ces interrogations ne souffraient aucun délai de réponse.
Alors les filles se joignaient toujours à Samuel lorsqu’il avait dans l’idée de réveiller leur mère pour en savoir plus.
- Maman a dit qu’on pouvait la réveiller si c’était urgent.
- Mais M’man, elle aime pas qu’on la réveille ! Elle va être cro en colère !


Isaure : « Regarde ! Elle nous a entendus ! »
Blanche : « Moa veux pas qu’elle se fâche avec moa ! »
Samuel ! « Meuh non ! Maman, elle nous aime ! »


Cendre s’installait alors pour répondre à toutes ces questions fort innocentes et bien légitimes. « C’est vrai que tu étais humaine ? Et pourquoi Jessie n’est pas un vampire ? Moi, j’aime trop les nuggets, je voudrais pas boire que du plasma ! » et cætera, et cætera... 


Les questions fusaient dans tous les sens mais chaque fois, la maman qu’elle était, trouvait la parade adéquate pour contrer leurs inquiétudes. Et chaque fois, ils repartaient en riant pour aller jouer ensemble. 


Une nuit, alors que tout le monde dormait, Caleb frappa à la porte arrière de la chapelle, là où se trouvaient l’orgue, le confessionnal, et l’escalier menant à la crypte.
- Il faut que je te parle, Cendre. Il s’agit d’un sujet qui ne peut plus attendre, et toi seule peut m’aider.

 

A suivre 🙂

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Re: [VDC] **Cendre et la Vallée Oubliée** màj 06/07/24 - Chap17

★★ Guide

 

Chapitre 17 - Amour et vengeance


 

- Qu’y a-t-il de si important, Caleb ?

Révélation

- Je suis amoureux fou de Jessie.
- Ça, j’avais cru le remarquer. Vous n’êtes pas franchement discrets lorsque vous batifolez.
- Tu ne comprends pas... Elle n’est pas une simple amourette pour moi. Je l’aime, je l’aime vraiment.


- Caleb, pas de ça avec moi ! Tu sembles oublier que c’est toi qui m���as parlé de cette histoire d’amour unique. Alors, n’utilise pas de mots dont tu ignores le sens. Jessie m’est précieuse et je ne tolèrerai pas que tu lui fasses du mal.


- Je ne lui ferai jamais de mal. C’est justement de cela dont je suis venu te parler. Elle est mon Unique, je le sais, je le sens. Je suis venu pour te demander sa main.


- Tu... quoi ?
Cendre s’était interrompue. Elle regardait son ami, et son cerveau réfléchissait à toute vitesse. Caleb n’avait pas l’air de plaisanter, ce qui signifiait que, si elle donnait son accord, Jessie irait vivre chez lui et qu’elle devrait se passer de servante. Cela lui paraissait impensable. Jessie était à son service depuis dix-neuf ans déjà et, de plus, les enfants l’adoraient.
- Tu es sûr ? Tu es sûr de l’aimer ?


- Oh oui ! Je n’ai jamais été plus sûr d’une chose de toute mon existence. Je veux qu’elle soit ma femme et qu’elle passe sa vie auprès de moi.


- Jessie est humaine ; est-ce que tu en es bien conscient ? Dans une vingtaine d’années, elle sera moche et ridée... Et puis, elle va mourir...
- Bon sang, Cendre ! Tu crois que je n’ai pas pensé à tout ça ? Tout ce qui nous importe est de passer les prochaines quarante ou cinquante prochaines années l’un auprès de l’autre. Je n’en ai rien à faire de ses rides ! C’est elle que j’aime !
- Tu seras malheureux lorsqu’elle mourra...


- J’aurais l’éternité pour m’en remettre. Alors ? Tu es d’accord pour que je l’épouse ?
- Non. Je dois d’abord y réfléchir.


Cendre s’était levée. Elle ne tenait pas à poursuivre cette discussion qui la heurtait immensément.
- Rentre chez toi maintenant, Caleb.


- Pourquoi réagis-tu comme ça ? Tu es jalouse parce que ton Unique dort dans un cercueil ? Tu ne veux pas que les autres soient heureux, c’est ça, Cendre ?


Elle n’avait pas répondu. Caleb se trompait. La seule raison qu’elle opposait à ce mariage était qu’elle allait perdre sa servante, une raison certes égoïste, il faut bien le reconnaître, mais une raison qui en valait beaucoup d’autres.


Cendre dormit très mal ce jour-là. Elle avait tourné et viré dans son cercueil plusieurs heures durant, si bien qu’elle avait fini par se lever. De toute façon, elle n’aurait pas son quota de sommeil pour la journée... Caleb l’avait trop énervée pour cela.


Elle attendit le lever de la nuit pour se rendre sur la tombe de ses filles, et c’est alors qu’elle le vit... Elle aurait reconnu sa carrure et sa tignasse blonde entre mille autres.
- Ça alors... , murmura-t-elle.


Elle le regarda avancer dans la neige et il s’arrêta net ; leurs regards se croisèrent. Sans doute avait-il senti que quelqu’un l’observait.
- Cendre ? Est-ce que c’est bien toi ?
L’homme était aussi beau que dans ses souvenirs malgré quelques rides qui avaient dû le surprendre à la quarantaine, et sa voix, toujours aussi chaude, faisait remonter à la surface de mauvaises cicatrices du passé. Il inspirait confiance, tellement confiance qu’elle lui avait tout dit et qu’il l’avait trahie de la pire des façons en la vendant à Oba-San.


Alexandre Gageure ignorait qu’il se jetait dans la gue.ule du loup en venant à Forgotten Hollow et Cendre avait enfin une perspective de vengeance qui se profilait à l’horizon.
- Ça se pourrait bien, lui répondit-elle tandis qu’il s’approchait de la grille les séparant.
- Tu n’as pas pris une ride... et tu es toujours aussi belle.
- Arrête de me flatter, je ne suis plus aussi innocente qu’autrefois. Je sais ce que tu as fait.


- J’en suis désolé, crois-moi. Il te soupçonnait depuis un moment déjà et voulait que je lui donne des renseignements... Il ne se passe pas une journée sans que je ne regrette ce qui s’est passé. J’ignorais qu’Oba-San aurait lancé un contrat sur toi... Tu étais sa fille... Cendre, je te croyais morte...
- Je suis bien en vie, comme tu peux le constater... mais il s’en est fallu de peu et je ne suis pas prête d’oublier dans quel état je suis arrivée ici.


- Tu crois que tu pourras me le pardonner un jour ?
- Jamais, j’en ai bien peur.


Au fur et à mesure que Cendre s’entretenait avec Alexandre, le ton de la conversation s’allégea et elle en vint à penser, qu’au lieu de le tuer, elle pourrait très bien en faire un géniteur.
- Que fais-tu près de cette chapelle ? Tu t’es mise à prier ?
- J’en avais besoin... et puis, j’habite ici.


- Tu me fais marcher !
- Pas du tout. Je t’invite, si ça te dit !
- Bien sûr que ça me dit. J’ai toute la nuit devant moi et je n’ai pas l’impression qu’il y ait beaucoup d’hôtels dans le coin...
- Il n’y en a pas.


Cendre avait enlevé son manteau, revêtu un pull et s’était installée auprès du feu avec son ancien amant. Il se leva lorsqu’ils entendirent Clotaire pleurer. Le pauvre petit devait avoir faim.
- Tu as un bébé ?
- Oui...
- Et où est le père ?
- Il est mort prématurément.


Ces mots semblèrent rassurer Alexandre qui se rassit aussitôt.
- Je suis vraiment désolé...
Cendre se retint de répliquer car elle devinait que la compassion de ce bonimenteur n’était que façade.


- Alors, dis-moi, comment se fait-il que tu n’aies pas pris une ride ? Tu sembles aussi jeune que la dernière fois que je t’ai vue. Et tu ne portes plus de lunettes ?
- C’est le secret des femmes, figure-toi. Les crèmes et les lentilles de contact.

 

- J’avais oublié combien tu étais belle.


Alexandre s’enhardit à passer son bras autour des épaules de Cendre qui le laissa faire. Ce délateur ne doutait de rien mais il ignorait encore que ce n’était pas lui qui menait le jeu.

 

- Es-tu toujours à la solde d’Oba-San, Alex ?


Il s’écarta, surpris par la question.
- Je travaille toujours pour lui, oui, ce qui ne veut pas dire que toi et moi soyons ennemis. Oba-San est un vieillard maintenant. Il n’a plus sa prestance d’antan. Plus personne ne le craint.


- Et comment pourrais-je te croire ? Tu m’as déjà trahie une fois...


- Nous avons vieilli, toi et moi. Nous sommes trop vieux pour jouer à ces jeux d’enfants. Mais malgré tout, nous n’avons plus besoin de parler pour savoir ce que nous voulons l’un et l’autre, n’est-il pas vrai ?


Ce qu’elle voulait, c’était le tuer, là, tout de suite, de ses propres mains, mais sa fin serait trop douce ; alors que s’il se voyait réduit au simple statut de reproducteur, Alexandre l’égocentrique, ne s’en remettrait jamais. Elle abonda donc dans le sens de ses mots séducteurs.


Puis elle s’était levée. Elle avait prévu de laisser sa chambre à Alex pour la nuit et de l’y enfermer. Elle ne se sentait pas de batifoler avec lui pour le moment mais elle ne souhaitait pas non plus qu’il découvrit ses cellules dans l’immédiat. Les séances de cracottes devraient attendre.
C’est alors qu’il lui donna une information cruciale :
- Oba-San sera là demain matin, Cendre.


- Oba-San vient à Forgotten Hollow ? Tu es sérieux ?
- Il sera là dans la matinée. Tu vois, je suis honnête avec toi. Je ne te cache rien, mais reste sur tes gardes avec lui.
- Mais que venez-vous faire ici exactement, tous les deux ?


- L’art, toujours l’art... Il paraît qu’il y a un vieux type qui vit ici dans un manoir et qui possède des toiles d’une valeur inestimable. Oba-San veut le rencontrer.
- Je lui souhaite bien du plaisir.


Cendre s’était retirée pour se rendre directement chez Lilith, non sans avoir souhaité une bonne nuit à Alexandre.
- Il faut que je te parle. Ton frère n’est pas là, j’espère.
- Non. Il est sorti. Nous avons eu une prise de bec à propos de sa Jessie.

 

- Oh... Tu es donc au courant...
- Tout le monde est au courant. Caleb clame son amour pour l’humaine à qui veut l’entendre ! Je me demande vraiment s’il sait que les vampires n’épousent pas les humaines ! Ils leur font des bébés mais ne les épousent pas ! C’est ainsi depuis des siècles et cela fait partie de nos valeurs.


- Tu comprends mon dilemme alors... Il est venu me voir pour me demander l’autorisation de l’épouser.
- Et que lui as-tu dit ?
- J’ai refusé. Il faut que j’y réfléchisse.


- Tu as bien fait. Mon frère pousse le bouchon cette fois en allant contre nos coutumes. Vlad serait fou si tu acceptais.
- Vlad est aussi au courant ?


- Oui. Caleb lui avait d’abord fait sa demande, mais il l’a envoyé vers toi. Il est certain que tu prendras la bonne décision mais ne veut pas t’influencer. Moi, je pense surtout qu’il ne veut pas prendre cette décision lui-même.
- Caleb dit que Jessie est son Unique. Tu crois que ce peut être vrai ?


- Franchement, oui. Je n’ai jamais vu mon frère comme ça et c’est ce qui me désole le plus dans cette histoire mais, on ne peut pas aller contre nos coutumes, surtout pas toi, la future grande maîtresse. Il y aurait bien une solution mais il faudrait que Jessie accepte.
- Dis-moi tout.


- Une transformation. Si Jessie est une vampire, alors le problème n’existe plus... mais je doute que Caleb soit d’accord avec ça. Il ne voudra jamais la transformer.
- De toute façon, si quelqu’un doit transformer Jessie, ce sera moi et personne d’autre. Il va falloir que j’aie une petite discussion avec elle et que je réfléchisse encore à tout ça.


Cendre allait s’en aller lorsqu’elle se rappela la raison initiale de sa visite à Lilith.
- J’ai oublié de te dire... Demain, en milieu de matinée, un humain du nom de Oba-San va arriver dans la Vallée avec l’intention de rencontrer Vlad. Personne ne doit y toucher. Et je compte sur toi pour me l’amener, étant donné qu’il va débarquer en plein soleil.
- Oban-San ! TON Oba-san ?
- Celui-là même.
- Ne t’inquiète. Je m’en charge. Il sera chez toi demain.


A son retour de chez Lilith, Cendre se sentit suffisamment calmée pour mettre en œuvre son projet de bébé avec Alexandre, qui fut tout heureux de partager son lit sans se douter des conséquences à venir.


Lilith arriva, comme prévu, le lendemain dans la matinée, avec Oba-San. L’homme dont elle se souvenait avait beaucoup changé et était devenu un vieillard malgré une volonté évidente (et inutile) de vouloir paraître jeune en essayant de dissimuler ses cheveux blancs.
Elle l’entendit murmurer :
- Cendre Valrose...


Lilith le maintenait d’une main ferme.
- Oba-San ! Quelle joie de te retrouver. Tu as pris un coup de vieux, dis-donc !
- Espèce de sale petite voleuse ! Je vais te tuer !


Lilith le maîtrisa :
- Calmez-vous, Monsieur Oba ou c’est moi qui vais vous calmez. On ne s’adresse pas ainsi à la femme la plus puissante de Forgotten Hollow.
L’homme mésestima cependant l’injonction de Lilith Vatore.
- Je ne sais pas comment tu as fait pour t’en sortir mais je vais te régler ton compte, tu peux en être sûre !


Cendre se délectait. Lilith venait de plaquer son ennemi au sol sans ménagement, et sans aucune considération pour l’âge avancé de celui-ci. Cependant, elle voulait se retrouver face à face avec son père adoptif et n’en faire qu’une bouchée.
- Lilith... Tu peux nous laisser maintenant. Oba-San et moi allons avoir une petite conversation privée, tous les deux. 


Lilith relâcha l’homme et quitta la chapelle, laissant à Cendre le soin de s’occuper de lui.
- Cette fille est une vraie tigresse. C’est ton garde du corps ?
- Je n’ai pas besoin de garde du corps.


Oba-San s’était rapproché d’elle, sûr de lui. Ils se firent face.
-Je vais te tuer maintenant, Cendre. Dis adieu à la vie.


Cendre poussa un cri d’outre-tombe puis se transforma sous les yeux du vieil homme qui eut un mouvement de recul.


Il n’eut pas le temps de réaliser que la jeune vampire se jeta sur lui.


Et il ne lui fallut pas longtemps pour s’effondrer aux pieds de celle qui avait été autrefois sa fille.
- Tu vois, Oba-San, c’est moi qui te tue.


Son pire ennemi rendit l’âme quelques minutes plus tard. La vengeance était douce. Il avait payé pour l’avoir fait torturée et laissée pour morte, un jour, dans la Vallée Oubliée... Lui qui était le responsable définitif de son éternelle souffrance... Cendre éprouva, en cet instant, un immense soulagement. 


Elle alla ensuite se garantir, le cœur léger, que sa nuit avec son ancien amant, avait porté ses fruits....


... puis elle pénétra dans sa chambre, le réveilla et le conduisit jusqu’à sa dernière demeure, l’une des deux cellules de géniteurs. Il était grand temps qu’il sache à qui il avait à faire.
Alexandre Gageure découvrit, ce jour-là, la nouvelle nature de son ex petite amie, ainsi que ce à quoi elle le destinait, et il réalisa bien vite que ce qui les avait unis un jour n’était plus désormais...

 

A suivre 🙂

 

 

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Re: [VDC] **Cendre et la Vallée Oubliée** màj 06/07/24 - Chap18

★★ Guide

 

Chapitre 18 - Consentement et maîtrise


 

La journée avait été longue. Cendre n’avait pas dormi et, après avoir couché les enfants, elle décida de discuter sérieusement avec Jessie. Cette dernière savait déjà que Cendre avait refusé la demande de Caleb la concernant et elle s’en trouvait affligée, bien qu’elle comprit qu’il était impensable de modifier les coutumes ancestrales de toute une communauté.
- Jessie, j’ai besoin de savoir si tu l’aimes vraiment ou si c’est juste un béguin passager.

Révélation

Le regard pétillant de sa servante et l’enthousiasme dont elle faisait montre en parlant de Caleb, suffirent à Cendre pour se rendre à l’évidence que leur histoire n’était pas une lubie passagère. Jessie avait tout autant envie de se marier que son amoureux.


- Tu m’as convaincue, Jessie alors je me dois d’être honnête avec toi et te dire qu’il existe un moyen de rendre ce mariage possible. Seulement, c’est une solution qui risque de ne pas te plaire.
- Je suis prête à tout entendre, Madame Valrose, si cela peut me permettre de devenir l’épouse de Caleb.


- Il faudrait que tu deviennes toi-même un vampire. Je suis désolée, je ne vois que ça.


Jessie n’hésita pas une seconde.
- Si c’est la seule possibilité pour que Caleb puisse m’épouser, alors je veux devenir un vampire.
- Il va falloir que tu en parles avec lui dans ce cas, car d’après sa sœur, il est contre cette idée. Si tu te maries, Jessie, sache que tu me manqueras...


- Madame... me marier ne veut pas dire ne plus être à votre service. J’aime beaucoup trop mon travail et j’adore les enfants. Et puis comment feriez-vous pour vos leçons de mixologie ? Il vous reste encore beaucoup de choses à apprendre.


- Tes propos me touchent énormément mais comment envisages-tu les choses ?
- C’est simple : je prendrai mon service juste avant le lever du jour et je le quitterai à la nuit tombée ou lorsque les enfants seront couchés ; ce sera selon vos exigences. Et je passerai mes nuits auprès de mon mari. Après tout, les vampires vivent aussi la nuit, non ? 


- Je serais honorée de te garder à mon service. La crypte ne serait plus la même sans toi.
- Merci Madame.
- Dis-moi, tu as l’air d’avoir pensé à tout. Tu avais donc pensé à une transformation ?


- Non mais si vous prenez les vies d’un humain et celles d’un vampire, elles sont différentes. Alors, j’avais pensé que pendant que Caleb dormirait, je pourrais venir ici m’occuper des enfants. Nos vies sont complémentaires.


Quelques jours plus tard, numéro dix-huit mourut de vieilles sans avoir l’occasion de toucher au dernier repas que Jessie lui avait apporté.


Malgré un état de santé très fragile à son arrivée dans le garde-manger, Moïra Fyres avait quand même tenu quatre ans avant de s’en aller. Elle rejoignit les seize autres tombes dans le cimetière de la chapelle et Cendre lui rendit un hommage silencieux mais sincère en compagnie de sa loyale servante.
- Ce n’est pas juste ! Elle ne méritait pas cela.
- Jessie... Franchement... Elle est morte de vieillesse ! Je ne l’ai pas achevée, que je sache. Je me demande si un jour tu cesseras de pleurer sur les tombes de mon cimetière.


Heureusement, la peine de Jessie ne durait jamais bien longtemps et elle était, de toute façon, bien trop occupée en ce moment avec son histoire de cœur.
- Au fait, Madame, Caleb viendra la nuit prochaine. Il souhaite vous entretenir. J’aimerais que vous acceptiez ma présence, si c’est possible.
- Bien sûr que c’est possible, mais tu ne diras pas un mot.


Caleb se présenta comme prévu à la chapelle la nuit suivante. Il exposa à Cendre son amour pour Jessie (qui trépignait d’impatience quant à la réponse de sa maîtresse) et lui affirma qu’il était d’accord pour que celle-ci soit transformée.
- Tu es d’accord ? C’est certain ? Elle ne sera plus la même lorsqu’elle aura perdu son humanité, tu en es conscient ?


- Elle restera la même, avec un côté vampire exacerbé cependant. Son caractère ne changera pas. C’est exactement ce qui s’est passé pour toi.
- Tu délires, mon cher.


Caleb ne poursuivit pas plus longtemps sur ce sujet qu’il sentit très délicat pour Cendre.
- Je veux passer l’éternité auprès d’elle, je veux que Jessie soit ma femme. Si je donne mon accord pour qu’elle soit transformée, me donneras-tu le tien ? 


- Oui. Je vous donne mon consentement mais à deux conditions non négociables : un, c’est moi qui transformerai Jessie ; deux, Jessie restera à mon service. Cela te convient-il, Caleb ?
Jessie qui, conformément à la demande de Madame, n’avait pas ouvert la bouche de toute la conversation, émit un petit hoquet de contentement.


- Si cela me convient ? Bien sûr ! Je n’ai pas les mots mais je te remercie de tout mon cœur d’immortel.
- Parfait. Alors je vous laisse trente minutes puis je reviens pour transformer Jessie. Ce sera oui ou non. Mais ensuite, nous ne pourrons plus revenir en arrière. Réfléchissez bien tous les deux. 


Lorsqu’elle revint au salon trente minutes plus tard, Cendre put constater à quel point elle ne s’était pas trompée en autorisant le mariage de Caleb et Jessie. Ces deux-là avaient l’air d’être des complices de toujours et, en les observant, elle se remémora combien, elle aussi, avait pu être heureuse auprès de Lucas.


Le moment était venu de transformer sa fidèle servante humaine en loyal sujet vampire.
Cendre et Caleb avait « revêtu » leurs formes sombres pour l’occasion, et Jessie souriait. Elle était confiante et Cendre aussi.
Cendre avait alors entrepris de planter ses canines dans la nuque de Jessie, sous le regard attendri et fier de Caleb qui semblait empressé de voir sa charmante promise passer l’éternité auprès de lui.


Puis il ne regarda plus. Il savait qu’une fois qu’elle aurait goûté au sang de sa maîtresse, la transformation serait irréversible.


Cendre regarda sa servante boire à son poignet. Avec ce geste, elle montrait à quel point elle lui était dévouée, ce, sans contrainte de sa part. Après tant d’années, Jessie lui était sincèrement fidèle de son plein gré.


Caleb avait ensuite porté sa Jessie affaiblie jusqu’à sa chambre et l’avait aidée à s’allonger, puis il était retourné voir Cendre.
- Merci pour ce que tu as fait. Tu as permis notre mariage.
- Je t’en prie. Mais sache que Jessie restera avec moi jusqu’à sa transformation et à votre mariage. Ensuite, ce sera à toi de te charger d’elle et de veiller à son éducation vampirique.


Caleb avait approuvé puis avait pris congé sans omettre de remercier une énième fois son amie.


Deux nuits plus tard, Cendre s’introduisit dans la cellule de numéro onze alors qu’elle venait de s’attabler pour dîner. La prisonnière sentit tout de suite que quelque chose clochait chez la Dame vampire.
- Vous êtes vraiment bizarre, ce soir, Madame... Quelque chose ne va pas ?


- J’ai soif !
Cendre avait un peu trop attendu avant de se nourrir et sa soif devenait intenable. Elle scrutait la nuque de Dina avec envie et entendait son cœur battre à tout rompre... Tout cet afflux de plasma la rendait folle.
- Madame... vous êtes sûre ? 


Elle se rua sur sa proie et commença à boire goulument. Elle sentit qu’elle devait s’arrêter mais sa soif était la plus forte.


Elle ne contrôlait plus rien et vida presque la pauvre victime de la totalité de son plasma. Seul le plaisir qu’elle en retira, compta. Tant pis pour numéro onze. Elle s’en remettrait, comme d’habitude. Cette femme était incroyablement résistante.


Lorsqu’elle eut fini, elle observa sa prisonnière. Celle-ci tenait encore debout ainsi qu’elle l’avait imaginé, bien qu’un petit moins que d’ordinaire. Bref, ce n’était pas aujourd’hui qu’elle rendrait l’âme.
Cependant, il se passa deux choses complètement inattendues...


En buvant ainsi, de façon tout à fait incontrôlée, Cendre avait, cette nuit-là transformé, bien malgré elle, Dina Caliente en vampire mais cette nuit-là, elle devint aussi maîtresse vampire ! 


Elle dut faire appel de toute urgence à son ami Francis pour qu’il accompagnât Dina dans les catacombes et se charge de sa formation.
- Le Comte va être ravi. Puis-je lui annoncer ton nouveau rang ou comptes-tu le lui dire toi-même ?
- Ne te gêne pas. Annonce-lui la bonne nouvelle. 


Cendre n’appréhendait son nouveau rang comme une bonne nouvelle bien que ce soit le premier pas vers son avènement au titre de Grande Maîtresse Vampire.
Elle passa le reste de la nuit, seule dans sa crypte à réfléchir et exigea qu’on ne la dérangeât point.


Plus le temps passait et plus elle se rapprochait de ce moment où elle devrait devenir l’épouse de Vladislaus Straud, le quatrième du nom, pour permettre à la Vallée Oubliée de rouvrir ses portes.
Et même alors qu’elle devenait de plus en plus puissante et adulée par toute la communauté vampire, cette idée l’angoissait au plus haut point. Elle avait pourtant tout fait pour retarder l’instant où elle atteindrait son nouveau rang mais cette soif insupportable avait eu raison de ses efforts...


Le lendemain, elle alla discuter avec sa fidèle servante qui était devenue, après toutes ces années, une fidèle amie à qui elle confiait beaucoup de choses. Et, bien que Jessie pâtit d’immenses douleurs d’estomac à la suite de sa morsure, elle tendit vers sa maîtresse une oreille compatissante et bienveillante.


- Vous savez, Madame Valrose, je pense que le Comte n’est pas un homme pour vous. Ce que je vous souhaite est de connaître un amour aussi beau que celui que je vis avec Caleb. Votre vie n’est pas drôle. Tous ces géniteurs ne vous apportent rien sentimentalement parlant. Et après ça, vous voudriez encore épouser le Comte ?
- Jessie, si je ne l’épouse pas, les frontières de la Vallée Oubliée resteront fermées à jamais.


- Il doit y avoir une autre solution ! Je ne peux pas croire que vous passerez votre éternité auprès de lui. Vous ne l’aimez pas. Il ferait votre malheur, Madame.
- Je n’ai pas le choix, tu le sais. Et puis, Vladislaus n’est pas aussi horrible qu’on le dit, après tout. C’est un vampire cultivé et intéressant. Et c’est mon ami. 


Cendre s’éclipsa ensuite pour profiter de ses enfants. Ils grandissaient à vue d’œil et elle ne désirait manquer aucune miette de leurs progrès. Les jumeaux auraient bientôt sept ans... Le temps semblait ne jamais vouloir s’arrêter. Alors, chaque instant auprès d’eux était précieux.


Le mois suivant, Cendre avait réuni tout le monde pour fêter l’anniversaire des jumeaux.


Samuel fut le premier, en sa qualité d’aîné de quelques minutes, à souffler les bougies...


...suivi de très près par sa sœur Isaure. 

 

Les jumeaux avaient donc bien grandi et portaient, selon leur mère, leurs sept années à merveille.
Ils ne pouvaient toujours pas se passer l’un de l’autre et, comme lorsqu’ils étaient bambins, Samuel rejoignait toujours sa sœur Isaure dans sa chambre. 



Il était toujours aussi dynamique, et elle était toujours aussi calme mais tous les deux n’étaient bien que lorsqu’ils étaient ensemble.
- Tu viendras voir mon dessin lorsque je l’aurai fini ?
- Evidemment ! Est-ce que tu as vu comment je maîtrise le ballon ?
- C’est toi le meilleur, Sam ! Bien sûr que j’ai vu ! 


Et quand ils ne s’affairaient pas à leurs occupations préférées, les deux, à la manière de complices, refaisaient le monde vampire, et ils s’en donnaient à cœur joie ! 


Cependant, ils n’étaient que des enfants qui n’oubliaient jamais leur petite sœur Blanche et adoraient jouer avec elle ou lui faire des câlins, ce qui ravissait la petite dernière. 


De son côté, Jessie avait abandonné l’idée de faire cours aux enfants dans le coin salon et avait demandé à Cendre la permission d’ouvrir une salle de classe. Elle y enseignait les matières rudimentaires comme les mathématiques, les sciences et la littérature mais aussi l’histoire et la géographie de Forgotten Hollow. 


Cendre s’était réservé les cours de « coutumes vampiriques », qu’elle dédiait uniquement aux jumeaux, les seuls pour le moment à être en âge de comprendre le destin de leur maman et, par extension, le leur.


Ils finissaient souvent tous les trois, assis sur les coussins que Jessie avait installés pour les bambins, et leurs échanges dépassaient les espérances de Cendre. Mais, contrairement à ce qu’elle avait imaginé, lorsqu’il s’agissait de coutumes vampiriques, ce n’était plus Samuel qui entraînait Isaure mais bien Isaure qui, forte de ses idées, réussissait à captiver son frère.

A la fin de ce mois de décembre, les amis de Cendre se retrouvèrent autour d’elle pour fêter son accession au rang de Maîtresse Vampire. Samuel et Isaure étaient eux aussi présents car en âge de comprendre l’importance de cette cérémonie dont Cendre leur avait parlé à maintes reprises.
La tenue de rigueur était le violet, sauf pour Cendre qui avait revêtu le costume d’intronisation.
Tous avaient suivi les protocoles à lettre sauf Nathan Livinghell qui arriva, vêtu d’une veste rouge sous unique prétexte qu’il n’avait pas de violet dans sa garde-robe...


A la fin du discours du Comte, discours fort élogieux au demeurant à l’égard de Cendre, tous se présentèrent à leur Maîtresse, maintenant officielle, pour faire part de leurs joies et présenter leurs félicitations.


Nathan Livinghell fut le dernier. Ses propos furent brefs et il salua Cendre en lui disant qu’il devait se retirer pour affaires urgentes.
- Tu ne restes pas prendre un verre de plasmafruits avec nous ?
- J’aurais bien aimé, Maîtresse, mais d’autres obligations m’attendent.
Francis et Lilith s’étaient éclipsés à sa suite et Caleb avait joué une mélodie macabre sur l’orgue, qui exalta l’assemblée encore présente. Tous veillèrent en l’honneur de leur nouvelle Maîtresse et la fête se poursuivit jusqu’au lever du jour.

 

A suivre 🙂

 

 

Bonus :

Révélation

Photos souvenirs de la soirée d’accession au rang de Maîtresse Vampire

 

 

 

 

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